Arts

La saison artistique a été bien remplie ; elle a offert des manifestations importantes : Ingres, l'Europe gothique, les Mayas, Vuillard. Et, pourtant, on s'aperçoit qu'il devient de plus en plus difficile de réaliser de grands rassemblements d'œuvres d'art. Les prêteurs, Américains en particulier, sont devenus réticents pour laisser partir les pièces de leur collection.
Est-ce pour cette raison que deux anniversaires, les cinquantenaires de la mort de Rodin et de Degas, n'ont pas été célébrés avec toute l'importance qu'ils méritaient ?
Les musées se sont montrés actifs, les galeries également. Elles ont présenté des centaines d'expositions. Cependant, le marché des œuvres d'art a été loin d'être florissant.

L'art abstrait a vu ses cours s'effondrer. Les modes vont de plus en plus vite. Les temps de la spéculation sont bien révolus.

Des tentatives ont été faites pour rapprocher les artistes du public, par exemple en organisant des ventes dans de grands magasins et les magasins à prix unique, en développant la diffusion de la gravure ou de la lithographie originales.

Déçus par les fluctuations des cours de l'art vivant, les amateurs se rejettent vers des peintres qui se rattachent davantage à la tradition. Il n'est que de voir les prix incroyables qu'atteignent en ventes publiques les grands ténors de la peinture moderne, des impressionnistes aux cubistes. De là, aussi, le regain de faveur que l'on constate généralement pour tous les petits maîtres de l'impressionnisme ou du néo-impressionnisme.

On a enregistré, cette année, plusieurs autres faits notables. Le Pavillon de Marsan, qui est enfin revenu au musée du Louvre, a abrité l'exposition de l'Europe gothique, et le laboratoire du musée s'y est définitivement installé. André Parrot a été nommé à la direction du Louvre, ce qui promet un remaniement complet et la création d'un véritable musée de la peinture française, qui permettra d'en suivre le développement des primitifs à Courbet.

D'autre part, un nouvel organisme a été créé, le Centre national d'art contemporain, le CNAC, chargé de promouvoir la création et d'organiser les expositions des artistes vivants, le musée national d'Art moderne ne s'intéressant plus qu'aux disparus.

Enfin, le vent de contestation qui a soufflé sur le pays a également soufflé sur les écoles d'art, occupées par les étudiants réclamant des réformes. Les questions posées, parfois confusément, n'en demeurent pas moins.

Les musées de Paris

L'activité a été grande, cette année, dans les musées parisiens. Outre les expositions mentionnées plus loin, il faut tout particulièrement noter les Arts mayas du Guatemala, au Grand Palais. Cette exposition, après avoir voyagé en Allemagne et dans quelques grandes villes de France, fut considérablement enrichie, notamment de stèles monumentales, pour être offerte aux Parisiens.

Les Israéliens, eux, ont envoyé au Petit Palais un ensemble qui, remontant au VIIe millénaire av. J.-C., nous donnait une image d'Israël à travers les âges. La présentation de fragments des Manuscrits de la mer Morte en constituait l'attraction la plus spectaculaire.

Le musée des Arts décoratifs a rassemblé un choix des trésors du musée de Chypre, complété par quelques pièces venant du Louvre, pour donner un panorama des courants artistiques qui se partagèrent l'île, de la préhistoire à Byzance, et jusqu'à l'art populaire des xviiie et xixe siècles. Ce même musée nous a présenté une exposition d'art fiction et un ensemble consacré à cinq peintres, représentatifs des courants artistiques suédois.

La Bibliothèque nationale nous a transporté chez les Précieuses avec les Salons littéraires au XVIe siècle ; elle célébra le centième anniversaire de la naissance de Paul Claudel et rappela le souvenir du charmant poète P.-J. Toulet. Le cabinet des Estampes a consacré un hommage au graveur Alexeïeff.

Le musée national d'Art moderne, lui, a consacré ses rétrospectives à des peintres vivants : Sonia Delaunay, Ubac, Hayden ; Mathieu y présentait les affiches qu'il a composées pour Air France. Celui de la Ville de Paris honorait un peintre, Cheval-Bertrand, et réunissait les portraits d'écrivains et d'artistes réalisés par la photographe Gisèle Freund. La section Animation-Recherche-Confrontation reprenait l'exposition organisée par la municipalité de Montreuil, l'Art d'avant-garde russe, 1910-1920, comblant ainsi une lacune de l'exposition d'art russe au Grand Palais, et présentait une nouvelle technique, les structures gonflables.