En revanche, il n'y aura plus d'interdiction pour pornographie ou motifs politiques. C'est ainsi que l'on a pu voir cette année, malgré les réticences de départ, Le triangle écorché de Jean-Pierre Kalfon (dont certaines images sont pour le moins osées) et Skezag, un film américain relatant la déchéance d'un ancien soldat du Viêt-nam qui devient un drogué. Et, bien sûr, mais déjà bien avant la décision ministérielle officielle, Histoire d'A, le film de Charles Belmont sur l'avortement, qui avait été longtemps interdit.

Cette libéralisation s'accompagne de deux sortes de mesures nouvelles et restrictives : le matériel publicitaire (affiches, dessins, photos, bandeaux au fronton des salles) sera soumis à la commission de contrôle. Les films français dont le propos dominant est la pornographie ou la violence ne bénéficieront plus de l'aide automatique de l'État. Quant à ceux qui viennent de l'étranger, ils seront taxés, sauf dans le cas d'une « valeur artistique manifeste », qui sera estimée par la commission de contrôle, le ministre jugeant en dernier ressort. Un critère bien subjectif... Mais un grand pas a été fait, incontestablement, puisque la liberté devient la règle générale.

Télévision

Après les bouleversements, on attend les nouveautés

Traditionnellement marqué par une période de torpeur, l'été revêt, cette fois, un caractère un peu particulier ; certains le qualifient d'été le plus long de l'histoire de la télévision.

Le public constate, avec lassitude et mauvaise humeur, que le temps est venu, sur les trois chaînes de l'ORTF en liquidation, de diffuser les fonds de tiroirs en tous genres, les rares bons moments étant dus à des rediffusions (Un jour à Nice, Les fossés de Vincennes) ou à des séries réalisées en coproduction (Ardéchois, cœur fidèle, La juive du château Trompette). La critique n'est pas tendre. Au sein du personnel, a tous les niveaux, la perspective du prochain éclatement de l'Office engendre une atmosphère lourde d'inquiétude.

Soumis à l'Assemblée le 23 juillet 1974, le projet de réorganisation est adopté le 30. Les parlementaires, réunis en session extraordinaire, discutent le projet de loi pendant 21 h 45. Angoisse et intrigues redoubleront après la loi du 7 août 1974, qui crée sept sociétés autonomes.

Théoriquement, l'adoption du projet de loi par le Parlement résout tout. Dans la pratique, tout reste à faire, et dans les pires conditions. Il s'agit, en premier lieu, d'essayer de diffuser, vaille que vaille, un programme à peu près normal. À l'aube du dernier trimestre, les directeurs de chaînes sortants tentent un réel effort de qualité après le marasme de l'été.

Derniers feux

Au mois d'octobre commence le grand feuilleton de Marcel Jullian, Les Fargeot, histoire d'une famille française au jour le jour ; Chéri-Bibi, feuilleton en 45 épisodes, lui succède en décembre. La série de quatre entretiens avec Bruno Bettelheim, spécialiste international des psychoses infantiles, déclenche de vives réactions. Côté théâtre, notons Antoine Bloy, une adaptation de Marcel Bluwal d'après le roman de Paul Nizan, Tristan et Isolde de Wagner, La mort d'un guide, de Jacques Ertaud et Henri Grangé. Six Histoires insolites, les Classiques de l'étrange, Histoire des gens, de Pierre Dumayet, série historique d'un genre nouveau, complètent, avec des variétés confiées à Thierry le Luron ou à Jean Le Poulain (Le Poulain au galop), le menu de la chaîne 1.

Sur la 2, Pierre Sabbagh présente de grandes dramatiques : Madame Bovary, d'après Flaubert, mise en scène par Pierre Cardinal ; Le port, adapté par Claude Santelli d'après Maupassant. Il fait alterner, le mercredi, cinéma et théâtre, et diffuse un grand feuilleton, Le pain noir, mis en scène par Serge Moati d'après Georges-Emmanuel Clancier. Aux aventures allemandes du comte Yoster succède le feuilleton policier américain Les rues de San Francisco. Max-Pol Fouchet, quant à lui, a conçu une série de treize émissions très appréciées, consacrées à l'impressionnisme. Les Top à, variétés devenues traditionnelles, continuent.