Pourtant, aucun championnat du monde n'atteindra jamais, aux yeux de l'opinion, le formidable impact des jeux Olympiques, puisque, à travers eux, se mesurent, en gros, les progrès de l'espèce humaine, et en détail ceux des diverses nations.

Le problème consiste donc à rétablir l'harmonie entre le fait et la loi.

On doute que le Comité international olympique, dans sa composition aristocratique, contestée à la fois par les autorités nationales sportives légales et par les pouvoirs sportifs spécialisés, puisse en être capable.

Comme l'a écrit Coubertin, en son temps : « Il est utopique de vouloir combattre l'excès. »

Encore est-il possible d'en atténuer les effets. Le gigantisme croissant des Jeux les conduira à leur perte, si l'on n'y prend garde.

On peut le combattre, en divisant l'intérêt au lieu de le concentrer sur seulement deux villes, tous les quatre ans. Par exemple, en officialisant des Jeux continentaux qui, outre leur intérêt propre, auraient le mérite de filtrer les entrées aux Jeux proprement dits, sur la seule base de critères sportifs incontestés.

Hélas ! aucun homme de conception et d'action, tel que fut naguère Coubertin, n'apparaît aujourd'hui capable d'imposer ses vues à l'univers du sport.

Mexico 68

Athlétisme

Quatorze records du monde améliorés ou égalés, la plupart des records olympiques battus, des exploits hors du commun, des performances inattendues, des révélations extraordinaires, tel est le bilan des épreuves d'athlétisme de Mexico. D'où viennent alors cette amertume rencontrée chez beaucoup, ces regrets exprimés par de nombreux spécialistes ? La réponse est simple : disputés à 2 300 m d'altitude, sur une cendrée synthétique, d'un rendement nettement supérieur à la cendrée classique, ces Jeux ont été ceux de l'injustice et de la nouveauté.

Injustice d'abord : les athlètes africains ou d'Amérique latine, vivant sur les hauts plateaux de leurs pays, n'ont pas été gênés par le site de Mexico, lu contraire de leurs adversaires européens ou américains du Nord. Cela explique bien certaines victoires écrasantes.

Nouveauté ensuite : la piste en matière synthétique du stade olympique de Mexico se révéla très favorable aux sprinters et aux sauteurs. Si l'on ajoute à cet élément important la moindre résistance de l'air en raison de l'altitude, on comprendra mieux que c'est dans ce domaine que furent battus le plus grand nombre de records.

La vedette revint incontestablement à Bob Beamon, qui franchit 8,90 m à son premier essai en longueur, avant que l'orage éclate sur le stade : il améliorait ainsi de 55 cm le précédent record du monde. Cette marge est considérable, car elle équivaut, en fait, à une amélioration de 6,5 %, soit pour un 100 m plat à un gain de plus de 6/10 de seconde ! Ce record, qui n'avait progressé que de 22 cm en 33 ans, risque de tenir plusieurs olympiades.

L'homme des Jeux, en athlétisme, ne fut cependant pas un recordman du monde : il s'agit du discobole Al Oerter, qui, à 32 ans, disputait ses quatrièmes jeux Olympiques et qui remporta sa quatrième victoire consécutive : il est le seul champion à travers tous les sports figurant au programme olympique à avoir fait preuve d'une telle continuité. Parmi les autres grands vainqueurs, il convient encore de citer Fosbury en hauteur, créateur d'un style révolutionnaire qui commence à faire des adeptes.

Chez les dames, la Polonaise Irena Swezinska, l'Américaine Wyoma Tyus et l'Allemande de l'Est Margitta Gummel furent les plus remarquées, avec la Française Colette Besson, qui gagna grâce à une dernière ligne droite fabuleuse qui lui permit de remonter et de dépasser quatre de ses adversaires.

Les Français et les Françaises, dans l'ensemble, eurent un comportement très honorable. Ils obtinrent au total 13 places de finalistes, contre 10 à Tokyo en 1964.

Sur l'ensemble des épreuves, les grands vainqueurs furent les Africains et les Américains du Nord, les grands vaincus les Soviétiques, qui ne remportèrent que deux titres masculins.

Aviron

À part quelques défaillances spectaculaires (dont furent victimes, entre autres, les Suisses Burgin-Studach, grands favoris du double-scull), les Jeux de Mexico ont été la première manifestation d'aviron disputée dans des conditions inhabituelles d'altitude. Dans l'ensemble, ils ont sacré les équipages sur lesquels on comptait généralement dans la course aux médailles.