La contrainte extérieure demeure l'un des soucis majeurs pour l'économie française : l'un des risques d'une relance de l'activité réside notamment, comme l'ont démontré les expériences passées, dans la très grande vulnérabilité de l'équilibre commercial du fait d'une intensification des importations. Pour tenter de conjurer ce risque, les arbitrages budgétaires ont privilégié les dépenses susceptibles de favoriser la croissance et l'emploi sans provoquer une trop forte augmentation, du moins immédiate, des achats à l'étranger : ainsi se sont trouvés particulièrement encouragés certains équipements publics, le logement, les économies d'énergie.

Inflation

L'autre contrainte, intérieure, concerne l'inflation. La relance par la demande publique et privée est conçue, selon les experts gouvernementaux et les conseillers du président de la République, non seulement comme compatible avec l'exigence de contenir la hausse des prix, mais aussi comme susceptible d'y aider, dans la mesure où l'augmentation de la production qui doit en résulter est censée entraîner une baisse des coûts unitaires des entreprises.

Les crédits budgétaires consacrés directement à l'emploi représentent plus de 18 milliards de F (2,6 % du budget) ; la progression en est spectaculaire, puisqu'elle atteint 45 % en un an. Cet effort concerne l'insertion professionnelle des jeunes (+ 71,5 %), le reclassement, la mobilité et le maintien de l'emploi (+ 28 %), la formation professionnelle (+ 33 %), l'amélioration de l'ANPE (+ 38 %). Le lancement des contrats de solidarité est assorti d'une provision budgétaire de 2 milliards de F destinée à financer des aides et incitations diverses dans le cadre de cette nouvelle procédure dont les modalités pratiques devaient être définies dans les mois suivants.

Une forte sélectivité est, d'autre part, instituée dans l'affectation des crédits d'investissements : la reconquête du marché intérieur et l'impératif de la compétitivité de l'économie constituent deux exigences majeures que le gouvernement entend satisfaire à travers le renforcement des capacités productives des entreprises françaises. Recherche et innovation deviennent ainsi une priorité fondamentale, au même titre que l'emploi. Ainsi, la dotation de l'Agence nationale pour la valorisation de la recherche (ANVAR) progresse-t-elle de 76 %, tandis que l'aéronautique et le spatial sont également particulièrement favorisés.

Le plan d'informatisation bénéficie, en autorisations de programme, d'une progression de 80 % de ses crédits par rapport à 1981, et le Commissariat de l'énergie solaire d'une progression de 50 % !

Enfin, les aides publiques de toute nature à l'industrie progressent de 52,4 %, atteignant globalement le montant de 34,4 milliards de F : l'objectif étant de soutenir les entreprises en difficulté, et d'aider à leur modernisation ou à leur reconversion : PME, emploi, exportation sont les maîtres mots de cet effort. Il faut aussi ajouter que les nationalisations justifient l'inscription de 2 milliards de F au budget 1982, destinés à amorcer la pompe à indemnisation.

Le deuxième grand axe de la loi de finances 1982 concerne la politique sociale et s'articule autour de l'idée de solidarité. Deux points d'application : l'aide aux catégories les plus défavorisées, d'une part, et une répartition plus équitable des contributions fiscales, d'autre part.

– Le relèvement du minimum vieillesse, porté à 2 000 F depuis le 1er janvier 1982, des allocations familiales, augmentées de 50 % en deux étapes depuis l'été 1981, des pensions d'invalidité et des retraites agricoles illustre le premier point.

– L'institution d'un impôt sur le capital est l'illustration la plus spectaculaire du second, assortie de certains aménagements de l'impôt sur le revenu, tels que, notamment le plafonnement du quotient familial. Ces dispositions concernent, en fait, le volet « recette de la loi de finances ».

Impôt sur le capital

Le gouvernement s'est efforcé de limiter l'ampleur du déficit budgétaire : il a notamment tenu, sur intervention du chef de l'État, à maintenir le déficit au-dessous du seuil des 100 milliards de F, dont le franchissement risquait de revêtir une sorte de signification symbolique, aux conséquences psychologiques incertaines dans la communauté financière internationale. La capacité du nouveau gouvernement à bien gérer l'économie française restait à démontrer, et le ministre de l'Économie et des Finances, Jacques Delors, s'est montré particulièrement soucieux de préserver la parité du franc, par une gestion financière propre à sauvegarder la confiance des milieux internationaux.