En juillet 1968, devant les menaces de crises, A. Massamba-Debat dissout l'Assemblée nationale et crée un Comité de défense de la révolution. Quelques jours plus tôt, il est allé jusqu'à offrir de céder sa place à « plus doué que lui ». Les chefs de l'armée ont-ils voulu le prendre au mot ? Le 2 août, en tout cas, le président de la République congolaise disparaît mystérieusement de Brazzaville. Quelques jours plus tard il regagne le palais présidentiel. Au prix de larges concessions aux diverses tendances qui s'affrontent, il reste à la tête de l'État. Le gouvernement provisoire qu'il constitue alors ne compte qu'un seul officier, le lieutenant Poignet, mais le président est dores et déjà l'otage des militaires, décidés à mettre un terme au régime civil, estimé insuffisamment docile.

La constitution congolaise est abrogée, en août, et remplacée par un acte fondamental préparé par le Conseil national de la révolution — texte qui ouvre la voie à tous les excès. Le Conseil, qui compte 41 membres, nomme un directoire de 12 membres, dont la présidence est confiée au capitaine Marien Ngouabi. Au poste de Premier ministre (supprimé en janvier par A. Massamba-Debat) est désigné le capitaine Alfred Raoul. Le ministère de l'Intérieur et celui de la Défense sont également confiés à des militaires. Les premiers règlements de compte ont lieu avec les éléments de gauche, membres du gouvernement précédent.

D'insurmontables contradictions

La dernière semaine d'août est l'occasion de heurts violents entre l'armée régulière et des membres des milices d'extrême gauche, qui, retranchés dans le camp de la Météorologie au centre de Brazzaville, finissent par déposer les armes après de brefs, mais violents combats. Les militaires suppriment plusieurs mouvements révolutionnaires et exigent la démission du président Massamba-Debat. Dès septembre, le capitaine Raoul — rapidement promu commandant — et Ngouabi se partagent le pouvoir.

En octobre, un profond remaniement du Conseil national de la révolution permet de mettre à l'écart tous les membres de l'ancien régime, puis de traduire en justice et de faire condamner à des peines de prison plusieurs des principaux collaborateurs de l'ancien président Massamba-Debat.

Le commandant Ngouabi est nommé, en janvier 1969, chef de l'État, en remplacement du commandant Alfred Raoul, et, en février, le commandant Mouzabakani, ancien ministre de l'Intérieur, est arrêté. L'armée connaît les mêmes tensions internes que le Mouvement national de la révolution. Gens du Nord et gens du Sud, Bacongos et Mbochis, cadres subalternes et officiers supérieurs s'opposent sourdement dans un climat de confusion où l'observateur parvient difficilement à percevoir la réalité des conflits idéologiques. Cinq années de « socialisme scientifique » et un an de régime militaire n'ont pas permis aux responsables de surmonter leurs contradictions.

Congo-Kinshasa

16 780 000. 7. 2,1 %.
Économie. PNB (63) 118. Production (59) : A 28 % + I 37 % + S 43 %. Consomm. énergie (*66) : 90 kg e.c.
Transports. (*66) : 532 M pass./km, 1 969 M t/km. (64) : 42 500 + 32 900. (*66) : 311 293 000 pass./km.
Information. (66) : 7 quotidiens. (64) : *200 000. (66) : *21 000.
Santé (65). 500 . Mté inf. (53) : 40.
Éducation (64). Prim. : 1 592 225. Sec. et techn. : 88 891. Sup. : 3 136.
Institutions. État indépendant le 30 juin 1960. République présidentielle. Constitution de 1967. Président de la République et chef de l'exécutif : lieutenant-général Joseph-Désiré Mobutu, élu par le Congrès le 28 novembre 1965, après le coup d'État qui renverse le président Kasavubu.

La politique de fermeté inaugurée par le général Mobutu dès son accession au pouvoir ne se relâche pas. Le président congolais, qui recourt périodiquement aux remaniements ministériels pour élargir les assises de son gouvernement, sévit avec rigueur contre ses adversaires.

En octobre 1968, l'ancien chef rebelle Pierre Mulele est passé par les armes à Kinshasa. Considéré comme l'un des héritiers spirituels du leader progressiste Patrice Lumumba, assassiné au Katanga en janvier 1961, Pierre Mulele, réfugié à Brazzaville depuis la fin de la rébellion dans la province du Kouilou, avait pourtant regagné la capitale congolaise sur la promesse d'une amnistie. Son exécution provoque des réactions indignées à travers le tiers monde et la rupture des relations diplomatiques entre les deux Congos.