Autre quotidien victime d'une crise : Paris-Normandie. Après la disparition de Pierre-René Wolf, le groupe Hersant décide de racheter, au prix de 300 000 F, des parts qui, en 1945, avaient été remises pour 10 000 F.

Du 20 au 31 mai, la rédaction, soutenue par les sociétés de personnel et quelques associés fidèles qui refusent de vendre leur part, déclenche une grève. Elle veut obliger la SNPR (Société normande de presse républicaine) à dénoncer la convention passée avec le groupe Hersant, obtenir la nomination d'un administrateur provisoire et empêcher la transformation de la SARL en société anonyme. Elle ne parvient pas à tenir en échec les financiers, mais remporte cependant un succès. Les deux parties conviennent de la signature d'un protocole : la rédaction obtient son indépendance, sa permanence et que les conditions du libre exercice professionnel des journalistes soient reconnues et garanties dans les structures juridiques de la société.

1971-1972 restera dans l'histoire de la presse comme l'an I de la crise. Des révisions déchirantes, des convulsions, un avenir sombre, sont prévisibles.

Les États généraux de l'information, dont le projet est favorablement accueilli dans les milieux professionnels, permettront-ils de trouver les solutions miracles susceptibles de sortir la presse du marasme actuel ?

Édition

« 1972 », année importante pour le monde de l'édition. C'est, en effet, l'Année internationale du livre. Mais une certaine impréparation et la présence dans le comité français — d'ailleurs tardivement installé le 26 novembre 1971 — d'un plus grand nombre de fonctionnaires que de professionnels en aura, dans notre pays, compromis la portée. Quelques manifestations importantes cependant se déroulent : le Congrès de l'Union internationale des éditeurs à Paris, le Festival international du livre à Nice, qui accueille l'Union internationale du livre pour la jeunesse, et diverses manifestations culturelles.

Le bulletin de santé de l'édition, lui, n'est pas mauvais : chiffre d'affaires global : 1 935 000 000 de francs, ce qui représente un taux d'accroissement de 14 %. Les éditeurs français ont publié 21 571 titres contre 19 834 en 1969. Le nombre d'exemplaires produits s'élève à 322 500 000 contre 252 400 000, soit 27,8 % d'augmentation. Mais si l'on tient compte que l'indice du prix du livre est passé de 100 à 107,6, le taux de croissance n'est plus que de 6,5 %.

Une création dont les portes sont largement ouvertes sur l'avenir, la société Vidéogramme de France marque davantage encore cette année 1971-72. Destinée à promouvoir la vente des vidéo-cassettes et des vidéo-disques, il s'agit d'une association entre l'ORTF (producteur de programmes qui dispose déjà de quelque 500 000 boîtes représentant plus de 160 000 heures de diffusion) et Hachette, qui met au service de la société son réseau de distribution comprenant quelque 40 000 points de vente.

Le marché considérable des vidéo-cassettes et vidéo-disques permet de prévoir une révolution dans le domaine de la communication ; les experts pensent qu'aux États-Unis le marché se situera aux alentours d'un milliard de dollars en 1980 et, au Japon, à environ 40 millions de dollars dès 1975. Son exploitation cependant ne va pas sans poser plusieurs problèmes juridiques complexes, notamment vis-à-vis des auteurs et des artistes.

Bien que la société Vidéogramme de France puisse être ouverte à d'autres éditeurs qu'à Hachette (qui, comme l'ORTF, possède 34 % des actions), beaucoup d'entreprises se plaignent d'avoir été tenues éloignées des négociations. Mais, n'étant pas parvenus à adopter une attitude commune vis-à-vis des nouveaux média, les éditeurs manifestent une certaine inquiétude devant cet avenir où leur place n'est pas clairement définie.

Cette année marque également la parution de la Grande Encyclopédie Larousse, dont le premier exemplaire est remis à Olivier Guichard, ministre de l'Éducation nationale.

Chez les éditeurs, on note la transformation de la Librairie Larousse de société anonyme à responsabilité limitée en société anonyme à directoire. Cette transformation a pris effet à compter du 1er janvier 1972. Le directoire comprend : Étienne Gillon président, Claude Moreau et Jean-Louis Moreau, directeurs généraux.