Ce n'est pourtant pas un hasard si les Maisons de la Culture s'intéressent plus directement à l'art moderne qu'à l'art ancien. En effet, le public, familiarisé à la création d'œuvres dramatiques contemporaines, se sent peut-être concerné avec plus d'évidence par les œuvres de son temps. C'est ce qui pourrait expliquer qu'après les impressionnistes français et allemands, les noms de Pignon, Manessier, Delaunay, Matisse, Le Corbusier, Piaubert, César ou Germaine Richier reviennent dans les programmes des Maisons de la Culture.

Les résultats de ces expositions vis-à-vis du public peuvent se situer par rapport à un seul exemple, celui du Théâtre de l'Est parisien, qui, en neuf jours, a reçu, pour une exposition consacrée aux impressionnistes, 13 000 visiteurs. Parmi ceux-ci, 2 230 ont utilisé l'entrée gratuite qui leur avait été remise pour se rendre la semaine suivante au musée du Jeu-de-Paume.

Architecture

Montréal, capitale des audaces

La crise d'une architecture, qui se trouve confrontée avec les problèmes (économiques et sémantiques) du logement pour le plus grand nombre et de la ville contemporaine, se découvre seulement en profondeur, après une analyse attentive.

En surface, c'est un foisonnement de formes d'une extraordinaire diversité.

Wright et Le Corbusier disparus, les autres maîtres de l'avant-guerre n'en poursuivent pas moins leurs œuvres respectives. Mies van der Rohe construit (grand hall de verre et métal) une bibliothèque publique pour Washington (D.C.), tandis que Hans Scharoun achève à Wolfsburg (Allemagne fédérale) un théâtre qui viendra compléter dans la ville de Volkswagen le centre culturel de Aalto.

La France accueille avec retard l'influence du Bauhaus, privilégiant le verre et l'acier dans ses meilleures réalisations esthétiques. Au contraire, l'influence de Le Corbusier, et surtout le rôle du béton, continue à grandir dans nombre de pays, en Europe (Suisse, Angleterre), en Asie (Japon, Inde), en Amérique (en particulier avec Paul Rudolph, comme l'indique son dernier projet pour l'hôtel de ville de Syracuse, tout de béton brut, hérissé de brise-soleil et d'auvents, troué de loggias, traversé de plates-formes).

Mais tandis que quelques tentatives expressionnistes se manifestent en France (Avoriaz) dans la jeune génération, tandis que Bruno Zevi signale à Rome l'apparition de l'architecture de « reportage » qui fait éclater la boîte au profit d'une expression narrative des besoins divers à quoi répond l'édifice, les États-Unis, qui demeurent le plus grand chantier d'architecture, voient fleurir aussi le syncrétisme historique et l'action architecture : du premier mouvement, Philip Johnson continue d'être le plus illustre représentant avec, cette année, un projet de monument aux immigrants, à Ellis Island, en forme de ziggurat ; quant au second mouvement, personnifié par J. Johansen, il a fait crier au scandale et couler beaucoup d'encre.

Les structures légères

Le haut lieu de l'année se situe à Montréal, qui célèbre le centenaire de la confédération canadienne par une exposition internationale.

Traditionnellement, ces manifestations ont été l'occasion pour ingénieurs et architectes de faire le point des techniques constructives en rivalisant d'une audace que les contraintes de la vie pratique ne leur permettent généralement pas.

Dix ans après Bruxelles, qui marquait un premier temps dans l'avènement des toitures suspendues et des formes gauches, Montréal est le festival des structures légères (tridimensionnelles ou en nappes) pouvant couvrir des espaces à l'échelle des quartiers.

On remarque en particulier : le pavillon de l'Allemagne fédérale, par Frei Otto et Rolf Gutbrod : il se compose essentiellement d'une couverture de 14 000 m2 qui abrite une surface au sol de 8 000 m2 ; cette couverture ultra-légère a été réalisée en tendant une membrane transparente en tissu de polyester sur un filet d'acier aux mailles de 50 cm et dont les câbles ont 12 mm d'épaisseur (la précontrainte est de 1 000 kg par câble et la charge de rupture de 10 000 kg). Le gigantesque filet est accroché à des mâts de soutien en acier, dont le plus haut s'élève à 37 m. Et sous cette tente transparente sont disposés à l'air libre des groupes de plates-formes horizontales qui accueillent les objets exposés et préfigurent, dans l'esprit des auteurs, les bâtiments légers que seront nos maisons et nos bureaux lorsque la technique sera parvenue à mettre des villes entières sous cloches conditionnées.

À chacun sa terrasse

Expérience d'avant-garde, Habitat 67, réalisé à Montréal, propose une préfabrication globale encore jamais aussi poussée et prouve la richesse et l'intérêt des solutions auxquelles peut conduire la combinaison d'éléments standards.