La quasi-totalité des marchés des matières premières s'étant caractérisée par de fortes tensions dans les rapports entre l'offre et la demande, un nouvel équilibre a pu être difficilement réalisé, et, bien sûr, chaque fois à un niveau des prix nettement plus élevé.

La situation, à court terme, reste incertaine et confuse et ne pourra pas se prolonger trop longtemps : ou bien une solution doit être trouvée grâce à un accroissement de l'offre, ou bien la demande décroîtra par suite du ralentissement conjoncturel normal, qui peut s'accentuer du fait des difficultés constatées en matière d'approvisionnement non seulement en pétrole, mais aussi en d'autres matières premières.

Cette évolution probable provoquera sans doute une détente sur les marchés des métaux non ferreux, comme pour la plupart des matières premières agricoles industrielles. Pour les céréales, on peut prévoir des prix stables, la raréfaction des denrées alimentaires dans le monde restant un stimulant pour les prix.

Accélération

Un retour aux niveaux des prix bas qui ont caractérisé d'autres périodes de récession apparaît peu probable. Considérée sur une période très longue (par exemple de janvier 1954, point extrême après le boom de Corée, à septembre 1971, avant le boom actuel), la hausse annuelle moyenne des prix des matières premières n'a atteint que 1,8 %. Ce pourcentage d'accroissement n'est pas proportionnel à l'érosion monétaire en général ; les prix des matières premières avaient incontestablement un retard à rattraper comparativement aux autres prix. Il existe, du reste, une tendance à l'accélération dans la hausse des prix des matières premières, comme en témoignent les chiffres de la hausse moyenne annuelle des prix pour quelques périodes intermédiaires : décembre 1958-septembre 1971 : + 2,4 % ; décembre 1963-septembre 1971 : + 2,7 % ; décembre 1968-septembre 1971 : + 2,8 %.

Un élément nouveau dans la formation des prix des matières premières (dont l'importance ne peut pas encore être évaluée) est le rôle que les pays producteurs pourraient jouer dans celle-ci en diminuant leur production ou en la stockant.

L'exemple de l'embargo du pétrole est éloquent à cet égard. Certains communiqués font également état d'une intervention sur les prix du cuivre, grâce au financement des réserves par des capitaux du Moyen-Orient. La question reste posée de savoir dans quelle mesure cette initiative connaîtra le même succès.

La session extraordinaire de l'ONU

Pendant les trois dernières semaines d'avril 1974 se tient, à New York, une session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations unies. Convoquée à la demande du président algérien H. Boumediene au nom des pays non alignés, elle porte sur les questions fondamentales des matières premières et du développement.

Les pays en voie de développement revendiquent une révision des relations économiques dans toutes leurs implications, en vue d'établir un nouveau système de « rapports fondés sur l'égalité et les intérêts communs de tous les États ». Plus concrètement, une redistribution des richesses entre pays industrialisés et pays déshérités qui, avec 90 % de la population du globe, ne disposent que de 30 % du revenu mondial. Les pays non alignés font état de la nécessité de revaloriser le prix des matières premières et même de renverser les termes de l'échange, tout en facilitant l'accès des pays en voie de développement à la technologie de pointe.

Aide

Plus de 140 discours ont été prononcés en trois semaines. Michel Jobert, reprenant les thèmes du président Pompidou, a proposé un effort international concerté pour l'organisation des marchés des matières premières sous forme de la mise en place d'un « réseau d'accords ou d'arrangements couvrant les principales matières premières importées, tant par les pays industrialisés que par les pays en voie de développement ».

Finalement cette Assemblée générale extraordinaire a adopté deux documents de base : une déclaration proclamant solennellement l'urgence d'établir un « nouvel ordre économique international », et, d'autre part, un programme d'action qui prévoit notamment une aide internationale en faveur des pays pauvres les plus durement touchés par la crise du pétrole. Ces textes ont été adoptés, sans vote, et plusieurs pays ont exprimé des réserves, notamment sur le droit des nationalisations.

Le ministre algérien des affaires étrangères, A. Bouteflika, devait constater en conclusion : « Le mérite de cette session aura été incontestablement d'avoir fait progresser l'esprit de concertation et, par conséquent, d'avoir renforcé le rôle des Nations unies. »

Demi-échec, en définitive.