Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Claude (suite)

Claude est un prince habile, dont la politique tendra tout entière à accentuer la mainmise impériale sur l’État. Il renforce les rouages administratifs, encore rudimentaires ; dans ce dessein, il se sert de son entourage immédiat, de sa « maison » ; les chefs de ce personnel, tous des affranchis, se partagent la direction des services les plus importants (finances impériales, correspondance officielle, requêtes et archives). Narcisse et Pallas sont les plus actifs et les meilleurs de ces auxiliaires. Cette systématisation du rôle des affranchis permet une forte centralisation du pouvoir au détriment des anciens magistrats républicains. Hors de l’Italie, dans les provinces récemment conquises, les décisions impériales sont mieux respectées grâce à la place prépondérante donnée aux procurateurs de rang équestre, qui deviennent même gouverneurs de certaines petites provinces.

Désormais, tout converge vers l’empereur ; les gouverneurs des provinces sénatoriales voient leurs pouvoirs financiers limités ; le contrôle de la vieille caisse de l’aerarium échappe au sénat ; les villes provinciales perdent le droit de battre monnaie. En tant que censeur, Claude révise la liste des sénateurs et crée des patriciens. Son attention se porte très tôt sur le sort des provinciaux ; il mesure toute l’importance de leur rôle dans la continuité de la puissance romaine ; partout il cherche à élargir la cité romaine, à faciliter l’accès à l’ordre sénatorial et à l’ordre équestre. Le droit de cité est largement accordé aux élites locales ; l’épisode le plus caractéristique de cette politique nous est fourni par une table de bronze découverte à Lyon, la « Table claudienne », où est inscrit le discours que Claude prononça devant le sénat, durant l’année 48, pour proposer que les Gaulois citoyens romains, mais encore intégrés à des communautés indigènes, puissent accéder aux plus hautes charges de la cité et, par là même, au sénat. Acte courageux et habile : courageux, parce qu’il fallait surmonter les réticences des sénateurs ; habile, parce qu’il renforçait le loyalisme des élites provinciales à l’égard de Rome.

L’empereur ne reste pas inactif dans le domaine extérieur. S’il témoigne d’une grande prudence sur le Rhin, il se montre conquérant en Bretagne (la Grande-Bretagne actuelle), contrée qui est restée le foyer d’un druidisme dangereux pour la paix dans les Gaules. Il prend lui-même la direction des troupes, qui n’ont que peu de mal pour conquérir le sud-est de l’île (43), désormais réduite en province impériale de Bretagne ; peu à peu, le territoire contrôlé par les Romains progresse vers le nord et l’ouest. En Afrique, Claude transforme le royaume mauritanien de Ptolémée (assassiné en 40 sur l’ordre de Caligula) en deux provinces procuratoriennes, la Mauritanie Césarienne et la Mauritanie Tingitane (42). En Orient, Rome prend le contrôle direct de la Judée et de la Lycie, tout en tentant d’intervenir dans les affaires intérieures du royaume parthe.

Suivant une tendance déjà affirmée par ses prédécesseurs, l’empereur s’occupe très activement des grandes entreprises publiques. Le problème du ravitaillement de Rome n’avait jamais été pleinement résolu ; dès 42, la construction d’un nouveau port à Ostie est commencée ; deux nouveaux aqueducs apportent à Rome l’eau dont elle a besoin. L’Italie n’est pas négligée avec l’assèchement du lac Fucin et l’amélioration des routes existantes.

Claude ne peut terminer naturellement son règne : le problème de sa succession va pousser au meurtre sa dernière épouse, Agrippine. L’empereur a, en effet, été obligé de se débarrasser (48) de sa troisième femme, Messaline, objet de réprobation par sa vie de débauche et ses adultères répétés. Au début de 49, il a épousé Agrippine, sa propre nièce, déjà veuve deux fois et qui a un fils, Lucius Domitius, pour qui elle caresse un rêve : faire de lui un empereur aux dépens du fils de Claude, Britannicus.

Agrippine réussit d’abord à faire adopter Domitius (qui prend alors le nom de Néron) par l’empereur et à lui faire épouser Octavie, fille de Claude. Tout, désormais, destine Néron à l’Empire ; mais Narcisse tente de faire revenir Claude sur son choix ; il y réussit sans doute, puisque, de peur de voir ses calculs déjoués, Agrippine n’hésite pas à employer les services de l’empoisonneuse Locuste pour se débarrasser de Claude (oct. 54) et à faire tenir secret son testament, qui, très probablement, destinait Britannicus au pouvoir.

J.-P. M.

 A. Momigliano, L’Opera dell’imperatore Claudio (Florence, 1932). / R. Graves, I, Claudius (Londres, 1934 ; trad. fr. Moi, Claude, Gallimard, 1964).

Claudel (Paul)

Écrivain français (Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868 - Paris 1955).



Les errances

Paul Louis Charles Claudel est né le 6 août 1868 dans une petite commune du Tardenois, dont son grand-oncle était curé. Son père, Louis Prosper Claudel, était originaire de La Bresse, dans les Vosges. Il avait été nommé en 1860 receveur de l’enregistrement à Villeneuve et y avait épousé en 1862 Louise Cerveaux, elle-même née à Villeneuve, où son père, Athanase Cerveaux, était médecin. Les Cerveaux sont tous originaires du Tardenois ou du Soissonnais. En août 1870, Louis Prosper Claudel est nommé à Bar-le-Duc, et, l’année suivante, Paul Claudel entre à l’école des sœurs de la Doctrine chrétienne de cette ville. En 1875, il sera élève du lycée de Bar-le-Duc. En 1876, Louis Prosper Claudel est nommé conservateur des hypothèques à Nogent-sur-Seine. Paul y poursuit ses études sous la direction d’un précepteur nommé Colin. En 1879, son père ayant été nommé à Wassy-sur-Blaise, il entre au collège de cette ville. C’est là qu’il fait en 1880 sa première communion, « qui fut à la fois, écrit-il, le couronnement et le terme de mes pratiques religieuses ». En 1881, il assiste à l’agonie et à la mort très douloureuses de son grand-père Athanase Cerveaux. En 1882, la famille s’installe à Paris, boulevard du Montparnasse. La sœur de Paul, Camille, son aînée, est l’élève de Rodin.