Énergie

La guerre du pétrole

En franchissant le canal de Suez le 6 octobre 1973, au milieu de l'après-midi, les forces armées égyptiennes ne relancent pas seulement l'interminable conflit israélo-arabe : elles ouvrent un affrontement bien plus vaste encore (économique celui-là) entre les pays producteurs et les pays consommateurs de pétrole ; plus généralement même, elles conduisent à briser, au profit des seconds, la prédominance de toujours des pays industrialisés sur les pays du tiers monde, riches seulement de matières premières.

En vérité, cet affrontement économique était prévisible et même engagé depuis plusieurs années, et la guerre du Proche-Orient n'a fait que lui donner une accélération dramatique. Aussi convient-il de rappeler d'abord les données économiques et politiques fondamentales qui constituent la toile de fond des événements.

Lexique
Produits

Brut (pétrole brut) : produit extrait d'un gisement pétrolifère, et n'ayant subi aucune transformation en raffinerie (en anglais crude oil).

Gas-oil : produit moyen de la distillation du pétrole, utilisé pour la production de chaleur et d'énergie.

Naphta : produit léger de la distillation du pétrole, largement utilisé comme matière première par la pétrochimie.

Fuel, fuel-oil, mazout : produit lourd ou résidu de la distillation du pétrole (ou de leur mélange), utilisé comme combustible pour la production de chaleur et d'énergie.

Carburéacteur : combustible pour moteur à réaction.

Raffinage

Distillation atmosphérique : première distillation du pétrole brut, qui permet d'obtenir l'essence, le kérosène, le gas-oil et les produits les plus lourds ; toujours effectuée à la pression atmosphérique normale.

Distillation sous vide : distillation du résidu de la distillation atmosphérique, qui permet d'obtenir notamment des fuels lourds et des bitumes.

Craquage : procédé thermique ou catalytique qui permet d'accroître la proportion relative des composants légers d'une huile par modification de la structure chimique de ses constituants (en anglais cracking).

Vapocraquage : craquage effectué avec de la vapeur d'eau, et qui permet d'obtenir notamment les produits de base de la pétrochimie.

Reformage : procédé thermique ou catalytique de traitement de fractions légères de pétrole, en vue d'obtenir une essence ayant une teneur en hydrocarbures aromatiques et un indice d'octane plus élevés que la charge (en anglais reforming).

Économie

Affichage : se dit de la publication (qui se faisait autrefois aux États-Unis par affichage) des prix du pétrole brut et des produits finis sur les marchés spécifiques du pétrole. Sert de base à l'assiette fiscale. (En anglais posting).

Prix affiché : prix figurant sur les cotations publiques (voir affichage). Actuellement, pour le pétrole, ils sont fixés unilatéralement par les États producteurs. (En anglais posted price.)

Prix de marché : prix résultant de la libre confrontation entre acheteur et vendeur, et auquel sont réalisées les transactions commerciales.

Redevance : contribution imposée au titulaire d'un titre d'exploitation et payable en espèces ou en nature. Elle est généralement une obligation fixée par le cahier des charges de la concession et a pour assiette la production, dont la valeur est calculée sur la base du prix affiché.

OPEP : Organisation des pays exportateurs de pétrole ; elle regroupe la plupart des pays producteurs de pétrole, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique latine, fondée en 1964. (En anglais OPEC : Organization of petroleum exporting countries.)

OPAEP : Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole.

Transports

Pétrolier : navire-citerne affecté au transport en vrac du pétrole et des produits pétroliers (en anglais tanker).

Pipe-line : canalisation pour le transport des fluides et, par extension, ensemble de l'ouvrage. Les pipe-lines spécialisés sont appelés oléoducs, gazoducs.

Mesures

Baril : unité de volume anglo-saxonne égale à 158,98 litres. Selon la densité du pétrole considéré, le nombre de barils par tonne métrique peut varier de 6,3 à 8. Pour une qualité moyenne, on compte 7 barils à la tonne. Une production de 1 baril/jour équivaut approximativement à 50 tonnes/an.

Illusion

Jusqu'en 1970, l'Occident a bâti son développement sur la croyance qu'il peut disposer d'énergie en quantité illimitée et à bas prix. Cette illusion, peu conforme aux schémas économiques classiques, n'est permise qu'en raison d'un accident historique : le fait que les compagnies pétrolières se sont assuré la maîtrise des fabuleuses (et sans doute uniques) ressources groupées autour du golfe Persique. Le coût d'exploitation de celles-ci est tellement faible qu'il a permis aux compagnies, tout en dégageant les profits nécessaires à leur croissance, de refouler les énergies concurrentes anciennes comme le charbon (en Europe, sa part dans la consommation est tombée de 77 % en 1950 à 22 % en 1972) et de contenir les nouvelles, comme l'énergie nucléaire.