Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hominiens (suite)

Les « Négroïdes » de Grimaldi. Les deux squelettes connus sous le nom de « Négroïdes » de Grimaldi ont été trouvés dans la grotte des Enfants, qui renfermait à des niveaux supérieurs d’autres squelettes de Cromagniens. Ces deux squelettes appartiennent à une femme d’une quarantaine d’années et à un enfant de treize ans. Le crâne possède des caractères rappelant les deux types de Combe-Capelle et de Cro-Magnon. Le nez large, le prognathisme, l’allongement des extrémités distales des membres constituaient les caractères qui avaient permis une assimilation à la grande race noire. Ces Négroïdes de Grimaldi correspondent à l’industrie aurignacienne typique. Ils proviennent peut-être d’un métissage entre les Hommes de Combe-Capelle et de Cro-Magnon.

L’Homme de Chancelade. Le squelette d’un homme âgé fut découvert (1888) dans un abri-sous-roche à Chancelade (Dordogne) ; une industrie magdalénienne l’accompagnait.

L’ensemble des caractères de ce squelette présente des affinités nettes avec le type de Combe-Capelle : stature moyenne, proportions des membres (allongement des extrémités distales), forme du crâne (ovoïde, voûte élevée), région occipitale arrondie, pariétaux parallèles, aspect facial (orbite moyenne, forme de l’ouverture nasale). Le nez étroit et saillant, un petit « chignon » appartiennent aux caractères cromagniens.

Ce type semble fréquent au Magdalénien et se retrouve dans divers gisements : Sorde-l’Abbaye, Bruniquel (1863-64), Le Roc, Cap Blanc (1911). Une fouille effectuée en 1959 dans l’abri Pataud distant de quelques centaines de mètres du gisement de Cro-Magnon a mis au jour les restes de cinq squelettes, dont un de jeune femme ; ils présentent encore quelques traits néandertaliens, mais les ressemblances avec le Cromagnien sont plus manifestes : stature assez élevée, crâne pentagonoïde, front vertical, arcades sourcilières fortes, chignon occipital, face large et basse.

Répartition des Néanthropiens. La France étant exclue, les principaux gisements sont les suivants.
— Tchécoslovaquie : Brno (1872-1917), trois crânes rappelant plutôt Combe-Capelle ; Předmost (1880-1928), restes de vingt-sept individus présentant de nombreux caractères des Cromagniens, quelques traits de Combe-Capelle et des Néandertaliens.
— Allemagne : à Oberkassel, près de Bonn, deux squelettes, découverts en 1914, sont très proches de l’Homme de Chancelade.
— Asie : la région supérieure de la grotte de Zhoukoudian (Tcheou-k’eou-tien) a fourni les restes de plusieurs individus, et notamment trois crânes (un homme et deux femmes) ; ils présentent des caractères du Sinanthrope et des ressemblances avec les Hommes de Cro-Magnon et d’Oberkassel ; la face aplatie annonce les Mongols actuels. Les crânes provenant de deux autres stations de Chine, Ziyang (Tseu-yang) et Liujiang (Lieou-kiang), ressemblent aux précédents.
— Java : les crânes humains de Wadjack (est de Java) et ceux de Niah (Sarawak) sont généralement considérés comme des protoaustraloïdes.
— Afrique : les restes assez abondants de l’Homo sapiens sapiens sont d’âge plus récent (fin du Paléolithique supérieur et Mésolithique) et rappellent les types européens. Plus tardivement, au Mésonéolithique, apparaissent des êtres ayant des affinités avec les Négroïdes : squelette d’Asselar (nord de la boucle du Niger).
— Amérique : dans l’île de Santa Rosa, au large de la Californie, des os brûlés de Mammouths ont été découverts ; ils dateraient de 30 000 ans et correspondent à la plus ancienne manifestation humaine.

Industrie. Les Néanthropiens vivaient dans les grottes, les abris-sous-roche afin de se protéger du froid. Ils s’éclairaient avec des lampes de pierre renfermant des graisses animales. Ils étaient de grands chasseurs ; Rennes, Chevaux, Bisons constituaient les principaux gibiers. Ils pêchaient également dans les rivières.

Les industries sont nombreuses, variées et bien adaptées à leur utilisation. Trois types principaux d’industries ont été reconnus et caractérisent l’Aurignaco-Périgordien (35000 à 18000 av. J.-C.), le Solutréen (18000 à 15000 av. J.-C.) et le Magdalénien (15000 à 9500 av. J.-C.). À la pierre succèdent d’autres matériaux, os, corne, ivoire. Les outils comprennent des grattoirs, perçoirs, couteaux, burins, poinçons, sagaies plus ou moins compliquées, bâtons de commandement, propulseurs, harpons, aiguilles à chas, pièges de types variés. Du Magdalénien datent les outils les mieux décorés. L’art se développe dès l’Aurignacien et prend son essor au Magdalénien ; des artistes animaliers gravaient sur os, galets, argile, sur les parois des grottes, qui se couvraient aussi de peintures aux ocres rouges, jaunes et noires. Les sculptures qui décorent les propulseurs, les célèbres peintures des grottes de Lascaux, de Niaux, d’Altamira sont l’œuvre d’artistes éprouvés. On peut dès lors parler d’« écoles d’art ». Les Néanthropiens pratiquent des rites funéraires ; des ensevelissements sont intentionnels ; des objets variés, des parures (colliers, bracelets, peignes) accompagnent les morts, qui sont souvent colorés par de l’ocre. Les cultes de l’Ours, du Renne semblaient exister, les restes de ces animaux donnant lieu à des pratiques rituelles.

Les Néanthropiens manifestent donc un psychisme bien supérieur à celui des Paléanthropiens et des Archanthropiens.

Qu’est-ce qu’un Homme ?

Il y a cent ans, l’isolement zoologique de l’Homme au sein du règne animal était suffisant pour que l’on ait pu définir l’espèce humaine par des caractères purement anatomiques. Aujourd’hui, la profusion des découvertes d’ossements d’origine hominienne est telle qu’il est devenu impossible de délimiter l’« Homme » sur la base d’un caractère ostéologique précis. Il est plus raisonnable de définir l’Homme par l’une de ses activités propres : non pas la taille des outils, dont le caractère intentionnel peut être mis en doute dans les niveaux inférieurs de la pebble culture, mais plutôt l’entretien du feu, qui laisse des traces incontestables et a le mérite du « tout ou rien » ; tel Hominien a su garder le feu, tel autre non. C’est à peu près le fondement de l’incorporation d’une espèce dans le genre Homo. En tout cas, la célèbre définition de Linné ne convient plus : Animal rationale, loquens, erectum, bimane. On connaît maintenant des Hominiens redressés et ayant des mains, mais qui n’étaient pas des Hommes, et il est tout à fait impossible de savoir s’ils avaient ou non le langage verbal et la raison.

H. F.

A. T.

➙ Paléolithique / Paléontologie / Préhistoire.