Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

accélérateur de particules (suite)

Un autre avantage de ce nouveau type d’accélérateur est la très grande précision avec laquelle est définie l’énergie des particules accélérées, de l’ordre d’un dix-millième ; ainsi, pour les expériences n’utilisant que des raies d’électrons très bien définies en énergie, un accélérateur supraconducteur fournissant un courant moyen de 100 μA sera à comparer avec un accélérateur classique fournissant un courant moyen de 5 mA avec une dispersion en énergie de 1 p. 100 si l’on ne retient qu’une bande d’énergie de 2/10 000 par exemple.

Une autre utilisation des cavités HF supraconductrices est leur combinaison avec des structures magnétiques déflectrices dans des accélérateurs circulaires. L’intérêt réside moins dans le gain global de puissance que dans la facilité d’obtenir avec un grand cycle utile une accélération relativement grande à chaque passage dans des cavités assez courtes. L’introduction d’un accélérateur linéaire supraconducteur dans un microtron aide ainsi à atteindre en opération continue des énergies relativement élevées. On remarque que ces utilisations constituent des améliorations notables, mais ne changent pas radicalement les limites atteintes pour la course vers les très hautes énergies.

• Synchrotrons supraconducteurs. Les progrès accomplis dès maintenant dans la technologie des bobinages constitués de faisceaux de fils supraconducteurs très fins et pouvant fournir un champ magnétique de 6 teslas dans des volumes utiles comparables à ceux des chambres à vide des synchrotrons montrent qu’il est concevable de gagner substantiellement en niveau d’énergie par l’utilisation d’aimants supraconducteurs opérant à des températures de 4,2 à 4,5 K (hélium liquide). En fait, il est admis que les projets esquissés aujourd’hui pour des synchrotrons classiques à gradients alternés de 1 000 GeV pourraient, avec des aimants supraconducteurs, atteindre l’ordre de 5 000 GeV.

On conçoit cependant que, parvenus à 5 000 GeV, les constructeurs d’accélérateurs de 10 km de diamètre n’auront guère de perspectives dans cette voie.


Méthodes d’accélération collective

En 1956, à un symposium du Cern, V. I. Veksler a ouvert un nouveau champ d’études en présentant plusieurs procédés d’accélération fondés sur un nouveau principe : l’accélération cohérente. L’analyse de Veksler part de la constatation que tous les accélérateurs existants mettent en œuvre des champs électriques engendrés par une puissance source extérieure et qu’ainsi l’intensité de ce champ est, pour l’essentiel, indépendante du nombre de particules accélérées. De plus, ces accélérateurs ne peuvent agir que sur des particules chargées.

Le nouveau principe de Veksler envisage la production du champ électrique accélérateur par l’interaction d’un petit groupe de particules accélérées avec un autre groupe de charges, un plasma, ou même une onde électromagnétique. Ainsi l’intensité du champ accélérateur, agissant sur une particule donnée, est proportionnelle au nombre de particules accélérées. Trois autres propriétés sont à noter : la synchronisation est assurée automatiquement entre le champ accélérateur et le paquet de particules accélérées ; il est possible de ne créer des champs très intenses qu’aux points où sont localisées les particules et donc d’éviter les décharges dues aux électrons arrachés des parois de l’accélérateur ; enfin, l’accélération de paquets neutres de particules devient possible.

La nouvelle méthode a un caractère cohérent du fait même que l’action du champ sur une particule isolée est proportionnelle au nombre de particules d’un paquet. Parmi les méthodes d’accélération cohérente, certaines sont spécialement désignées comme méthodes d’accélération collective : ce sont celles où le champ accélérateur est créé par un paquet de charges distinct du groupe des particules accélérées ; il est proportionnel au nombre de charges dans ce paquet ; ainsi, le nombre de particules accélérées est arbitraire.

C’est en 1967 qu’ont été annoncés les progrès accomplis par une équipe de Doubna (U. R. S. S.) pour la mise au point d’un accélérateur linéaire collectif à ions. Le principe en est le suivant : à l’intérieur d’un paquet très dense d’électrons, il y a un puits de potentiel dans lequel on peut emprisonner des ions positifs, des protons par exemple, mais aussi des ions lourds ; en accélérant le paquet d’électrons, on communique la même vitesse aux ions, ce qui entraîne un gain d’énergie qui peut atteindre, si la proportion des ions relativement aux électrons est faible, une valeur égale au rapport de la masse au repos de l’ion accéléré à la masse de l’électron. Ainsi, en accélérant le paquet d’électrons à 1 MeV, on pourrait obtenir des protons d’énergie de 1,84 GeV.

Pour assurer la cohésion du paquet dense d’électrons, celui-ci est constitué, selon une idée de G. I. Budker, sous l’action d’un puissant champ magnétique, par un anneau d’électrons en mouvement circulaire ; le paquet est en fait un volume toroïdal de charges, engendré par un « effet bêtatron » et dont le rayon de la fibre moyenne est réduit, donc la densité augmentée, par une augmentation progressive du champ magnétique « compresseur ».

Depuis 1967, les travaux se sont poursuivis essentiellement à Doubna et à Berkeley. Ils n’ont été possibles que grâce à l’existence d’accélérateurs d’électrons de très forte intensité (plusieurs centaines d’ampères d’intensité crête), capables de fournir aux environs de 1 MeV, le faisceau initial contenant de l’ordre de 1013 à 1014 électrons pour former l’anneau.

En 1969, l’accélération d’ions d’azote, trois fois chargés, a produit dans une cible de cérium une radio-activité caractéristique d’une réaction nucléaire dont le seuil est de 60 MeV ; on avait communiqué aux noyaux d’azote une énergie de l’ordre de 4 MeV par nucléon, cela avec un champ électrique local de 800 kV/cm.

Les perspectives semblent donc prometteuses dans deux directions :
— possibilité d’obtenir des ions lourds accélérés jusqu’à 10 MeV par nucléon, avec des intensités de 1014 ions par seconde, dans des accélérateurs très courts ;
— course vers les très hautes énergies, par exemple en accélérant l’anneau dans un accélérateur linéaire supraconducteur : on peut songer à des protons recevant 100 GeV/m.