L'arrestation, le 18 janvier 1980, du père Dimitri Doudko, un des prêtres orthodoxes russes les plus connus en Occident par ses sermons et ses écrits clandestins (samizdat), met le patriarcat de Moscou en difficulté. Cette arrestation a été précédée par celle du père Gleb Yakounine et de Lev Reguelson, laïc animateur du séminaire chrétien de Moscou. De janvier à avril, d'autres arrestations de chrétiens suivent. L'Occident dénonce une nouvelle vague de répression antireligieuse en URSS ; l'évêque russe de Bruxelles, Mgr Basile, prend, devant le patriarcat de Moscou, la défense du P. Doudko ; et les autorités catholique, protestante et orthodoxe de France (le cardinal Etchegaray, le pasteur Maury, Mgr Mélétios) signent, le 14 février 1980, une pétition commune condamnant des actes qui ne sont « conformes ni à la Constitution de l'URSS ni à l'Acte final de la Conférence d'Helsinki ».

Dans cette affaire, le patriarcat de Moscou n'est pas en mesure d'agir. Il a marqué en novembre 1979 son désaccord avec la lettre que Jean-Paul II a adressée au métropolite Slipyj à l'occasion du millénaire de l'Ukraine chrétienne. Cette lettre approuve « l'uniatisme » fondé par « l'union de Brest-Litovsk » (1596). Mais le patriarcat se satisfait des assurances d'œcuménisme que lui donne le cardinal Willebrands, et participe, du 13 au 17 mars 1980, à Odessa, à la cinquième rencontre officielle de l'Église russe et du catholicisme romain.

Musulmans

Depuis plusieurs années, faits politiques et religieux à l'appui, on parlait de renouveau islamique, de poussées intégristes, d'applications nouvelles de la loi coranique, d'expansion de l'islām décidé à affronter les problèmes de la modernité. C'est aujourd'hui de bouillonnement et d'effervescence qu'il faut parler à propos de l'année écoulée, dans les pays du Maghreb comme dans ceux du Moyen-Orient, en Afrique noire comme dans les pays asiatiques musulmans. Une année encore marquée par la figure et l'exemple du chiite Khomeiny, dont les appels ont eu un retentissement considérable même dans l'islām sunnite.

Théocratie

À Téhéran, les appels au monde musulman ne cessent de retentir, contre « les gouvernements corrompus et tyranniques », y compris ceux qui s'abritent derrière le drapeau de l'islām. Et, lors du dernier vendredi du mois de Ramadan (17 août 1979), l'ayatollah Khomeiny déclare : « Les gouvernements du monde doivent savoir que l'islām ne peut être vaincu. L'islām sera victorieux dans tous les pays du monde et les enseignements du Coran prévaudront dans le monde entier. »

La Constitution iranienne met en pratique ces déclarations. Les institutions étatiques de l'Iran seront désormais « guidées par un homme connu pour ses qualités de courage, d'honnêteté, de savoir, de vertus et de sagesse » (l'ayatollah) ou, à son défaut », par un collège de dignitaires religieux » qui seront les garants de l'orthodoxie chiite. Une place est faite cependant aux minorités (zoroastriens, chrétiens, juifs) concernant le statut des personnes et les rites religieux.

Dans la vie quotidienne, alors que les tribunaux islamiques continuent à prononcer des condamnations — le plus souvent à la peine capitale — pour offense à Dieu, corruption sur terre, blasphème, la législation coranique étend son emprise. En politique extérieure, y compris dans l'affaire des otages américains, l'ayatollah Khomeiny lance à plusieurs reprises des appels à la guerre sainte, qui, dit-il, doit embrasser les plans religieux, financier et militaire. Et, lors des troubles qui éclatent à La Mecque au mois de novembre, l'ayatollah appellera à l'insurrection de l'islām contre les États-Unis qu'il rend responsables, dans un premier temps, des incidents : « II y a guerre de fait, dit-il, entre l'islām et les païens. »

La Mecque

Le coup de théâtre éclate le mardi 20 novembre : la grande mosquée de La Mecque, lieu saint par excellence de l'islām et où deux millions de musulmans convergent chaque année, est le théâtre de violents combats. Un commando occupe les lieux. Les morts — assaillants, gardes saoudiens, mais aussi pèlerins — sont nombreux. Les rebelles, appartenant à un mystérieux Mouvement des révolutionnaires musulmans, sont mis hors de combat quelques jours plus tard ; 63 d'entre eux subiront le 9 janvier le châtiment prévu pour les renégats par le Coran : la décapitation.