Cette année voit encore dans les enceintes de justice des éditeurs poursuivis pour outrages aux bonnes mœurs par la voie du livre. C'est le cas d'Éric Losfeld et de Régine Deforges qui, surtout, refuse de se soumettre au dépôt préalable. Malgré une protestation collective de soutien signée par une centaine d'écrivains, d'artistes, d'éditeurs et de cinéastes, la censure gagne contre la liberté : l'éditrice est condamnée à 10 000 F d'amende.

Par contre, la 2e chambre de la cour d'appel de Paris confirme le jugement de relaxe dont bénéficient Me Denis Langlois et Paul Flamand, directeur du Seuil, pour la publication des Dossiers noirs de la police. Enfin, François Maspero est toujours en butte à des poursuites pour la publication de la revue Tricontinental et de plusieurs ouvrages interdits pour des motifs politiques.

Publicité

La place de la publicité dans la société contemporaine, c'est toujours la quadrature du cercle depuis la grande marée de 1968 et les vagues plus récentes ayant pour nom « La garantie foncière », « hexachlorophène » ou « huile de colza ». Aussi n'est-il pas étonnant que les publicitaires tentent de définir l'éthique de leur profession et sa finalité.

C'est ce que font Christian Chavanon (président d'Havas Conseil) et Marcel Bleustein-Blanchet (président de Publicis), qui se prononcent pour une moralisation de la publicité par les professionnels eux-mêmes, en liaison avec les annonceurs et les supports. Les publicitaires « ont pour devoir le rejet de toute allégation qu'ils savent mensongère ou dangereuse et l'acceptation d'une déontologie professionnelle », écrivent-ils. Ils souhaitent également que soient établis, « en accord avec les annonceurs, un véritable code et une véritable autorité et juridiction de la profession ».

Le débat, porté sur la place publique, est relancé par Jacques Dauphin, président de la Confédération française de la publicité. Le code, remarque-t-il, existe. C'est le Code de pratiques loyales de la Chambre de commerce internationale. Son application – devoirs et responsabilités de la publicité envers les consommateurs – est dévolue au Bureau de vérification de la publicité (BVP). Celui-ci a étudié 2 000 dossiers en 1972 et obtenu la modification de nombreuses allégations que le public aurait pu considérer comme mensongères, fallacieuses, ou simplement outrancières. Pour renforcer l'autorité du BVP, différentes commissions techniques, par secteur d'activité professionnelle, vont être créées.

Contrôle

Cet échange de vues n'est pas sans provoquer de réactions. D'abord au niveau du Syndicat national des agences de publicité (SNAP). Ensuite, de la part de deux syndicats (CGT et CFDT) qui publient, avec l'association Communication et Vérité, un manifeste violent sous le titre : 1 200 publicitaires affirment : la publicité ment. Ils rendent la publicité responsable « de la dégradation de la télévision, de l'aliénation des adultes et des enfants conditionnés par les stéréotypes culturels, de l'invention de fausses différences entre des produits identiques, de la création de formes nuisibles de besoins... ». Naturellement, ils dénoncent « la récupération commerciale de la défense des consommateurs ».

Il semble, en tout cas, que l'adoption d'une législation plus contraignante que la loi de 1963 soit souhaitée par de nombreux professionnels ; c'est dans ce sens que va le projet de loi mis à l'étude cette année. Il institue un contrôle au-delà de la partie écrite des documents publicitaires, qui oblige les annonceurs à rapporter la preuve de ce qu'ils avancent. Le juge aura la possibilité de prescrire l'insertion d'une annonce rectificative aux frais de l'annonceur condamné.

Télévision câblée

« La troisième culture » (Edgar Morin), ce géant dont chacun pressent qu'il va bouleverser les moyens d'information, entre dans l'actualité cette année. Les expériences – Villeneuve de Grenoble, Flaine (Haute-Savoie), Chatou (Yvelines) et bientôt Créteil, Cergy-Pontoise – sont encore peu nombreuses mais déjà créent un mouvement irréversible. Alors qu'aux États-Unis (6 millions d'abonnés) ou en Grande-Bretagne et en Belgique (2 millions d'abonnés) la télédistribution (retransmission des images et des sons non par ondes hertziennes, mais par câbles coaxiaux) atteint un âge adulte, elle n'en est en France qu'aux balbutiements, prise entre deux monopoles, celui des PTT pour l'acheminement des messages et celui de l'ORTF pour la diffusion hertzienne de l'information.