Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bartók (Béla) (suite)

À l’écart des grands centres musicaux de son époque (Paris, Vienne, Berlin), Bartók a choisi la voie d’une indépendance farouche et hautaine. Si elle lui a été fatale de son vivant, cette liberté lui a assuré l’admiration reconnaissante de tous les jeunes musiciens d’après 1945, soucieux d’échapper tant à la tyrannie néo-classique qu’au carcan sériel, et qui trouvèrent en lui un phare, un guide, et la plus pure caution spirituelle. Depuis lors, la musique a vu s’ouvrir d’autres perspectives, mais la perfection de cristal de l’œuvre bartokienne s’impose au-dessus des modes et des esthétiques.

Catalogue succinct des œuvres

Piano : 14 bagatelles, op. 6 (1908) ; 4 Nénies (1910) ; Allegro barbaro (1911) ; Suite, op. 14 (1916) ; 3 études, op. 18 (1918) ; improvisations, op. 20 (1920) ; sonate (1926) ; En plein air (1926) ; Mikrokosmos (1926-1937) ; sonate pour 2 pianos et percussion (1937).

Musique de chambre : 6 quatuors à cordes ; no 1 en la, op. 7 (1908) ; no 2 en la, op. 17 (1915-1917) ; no 3 en ut dièse (1927) ; no 4 en ut (1928) ; no 5 en si bémol (1934) ; no 6 en (1939) ; 2 sonates pour violon et piano (1921 ; 1922) ; sonate pour violon seul (1944) ; 44 duos pour 2 violons (1931) ; Contrastes pour violon, clarinette et piano (1938).

Orchestre : 3 concertos pour piano ; no 1 en mi (1926) ; no 2 en sol (1930-31) ; no 3 en mi (1945) ; 2 concertos pour violon ; no 1, posthume (1907-08) ; no 2 en si (1937-38) ; concerto pour alto (1945) ; 2e Suite pour orchestre, op. 4 (1905-1907) ; 2 portraits, op. 5 (1907-08) ; 2 images, op. 10 (1910) ; 4 pièces, op. 12 (1912-13) ; Suite de danses (1923) ; Musique pour cordes, célesta et percussion, en la (1936) ; Divertimento pour cordes, en fa (1939) ; concerto pour orchestre, en fa (1943).

Œuvres scéniques : le Château de Barbe-Bleue, opéra (1911) ; le Prince de bois, ballet (1914-1916) ; le Mandarin merveilleux, ballet-pantomime (1918-19).

Musique vocale : mélodies (1915-16) ; Cantata profana (1930).

H. H.

 E. Haraszti, Béla Bartók. His Life and Works (trad. du hongrois, Lyrebird Press, 1938). / D. Dille, Béla Bartók (Bruxelles, 1947). / H. Stevens, The life and Music of Béla Bartók (Londres, 1953 ; nouv. éd., 1965). / S. Moreux, Béla Bartók (Richard Masse, 1955). / Numéro spécial de la Revue musicale, Béla Bartók, l’homme et l’œuvre (Richard Masse, 1955). / J. W. Downey, la Musique populaire dans l’œuvre de Bartók (2 vol.) ; les Idées de Béla Bartók sur le folklore (thèses, Paris, 1957 ; C. D. U., 1966). / B. Szabolcsi (sous la dir. de), Béla Bartók, Weg und Werk, Schriften und Briefe (Budapest, 1957). / P. Citron, Bartók (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1963). / P. Marette, Bartók (Hachette, 1970).

Repères biographiques

1881

25 mars. Naissance à Nagyszentmiklós, petit village de l’est de la Hongrie, aujourd’hui roumain.

1894-1903

Études à Pozsony (l’actuelle Bratislava) de 1894 à 1899, puis au conservatoire de Budapest jusqu’en 1903.

1904

Création de sa première œuvre orchestrale, le poème symphonique patriotique Kossuth, à Manchester, sous la direction de Hans Richter.

1905

Rencontre de Kodály, découverte du folklore et premier séjour à Paris.

1907

Nomination au conservatoire de Budapest comme professeur de piano (il se refusera toujours à enseigner la composition).

1908

Rencontre de Debussy à Paris, suivant de peu la découverte de sa musique (1908).

1909

Premier mariage.

1913

Prospections folkloriques dans le Sud algérien.

1917-1918

Premières consécrations comme compositeur avec les créations à la scène du ballet le Prince de bois (1917) et de l’opéra le Château de Barbe-Bleue (1918), tous deux à Budapest.

1923

Second mariage.

1926

Création du ballet le Mandarin merveilleux, à Cologne.

1927-1928

Prix Coolidge remporté pour son 3e quatuor, et suivi d’une tournée aux États-Unis.

1939

Mort de sa mère, passionnément aimée, et dernier séjour en Hongrie.

1940

Exil aux États-Unis pour fuir la tyrannie nazie, insupportable à ce démocrate fervent.

1945

26 sept. Mort à New York.

Barye (Antoine Louis)

Sculpteur français (Paris 1795 - id. 1875).


Fils d’un orfèvre, il entre en apprentissage chez un graveur sur acier. À partir de 1816, il devient l’élève du sculpteur François Joseph Bosio et du peintre Gros* : son séjour dans l’atelier de ce dernier lui découvre le pouvoir de la tradition académique, transformée par le modernisme, l’énergie et la couleur. Après plusieurs échecs au concours de Rome, Barye entre en 1823 chez l’orfèvre Jacques Henri Fauconnier, où, par l’exécution de petits modèles décoratifs et par de longues séances de travail au jardin des Plantes, il se confirme dans sa vocation d’animalier. Le succès vient, foudroyant, avec le Salon de 1831 et surtout celui de 1833 (Lion écrasant un serpent, musée du Louvre). Pourtant l’animosité du jury (refusé au Salon de 1837, il s’abstient d’exposer jusqu’en 1850) et de trop rares commandes officielles le contraindront, pour vivre, à une spécialisation qui ne le satisfait pas entièrement et à l’exécution de petits formats. Au risque de plusieurs faillites, il essaie de conserver à ses productions leur qualité en surveillant ses fontes avec un soin d’orfèvre et en créant sa propre maison d’édition. Les honneurs ne lui viendront que tardivement : il entre à l’Académie en 1868.

Si « le lion exposé en 1833 suscita un cri général d’étonnement et bientôt de colère parmi les partisans de la sculpture académique » (Gustave Planche), c’est que Barye osait privilégier l’animal, représenté seul en grandeur nature, avec une vérité sans précédent. Ce réalisme qui surprenait tant est scientifique autant que psychologique. Barye s’inscrit dans la lignée des naturalistes du début du siècle, de Lamarck à Cuvier. Il étudie des écorchés, prend des mensurations, et l’on a gardé de nombreux dessins qui constituent ses archives du squelette et de la musculature animale. Mais surtout il a l’intuition de la vie des animaux sauvages, de la cruauté inhérente à la survie des espèces. Barye, sans avoir voyagé, et n’ayant vu ces animaux qu’en cage, sait les représenter en action, le plus souvent dans des combats, et fait entrer la vie animale dans les rêves du siècle.