Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

domestication (suite)

Remonter aux premières époques de la domestication paraît bien difficile. Il faut pour cela des documents ; or, ils ne sont pas nombreux. Cependant, au Paléolithique, l’Homme a vu des animaux évoluer autour de lui et il a dessiné ceux qui lui étaient les plus familiers. Il nous a montré des Rennes, des Chevaux, des Bovidés. Dans certaines grottes d’Espagne, dans la province de Valence, on a trouvé une magnifique gravure rupestre représentant un Homme grimpant à un arbre pour aller chercher un essaim d’Abeilles !


Le Chien

Le Chien* avait été tout d’abord apprivoisé de bonne heure. Mais on n’en trouve des traces qu’au Néolithique, dans les restes de campements de peuplades en provenance de Russie orientale, émigrées vers la Scandinavie. Cependant, les plus belles découvertes ont été faites en Suisse dans les palafittes. Tous les vestiges tombés dans la vase des lacs y ont été conservés d’une façon parfaite, et on a la preuve irréfutable que le Chien était étroitement mêlé à la vie de l’Homme. Pour L. Rütimeyer (1825-1895), qui l’a étudié et décrit vers 1860, il descendrait d’un animal qu’il a appelé Chien des tourbières. Pour d’autres auteurs, il descendrait d’un Chacal (Canis aureus), tandis que le professeur E. L. Trouessart (1842-1927) affirme qu’il aurait comme ancêtre un Chien indien : Canis pallipes. Pour T. Studer, qui s’est aussi penché sur cette question, ce Chien du Néolithique proviendrait d’une autre souche de Canidés en provenance d’Asie et des régions d’Afrique au voisinage de l’Asie Mineure : le Chien Pariah, Chien que l’on trouve d’ailleurs encore aujourd’hui dans ces mêmes contrées.


Le Cheval et l’Âne

Pour le Cheval, il est difficile de savoir comment les Hommes de la préhistoire ont eu l’idée de le dompter d’abord, de le monter, de l’atteler, puis de le faire reproduire en captivité. Il est probable qu’il y a plusieurs dizaines de milliers d’années les Hommes du Paléolithique supérieur, en voyant les troupeaux de Chevaux sauvages évoluer dans les steppes, ont vite compris que c’était là une excellente réserve alimentaire. Leur instinct de chasseur les poussa d’abord à les tuer pour se nourrir, mais ils comprirent qu’il valait mieux les utiliser autrement. On a, en effet, retrouvé un licol sommaire, mais indiscutable, dans un site vieux d’au moins 10 000 ans. Sans l’Homme, le Cheval aurait complètement disparu. Le dernier troupeau d’un des ancêtres de nos Chevaux, le Cheval de Prjevalski, erre encore dans les steppes de l’Asie centrale. Il ne compte plus qu’une dizaine de têtes. C’est un animal de petite taille, de robe isabelle, à crinière en brosse et de courte encolure.

Une autre souche de nos chevaux domestiques se retrouverait dans le Tarpan, Cheval sauvage qui est soigneusement conservé en Pologne. Il aurait donné des descendants en Europe centrale et en Europe occidentale.

C’est dans les vestiges de la civilisation de l’âge du bronze que l’on trouve des preuves matérielles de la domestication du Cheval. Celui-ci est dès cette époque en plein développement, car on a découvert des ossements de plusieurs races différentes. La pratique de l’élevage était donc parfaitement au point et connue depuis longtemps.

Très voisin du Cheval, un autre Équidé, l’Âne, a été domestiqué beaucoup plus tardivement. Originaire d’Asie Mineure, il vit dans des plaines arides ; il est frugal et particulièrement résistant. Il a la corne dure et le pied sûr pour marcher dans les pays désertiques au sol caillouteux. Ce sont probablement les Égyptiens qui ont domestiqué l’Âne de Nubie, qui, plus tard, s’est répandu dans tous les pays chauds et secs.


Ruminants et Porcins

Le Bœuf, animal domestique par excellence, a une origine obscure. On pense généralement qu’il dériverait de l’Aurochs (Bos primigenius), grand Bovidé sauvage qui peuplait l’Europe centrale et la Gaule, et dont l’espèce a disparu au xviie s. après avoir été chassée à outrance.

C’est le Buffle indien qui, en Asie, a été domestiqué. Il a fort bien réussi et s’est répandu à l’état domestique depuis l’Europe jusqu’aux Philippines. C’est un excellent animal, capable de bien travailler dans les régions chaudes et humides. Il rend des services considérables, notamment pour la mise en culture des rizières chez les peuples orientaux.

Moutons et Chèvres ont, eux aussi, une origine plutôt obscure. On a bien retrouvé des ossements de Moutons dans les palaffites, mais leurs ancêtres et la date de leur domestication sont bien difficiles à préciser.

Les Chèvres paraissent provenir d’une forme sauvage bien connue, la Chèvre ægagre (Capra hircus ægagrus), dont l’aire de répartition comprend les îles grecques, depuis la Crète, l’Asie Mineure, la Perse, l’Afghānistān. Mais il n’est pas impossible que cette Chèvre ait d’autres ancêtres.

Les Rennes, animaux des régions polaires eurasiatiques et américaines, vers 600 av. J.-C., étaient déjà utilisés par l’Homme pour les transports rapides, la production du lait et de la viande. Tous les sous-produits de cet animal, et ils sont nombreux, ont été utilisés par les Toungouses, les Tchouktches, les Vogoules, les Samoyèdes et les Lapons, ce qui leur a permis de se maintenir dans le Grand Nord.

À l’époque préhistorique, le Chameau (à double bosse) fut domestiqué en Bactriane (Afghānistān actuel), où régnait une brillante civilisation. Cet animal fut, dès l’origine, utilisé à plusieurs fins : transport, viande, laine et lait. Cette multiplicité des services rendus le fit rapidement adopter dans presque toute l’Asie.

Le Dromadaire (à bosse unique), aussi utile que le Chameau et provenant d’Asie Mineure, s’imposa dans tous les pays désertiques africains. Mais il semble que ce ne soit qu’au début du Moyen Empire que les Égyptiens l’utilisèrent d’une façon toute rationnelle. Ces deux animaux, le Dromadaire tout au moins, n’existent plus à l’état sauvage.

Un autre Camélidé voisin, le Lama, originaire des hauts plateaux sud-américains, a été domestiqué depuis fort longtemps. Au temps des civilisations précolombiennes, il rendait des services extraordinaires. Il était employé pour le portage ; une autre espèce, l’Alpaca, est utilisée pour sa laine, qui est d’une grande finesse et qui permet d’obtenir des tissus légers et chauds.

Le Porc, domestiqué de très bonne heure, dériverait probablement d’un petit Suidé asiatique, Sus vittatus, qui ressemble assez à nos Cochons domestiques actuels et qui est plus sociable que nos Sangliers et plus facile à apprivoiser.