Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Empire (style du second) (suite)

Une autre évolution se dessine : c’est l’intervention de la machine dans la fabrication du meuble. Les premiers équipements mécaniques des ateliers peuvent être datés de 1855. Les manufacturiers français avaient découvert les machines à bois à l’Exposition de Londres en 1851 ; ils suivirent l’exemple britannique : « Les Anglais nous mènent vers l’utile », note Michel Chevalier dans son rapport. Mais il eût fallu concevoir un style qui tînt compte de l’implacable impersonnalité de l’exécution mécanique. En fait, l’industrie reproduisit à la machine des ouvrages qui n’ont de prix que par le travail manuel.

Artistes et critiques déploraient l’inexistence d’un style « moderne ». On essaya de le susciter. En 1863, sous la présidence de l’architecte Guichard, se constituait à Paris la société qui, devenue l’Union centrale des arts décoratifs, allait créer un enseignement du dessin, fonder un musée, multiplier les expositions. En 1869, elle ouvrait un congrès international que présida le peintre Jacques Louvrier de Lajolais (1829-1908), à qui sera confié, en 1877, le directorat de la nouvelle École nationale des arts décoratifs. La première manifestation de l’Union, en 1863, n’en avait pas moins déçu. « L’art, écrivait Guichard, est trop souvent dirigé par la mode aveugle, par l’amour du faux luxe et, d’un autre côté, par la nécessité de vendre, qui entraîne et violente le fabricant. » Dans les revues d’art qui se créent — autre novation —, la critique exhorte les artistes à rejeter le pastiche. L’un des animateurs du mouvement « moderne », le maître ébéniste Henri Fourdinois (né en 1830 et actif jusqu’en 1887), va jusqu’à frapper d’interdit, dans les expositions, toute inspiration venue de l’« ancien ». Il rejoint ainsi les esthéticiens anglais, John Ruskin, Walter Crane, William Morris. Mais Fourdinois lui-même ne peut s’affranchir des obsessions du passé : ses meubles, d’une parfaite exécution, relèvent du même esprit dont sont animés les devanciers, les Chenavard et les Denière. L’écroulement du régime impérial allait délivrer la production officielle d’une exemplarité qui se répercutait sur l’ameublement courant. C’est au lendemain de sa chute qu’on verra, dans les arts qui ne relèvent pas par nature du sentiment personnel, se manifester les recherches d’un style aux intentions rationalistes.

G. J.

➙ Décoratifs modernes (arts) / Éclectisme / Réalisme.

 H. Clouzot, Des Tuileries à Saint-Cloud, l’art décoratif du second Empire (Payot, 1925) ; le Style Louis-Philippe - Napoléon III (Larousse, 1939). / C. Kunstler, l’Art au xixe siècle, époques Restauration, Romantique, Napoléon III, 1815-1870 (Le Prat, 1954). / P. Jullian, le Style second Empire (Baschet, 1976).

Empire britannique

Expression qui désigna jusqu’en 1931 l’ensemble des territoires reconnaissant la souveraineté de la Couronne britannique.


L’Angleterre médiévale est dans l’ensemble un pays terrien : la part la plus grande et la plus profitable de son commerce est longtemps restée l’apanage des marchands allemands (Hanséates) ou italiens. Toutefois, au cours du xve s., une évolution importante se dessine : tandis que la xénophobie se développe, tout un secteur du commerce, celui de la draperie, dont la production est en plein essor, favorise l’ascension d’une catégorie nouvelle de marchands, les « Merchant Adventurers », qui, sans s’abriter derrière des monopoles comme leurs prédécesseurs (et c’est en cela seulement qu’ils sont des « aventuriers » !), entreprennent de découvrir de nouveaux marchés, en essayant surtout de concurrencer les Hanséates dans l’Europe du Nord : grâce à eux, Bristol connaît une grande prospérité. Au même moment, un traité politique, le Libelle of English Policie, exalte l’avenir maritime de l’Angleterre : décidément, au xve s., l’Angleterre a découvert qu’elle était une île. L’ère des grandes découvertes est aussi celle de l’affermissement national de l’Angleterre sous la monarchie des Tudors : il n’empêche que — comme la France — l’Angleterre est entrée en lice un peu tard, alors que l’Espagne et le Portugal se sont déjà partagé le monde. Avant d’aborder l’histoire de l’Empire et de la colonisation britanniques, il faut voir comment l’Angleterre a su s’ouvrir les mers.


L’ouverture des mers

• 1496 : Jean Cabot (v. 1450 - v. 1499), un Génois qui après un passage à Venise s’est fixé à Bristol, obtient d’Henri VII une patente pour partir en exploration.

• 1497-98 : Jean Cabot fait deux voyages. Au cours du premier, il découvre Terre-Neuve. Mais, au cours du second, il s’aperçoit en longeant les côtes du continent nord-américain que ce n’est pas la Chine, but de ses voyages, qu’il a découverte.

• 1501-1505 : tous les ans, les marins de Bristol partent au loin, mais leurs voyages n’ont aucun résultat.

• 1527 : à partir de cette date (voyage de John Rut au Labrador et aux Antilles espagnoles), les explorations recommencent. Ce qui est beaucoup plus important, c’est que le roi Henri VIII dote le pays d’une marine de guerre de premier ordre et surtout d’une administration maritime remarquable, qui est très en avance sur tout ce qui existe ailleurs.

• 1553 : John Dudley, duc de Northumberland, supprime les privilèges que possédait la Hanse* en Angleterre. Certes, cette suppression ne sera pas définitive, mais il est significatif que l’Angleterre aspire à être seule maîtresse de son commerce.


Le règne décisif d’Élisabeth Ire

Sous Élisabeth Ire, les Anglais vont aller de l’avant. À la recherche du passage du Nord-Est, dans un premier temps, les Anglais essaient de contourner les eaux espagnoles et portugaises en cherchant à passer en Chine par l’Arctique, en longeant les côtes nord de la Russie.