Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

Japon (suite)

Au cours du xviiie s., de nouvelles tendances se font jour sous l’impulsion des modèles occidentaux ou chinois, qui pénètrent par le seul port ouvert de Nagasaki. Le mouvement réaliste est incarné par Maruyama Ōkyo*, tandis que, dans le courant idéaliste, Ike* no Taiga est un des premiers à assimiler l’esprit de la peinture des lettrés (bunjin-ga).

F. D.


L’ère Meiji et l’époque contemporaine

Depuis la fin du xixe s., le problème de l’assimilation de la culture occidentale a créé une dichotomie artistique : un style occidental et un style traditionnel se développent conjointement, interférant quelquefois l’un avec l’autre.


Architecture

Avec l’ère Meiji et le début de l’ouverture aux influences extérieures en 1868, les divers courants architecturaux de l’Europe du xixe s. sont introduits au Japon. Les nouveaux matériaux, brique et pierre, deviennent rapidement plus utilisés que le bois traditionnel pour l’édification de bâtiments de style néo-gothique anglais ou néo-classique allemand. La doctrine du fonctionnalisme prônée par Walter Gropius* et le Bauhaus* est reprise au Japon par le Kōsaku bunka remmei, créé en 1937. Maekawa Kunio (né en 1905) s’emploie à propager ce style international. Frank Lloyd Wright*, qui voyage au Japon en 1916-1922 (Impérial Hôtel à Tōkyō), et surtout Le Corbusier* ont une influence prépondérante sur la jeune génération ; Sakakura Junzō (1901-1969), Yoshizaka Tokamasa (né en 1917) et Maekawa Kunio viennent à Paris dans l’atelier de Le Corbusier et collaborent à la création de son musée national d’Art occidental à Tōkyō.

Le ciment, l’aluminium, le verre autorisent l’abandon des masses rigides au profit des lignes courbes, des plans différenciés, entre lesquels la lumière joue. Au centre culturel de Tōkyō, Maekawa module l’aspect du béton armé en le revêtant de bois ou de galets ; on lui doit de nombreux autres édifices publics, dont l’université Gakushūin (1960 ; auditorium pyramidal) et le centre culturel de Kyōto Sakakura édifie le Tōkyō Kaikan à Tōkyō, l’hôtel de ville de Hajima, le centre civique de Uenno (Tōkyō), le musée d’Art moderne de Kamakura. Dans un esprit proche de Wright, Amano Tarō (Club de golf Shin-Hanayashiki, Ōsaka) accroche des toitures en terrasses de différents niveaux sur un terrain escarpé. Certains architectes renouvellent des formules traditionnelles : Ōtani Sachio (Palais des conférences à Kyōto) redécouvre dans les toitures de certains haniwa des structures contemporaines. Le groupe des « métabolistes » oriente ses recherches vers la création de villes suspendues. C’est dans cette direction que s’achemine Tange* Kenzō (né en 1913), figure dominante de l’architecture actuelle.


Peinture

Le papier, la soie, les pigments, les feuilles d’or ou d’argent du style japonais s’opposent à la peinture à l’huile du style occidental, comme s’opposent les sujets.

• Le style japonais. En 1876, le gouvernement Meiji invite plusieurs peintres italiens à venir professer la peinture à l’huile à la nouvelle école des beaux-arts de Tōkyō, incitant les artistes japonais à mêler les techniques occidentales (perspective, ombres et lumières) à l’esthétique traditionnelle. Okakura Tenshin (1862-1913), directeur de l’école, apparaît alors comme le chef de la réforme entreprise dans la peinture de style japonais. Autour de lui, un mouvement s’élabore, groupant des peintres tels que Yokoyama Taikan (1868-1958), Shimomura Kanzan (1872-1930), Hishida Shunsō (1874-1911), qui se réunissent pour fonder en 1898 un institut privé des beaux-arts.

De son côté, le style des lettrés (bunjin-ga), influencé par la peinture chinoise, retrouve une certaine vogue et prend une nouvelle ampleur grâce à Tomioka Tessai* (1836-1924). Enfin, sous le pinceau d’Uemura Shōen (1875-1949) et de Kaburagi Kiyokata (1878-1972), la tradition de l’ukiyo-e est maintenue, et le thème des bijin (« jolies femmes ») réinterprété.

Trois grandes expositions (Inten, Shinseisaku-ha, Nitten) comportent des sections présentant régulièrement les artistes travaillant dans le style japonais. Cet art s’oriente peu à peu vers l’abstraction avec Fukuda Heihachirō (né en 1892), Tokuoka Shinsen (né en 1896), Teshigawara Sōfū (né en 1900).

• Le style occidental. Après l’introduction de la peinture à l’huile et l’étude de ses possibilités, des tendances postimpressionnistes apparaissent à partir de 1910 (Yasui Sōtarō [1888-1955], Umehara Ryūzaburō [né en 1888]).

Puis le Japon voit se succéder des recherches similaires à celles de l’Occident : fauvisme, cubisme, expressionnisme, surréalisme, art non figuratif, sans parler des dernières avant-gardes. Des artistes s’expriment par l’art cinétique, tels Hatta Yutaka (né en 1930) et Noya Jirō (né en 1923) ; d’autres par le surréalisme (Koga Kikuo [né en 1934]) ou l’abstraction (Satō Tamotsu [né en 1919], etc.). Très significative est l’action du groupe Gutaï* d’Ōsaka. Parmi les nombreux artistes japonais ayant vécu ou vivant à l’étranger, il faut signaler Léonard Foujita (Fujita Tsuguharu [1886-1968]), Kuniyoshi Yasuo (1893-1953), Sugai Kumi (né en 1919), Tanaka Akira (né en 1918).

• La calligraphie. Alors que les courants traditionnel et néo-classique s’inspirent respectivement des styles chinois et japonais de l’époque Heian, le mouvement d’avant-garde se tourne vers l’abstraction pure.


Sculpture

La révélation de la sculpture occidentale, en 1876, incite de nombreux Japonais, tels Ogiwara Morie (1879-1910), Yamamoto Toyoichi (né en 1899), Takei Naoya (1893-1940), à venir travailler dans les ateliers français. La tradition du bois se retrouve dans les œuvres figuratives de Kinouchi Yoshi (né en 1892) ou de Satō Gengen (1888-1963), tandis que l’abstraction inspire les œuvres en matériaux divers de Teshigawara Sōfū, de Mizui Yasuo (né en 1925) et d’Aoki Hiroshi (né en 1933). L’art de la céramique donne également lieu à des créations dans le domaine de la plastique abstraite.

C. H.