anges et démons (suite)
Le Nouveau Testament est en parfaite harmonie sur ce point avec le judaïsme ambiant. Certes, il combat certains excès qui risquaient de présenter les anges comme supérieurs au Christ, ou d’étouffer la véritable vie spirituelle sous des pratiques superstitieuses. Mais toujours il suppose comme certaine l’existence des anges. L’ange Gabriel annonce la naissance de Jean-Baptiste et celle de Jésus, des anges avertissent les bergers de la naissance du Sauveur, d’autres interviennent dans les récits de la Passion du Christ et de sa résurrection. Les Actes des apôtres, les Épîtres et plus encore l’Apocalypse les mentionnent souvent. En somme, l’existence des anges est une donnée ferme et constante de tout le Nouveau Testament.
Les anges mauvais, dont le chef est le diable, ou Satan, sont responsables de la tentation de Jésus et de la trahison de Judas ; ils tentent aussi les disciples et ils sèment l’ivraie parmi le bon grain ; ils sont condamnés au feu éternel (Matthieu, XXV, 41). Sous des termes différents (« démons » ou « esprits impurs »), le Nouveau Testament désigne les esprits mauvais responsables de diverses maladies, et surtout de maladies nerveuses. Même si la science moderne impute ces maladies à des causes naturelles, il n’en reste pas moins que leur attribution à une cause démoniaque confirme la croyance admise par Jésus et ses disciples à l’existence et à l’action multiforme d’esprits pervers, acharnés à combattre Dieu et à persécuter les hommes. Aussi la prière essentielle des chrétiens, le « Notre Père », contient-elle une requête particulière pour demander à Dieu de nous tenir à l’écart du « pervers ».
À la suite de l’Ancien et du Nouveau Testament, et peut-être sous leur influence, le Coran parle très souvent des anges, et professe une doctrine analogue à celle du judaïsme et du christianisme. Ce point de doctrine est même considéré comme l’un des plus importants : « L’homme bon est celui qui croit en Allāh et au Dernier Jour, aux Anges, à l’Écriture et aux Prophètes » (Coran, II, 172). Au contraire, l’« infidèle » est défini comme « celui qui est ennemi d’Allāh, de ses Anges, de ses apôtres, de Gabriel, de Michel » (II, 92). De même, l’existence du démon ne fait aucun doute, car il a tenté Adam et il continue à tromper et à séduire les hommes.
Les théologiens chrétiens ont beaucoup spéculé sur la nature même des anges ; mais toutes les théories échafaudées ne reposent pas sur de réelles bases scripturaires ; elles sont surtout l’application des principes philosophiques de chaque école. Aussi les conciles, surtout le 4e de Latran en 1215 et le 1er du Vatican en 1869-1870, ont-ils bien soin d’affirmer seulement l’existence des anges et des démons, sans se prononcer sur leur nature.
Le rapprochement de quelques textes bibliques permet de distinguer plusieurs classes parmi les anges : l’Épître de Jude attribue à Michel le titre d’« archange » ; la Genèse et Isaïe parlent des « chérubins » et des « séraphins » ; l’Épître aux Éphésiens énumère « les principautés, les puissances, les vertus, les dominations » et celle aux Colossiens ajoute « les trônes ». En complétant par « les anges » en général, on obtient les neuf chœurs, qui ont si largement inspiré la piété populaire.
Certes, le culte adressé aux anges et les exorcismes contre les démons ont pu dégénérer parfois en superstition ou en magie. Mais, à condition de se garder de tels excès, le culte des anges est considéré comme sain et légitime, ainsi qu’en témoignent l’Écriture, les Pères de l’Église avec Justin et Athênagoras au iie s., Origène au iiie s., Eusèbe de Césarée et Ambroise au ive s., et comme le confirme toute l’histoire de la spiritualité chrétienne.
J. C.