Avec ce même moteur, l'Aérospatiale va réaliser une version grue de l'Écureuil. En 1981, le total des ventes fermes enregistrées s'est élevé à 769 hélicoptères et celui des livraisons à près de 400 appareils. Mais la cadence actuelle — 35 appareils par mois — sera doublée l'an prochain.

Moteur

Chez les motoristes, 1982 a vu la mise en service effectif le 24 avril du CFM 56, le moteur franco-américain (SNECMA/General Electric), sur les premiers DC 8 61 remotorisés de la compagnie américaine Delta Airlines. Compte tenu de la décision prise par l'US Air Force de remotoriser avec ce même moteur une partie de sa flotte d'avions tankers KC 135, et du lancement par Boeing d'une version remotorisée du B 737, l'avenir du CFM 56 est largement assuré à moyen terme.

Airbus Industrie comme Boeing, par contre, hésitent à utiliser ce moteur pour leur futur avion de 150 places : celui-ci devra avoir un moteur plus moderne, qui n'existe pas encore. La lutte pour les économies de carburant constitue à cet égard un facteur de progrès mais oblige les motoristes à développer prématurément des moteurs nouveaux. D'où la confusion qui règne, au plan mondial, autour du moteur de 10 t.

En fin de compte, l'industrie aéronautique française se porte bien, même si des problèmes liés à la compétitivité sur le marché apparaissent. Elle employait, fin 1981, 112 500 personnes, dont 62 200 dans le secteur avions et missiles, 23 700 dans celui des moteurs, 26 600 dans celui des équipements et de l'avionique ; soit 2 500 de plus en un an.

L'Aérospatiale annonce, pour la première fois, des bénéfices substantiels (403 millions de F avant impôts), tandis que son endettement est ramené à 615 millions de F. Les investissements dépassent pour la première fois, en 1982, le cap du milliard de F. La participation de l'État aux recherches et développements tend à baisser, ce qui inquiète les industriels.

Armement

Bonnes perspectives malgré une passe difficile

Les commandes d'armement français passées par l'étranger (32 milliards de F) en 1981 ont fléchi de 14 % en francs courants par rapport à 1980, ce qui correspond à une chute d'au moins 25 % en volume.

L'année avait pourtant bien commencé puisque 20 milliards de F de commandes avaient été engrangés au cours du premier semestre. Mais les clients de la France, constitués à 75 % de pays arabes, n'ont pas apprécié l'élection d'un président de la République jugé trop favorable aux thèses israéliennes. D'où l'accueil glacial réservé au matériel français par les délégations étrangères qui se sont succédé au Salon aéronautique du Bourget puis à l'exposition de Satory au printemps 1981.

Le second semestre a donc été extrêmement médiocre (seulement 12 milliards de F de commandes), contre-performance d'autant plus fâcheuse que la France exporte bon an mal an 40 % de sa production militaire et que, dans le domaine extrêmement concurrentiel des ventes d'armes, le terrain perdu est difficile à rattraper.

Actes politiques

Le recul est particulièrement net en matière d'aéronautique puisque, toujours pour 1981, on note en tout et pour tout la vente de 19 Mirage III et de 36 Alpha Jet à l'Égypte, au Pérou et au Cameroun. Recul également pour le matériel naval, mais il faut se souvenir que 1980 avait été un cru exceptionnel grâce à un gros contrat (14,4 milliards de F) passé par l'Arabie Saoudite. En revanche, les missiles, comme par exemple le fameux Exocet qui a détruit le destroyer britannique Sheffield pendant la guerre des Malouines, sont restés très demandés, pour la raison bien simple que la France occupe, avec les États-Unis, une position dominante sur ce marché.

Qu'on le veuille ou non, les ventes d'armes sont des actes politiques, aussi bien pour le fournisseur que pour l'acheteur. Le fournisseur peut s'interdire de livrer certains matériels (exemple : armes de lutte contre la guérilla) à des États réputés insuffisamment démocratiques (Argentine, Chili, Afrique du Sud) ; et l'acheteur peut refuser de favoriser les exportations d'un pays qui n'a pas fait clairement connaître les nouvelles bases de sa politique étrangère. Le flottement qui caractérise désormais les relations entre les marchands de canons français et leur clientèle traditionnelle ne doit donc surprendre personne.