Bridge

L'équipe de France au championnat du monde

L'équipe de France termine les Olympiades à une trop modeste huitième place. Primordial au football et au rugby, l'avantage du terrain ne compte guère au bridge.

C'est évidemment un résultat très décevant. Loin derrière l'Italie, mais assez près des États-Unis, le bridgé français peut prétendre au troisième rang de la hiérarchie mondiale grâce à la qualité de ses individualités.

Sa faiblesse est de n'avoir que peu de paires associées de façon durable. On a vu divorcer, cette année, deux des trois formations qui avaient enlevé les championnats d'Europe de Varsovie : Stetten ne joue plus avec Tintner, ni Roudinesco avec Pariente.

En outre, du fait de ses occupations professionnelles, Théron a dû provisoirement rendre sa liberté à Desrousseaux. Ils étaient l'une de nos associations les plus solides depuis une dizaine d'années.

Le bridge français est affligé d'une véritable tare : les animosités passionnelles entre certaines des paires ayant l'expérience et la qualité pour les rencontres internationales ne laissent aucun espoir de les réunir en équipe nationale.

Ces allergies ont fait que Svarc et Boulenger, la seule des trois paires couronnées à Varsovie qui continue à faire bon ménage, n'ont pas joué à Deauville. Ils ne voulaient, à aucun prix, faire partie d'une équipe où Bourchtoff et Delmouly avaient gagné leur place.

À la Fédération, on comptait cependant les titulariser d'office dans le cas, qui s'est effectivement produit, où ils n'auraient pas figuré dans le tiercé vainqueur de l'épreuve de sélection pour les Olympiades.

Cette épreuve — les responsables de l'équipe de France le savaient bien — était, cette année, un peu bâtarde. Trop longue dans ses phases éliminatoires, elle ne l'était plus assez au stade de la finale. Sur un parcours trop court, la chance pouvait jouer un rôle déterminant. Enfin la qualité des paires qui y étaient admises, en plus grand nombre d'ailleurs que les années précédentes, n'était guère homogène.

Les dirigeants avaient donc prévenu qu'ils se réservaient le droit de rectifier sur le tapis vert les résultats acquis autour des tables. Seuls les gagnants de la sélection devaient avoir d'office, en principe, une place pour Deauville.

Il a fallu que ce soit les grands outsiders Versini et Steinberg qui l'emportent, devant une paire toute neuve, Desrousseaux-Sussel, et une équipe de revenants, Bourchtoff-Delmouly. Modifier ce résultat par un bout ou par l'autre, c'était ouvrir la porte à toutes les polémiques. À contrecœur, après de nombreuses consultations, la Fédération dut l'enregistrer.

Nouvelle vague

L'an prochain, pour les championnats du monde qui se dérouleront en Amérique du Sud, ils veilleront probablement à mettre sur pied une épreuve beaucoup plus sélective.

L'équipe de France a perdu en septembre dernier son titre de championne d'Europe à Dublin ; mais elle jouera les championnats du monde. Sa deuxième place la qualifie, c'est l'équipe seconde d'Italie qui l'a emporté ; le Blue Team, la première équipe italienne, détient et défendra son titre de championne du monde.

Les Italiens confirment que le bridge transalpin n'est pas seulement une élite de six joueurs, comme certains voulaient le croire, sans doute pour entretenir l'espoir. Derrière les immuables champions du monde, il y a une nouvelle vague obligée pour l'instant de se contenter du titre européen. Elle-même est suivie d'une équipe d'espoirs qui, lors du championnat du Marché commun, dont la prochaine édition aura lieu en 1969, a pu faire toucher les épaules à nos champions d'Europe.

La suprématie du bridge italien se confirme et semble due moins aux systèmes d'enchères conventionnels employés, qu'à la discipline d'équipe rigoureusement respectée par les joueurs transalpins.

Cette année a été marquée par les vrais débuts du bridge professionnel-spectacle, avec, pour tête d'affiche, l'acteur Omar Shariff. Son Circus est une troupe qui comprend les champions du monde Garrozzo et Belladonna, l'ex-Égyptien Yallouze et le Français Delmouly. Ils ont fait leurs débuts contre la Hollande, puis ils ont rencontré une équipe anglaise. Avant les Olympiades, ils devaient disputer à Paris une rencontre triangulaire avec les États-Unis et une équipe d'Europe comprenant Svarc et Boulenger. Les événements de mai entraînèrent son annulation.