1985 : l'année noire de l'aviation commerciale

Dans le domaine de l'aviation commerciale, 1984 avait représenté une période idéale : les statistiques des États-Unis – pays où les activités aériennes sont les plus intenses –avaient fait apparaître, sur 3,09 milliards d'heures de vol d'avions de ligne, seulement 12 accidents et 4 victimes, toutes à bord d'un vol cargo, soit 0,16 accident pour 100 000 heures de vol. Pour les dix dernières années, le taux s'élevait à 0,34 pour 100 000 heures de vol.

Le transport aérien commercial est à juste titre considéré, avec le train, comme le moyen le plus sûr de se déplacer ; à travers le monde, d'innombrables compagnies internationales ou domestiques n'enregistrent aucun accident pendant des années. Et pourtant, l'accident grave n'a pu être complètement éliminé et la « loi des séries » s'est douloureusement rappelée au mauvais souvenir des constructeurs, des exploitants, des équipages et des passagers au cours de l'été 1985 : cinq accidents ont, entre le 23 juin et le 6 septembre, causé la mort de près de 1 100 personnes, le record de tous les temps pour un seul appareil ayant été « battu » par le Boeing 747 de Japan Air Lines, avec 520 morts et 4 survivantes. Cet accident s'est produit le 12 août, alors que l'appareil, en difficulté peu après avoir décollé de Tokyo à destination d'Osaka, tentait de revenir à son point de départ. Ce « crash » dans la montagne avait été précédé, le 23 juin, par la disparition, à 200 km au large de l'Irlande, d'un Boeing 747 d'Air India en provenance du Canada, à la suite, vraisemblablement, d'une explosion dont les causes n'ont pu encore être déterminées avec certitude. Bilan : 329 morts. Survenait ensuite, le 2 août, à Dallas, l'écrasement, un peu avant l'entrée de piste, d'un Lockheed Tristar 1 011 de Delta Airlines, à la suite d'un « cisaillement de vent » en course finale : 133 morts, 31 survivants. Puis, après l'appareil japonais, c'était le 22 août, à Manchester, un Boeing 737-200 de British Airtours, filiale charter de British Airways, dont un réacteur prenait feu en début de décollage, l'équipage parvenant à arrêter l'appareil : des survivants mais aussi des morts (89 morts, 34 rescapés). Enfin, le 6 septembre, à Milwaukee (Arkansas), c'est un DC-9-30 de Midwest Express Airlines qui perd des éléments de moteur au décollage. L'appareil s'écrase à 3 km de la piste. Ses 31 occupants sont tués.

Cette « année noire » est heureusement exceptionnelle. Dans cette série de catastrophes, il apparaît que, dans un seul cas – celui de Dallas –, un facteur extérieur a été la cause directe de l'accident. En ce qui concerne l'appareil indien, l'hypothèse de l'attentat a été retenue mais n'a pas encore pu être prouvée. Quant aux trois autres accidents, ils sont dus à des défaillances de structure pour l'appareil japonais et mécaniques pour les deux autres. Là, c'est la maintenance qui est en cause, Boeing ayant en outre reconnu une part de responsabilité dans la catastrophe du B-747 japonais.

La fatalité rarement en cause

Lorsqu'un accident se produit, la fatalité est rarement en cause. Si l'on écarte l'hypothèse de l'attentat, l'accident survient le plus souvent à la suite d'une accumulation d'incidents qui, pris séparément, ne mettent pas en cause la sécurité du vol mais qui, en s'additionnant, provoquent la catastrophe. Malgré toutes les vérifications périodiques et avant vol les plus soigneuses, les avions modernes et leurs équipements étant de plus en plus sophistiqués, les incidents sont relativement fréquents et peuvent même survenir au plus haut niveau, comme le président de la République en personne a pu s'en rendre compte en partant en Concorde pour la Guyane. Mais, dans la plupart des cas, l'intervention de l'équipage remet les choses en ordre au cours du vol. En raison de la redondance voulue des systèmes, de l'instrumentation, de l'avionique et des GMP (groupes motopropulseurs), l'avion peut poursuivre son vol en sécurité avec un ou plusieurs moteurs en panne, et on peut attendre l'arrivée sur l'aéroport de destination ou sur un aéroport de déroutement. En outre, tout comme l'équipage technique (pilotes, officiers mécaniciens navigants), l'équipage commercial (hôtesses et stewards) est soumis à un entraînement régulier et sévère : en cas d'atterrissage forcé, un Boeing 747 doit pouvoir être évacué dans les 90 secondes. Mais il faut tenir compte de la panique et des problèmes de circulation à bord des appareils équipés en version « haute densité ».