Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
Y

Yuan Che-k’ai (suite)

Difficile à cerner, le personnage de Yuan Shikai reflète une ambition dévorante doublée d’un sens politique aigu où domine l’art du compromis. Au-delà, l’épisode Yuan Shikai marque la fin d’une époque et d’une conception suivant laquelle le « modernisme » se limite à l’imitation des méthodes employées en Occident. Yuan Shikai, représentant de l’aristocratie traditionnelle, ne s’est écarté du régime impérial que pour tenter d’y revenir. Son échec final annonce déjà la réussite de la révolution à venir.

C. H.

➙ Chine.

Yun-nan

En pinyin Yunnan, province de la Chine ; 436 200 km2 ; 23 millions d’habitants. Capit. Kunming (K’ouen-ming).


Le nom de la province signifie « au sud des nuages », c’est-à-dire au sud des nuages du Sichuan (Sseu-tch’ouan) en hiver, le Yunnan étant alors ensoleillé.

La densité moyenne est relativement faible, guère supérieure à 50 habitants au kilomètre carré. La population n’est d’ailleurs que pour moins de la moitié « han » (de langue chinoise) ; le Yunnan est la province qui comporte la plus grande proportion de minorités non han. Ces minorités sont extraordinairement variées, sur les plans ethnique, linguistique, religieux et du point de vue des stades de civilisation. La sinisation est très tardive ; elle s’amorce au xiiie s. sous Kūbīlāy khān et se poursuit sous la dynastie des Ming.

Le Yunnan est la plus montagneuse des provinces chinoises (6 à 7 p. 100 seulement des terres sont cultivées). Le « plateau » du Yunnan, à l’est, domine nettement le Guizhou (Kouei-tcheou) et le Guangxi (Kouang-si), la dénivellation pouvant atteindre 1 000 m. À l’ouest, le Yunnan est une très haute montagne dont les points culminants dépassent 6 000 m à la frontière birmane et qui est caractérisée surtout par de très profondes vallées méridiennes et parallèles, celles de la Salouen et du Mékong. Le Yunnan occidental est une chaîne de montagnes jeunes mises en place, pour l’essentiel, par l’orogenèse himalayenne et qui prolongent les Alpes du Sichuan et les chaînes orientales du Tibet. Elles sont d’orientation nord-sud : Nushan (Nou-chan), Yunling (Yun-ling). Wuliangshan (Wou-leang-chan). Elles sont séparées par des vallées très profondes ; il y a souvent plus de 2 000 m entre les fonds de vallées et les sommets : la vallée du Mékong est à 300-500 m, à la frontière de la Birmanie et du Laos, entre des pics qui ici se tiennent au-dessus de 2 500 m. La Salouen, le Mékong et, au nord, le haut Yangzijiang (Yang-tseu-kiang) coulent grossièrement parallèles ; tous ces fleuves sont très chargés en alluvions. Ces vallées très encaissées ont, du moins en aval, le climat le plus typiquement tropical de toute la Chine (avec l’île de Hainan [Hai-nan]), un climat chaud et humide, à abondantes pluies d’été apportées par la mousson ; de ce fait, elles sont fortement impaludées. La vallée de la Salouen est particulièrement sauvage et très faiblement peuplée par des populations tibéto-birmanes ; la vallée du Mékong a été davantage une voie de passage. Les communications sont difficiles et se sont longtemps réduites à des pistes franchissant les rivières par des ponts suspendus. C’est à travers ces chaînes que fut construite, durant la Seconde Guerre mondiale, la célèbre « route de Birmanie », prodigieuse réalisation qui permit de ravitailler à partir de la Birmanie le gouvernement nationaliste chinois réfugié à Chongqing (Tch’ong-k’ing). Elle ne semble guère avoir d’importance actuellement. À son débouché à l’extrémité du « plateau » du Yunnan central et oriental, toutefois, la ville de Dali (Ta-li), au bord du lac Erhai (Eul-hai), est un centre assez important.

Les altitudes sont beaucoup plus basses dans le Yunnan central et oriental. Le Yunnan central, ou plus exactement sud-central, est une région disséquée et mouvementée : les vallées de la rivière Noire (Heijiang [Hei-kiang] et du fleuve Rouge (Yuanjiang [Yuan-kiang]), qui coulent vers le sud-est (vers le Viêt-nam du Nord) l’accidentent.

Le Yunnan oriental mérite davantage la qualification de plateau : le paysage de plateau est, par exemple, bien réalisé entre Dali (Ta-li) et Kunming.

Les deux aspects les plus caractéristiques sont, d’une part, de très nombreux bassins où jaillissent des sources et occupés souvent par des lacs (lac Dianchi [Tien-tch’e], sur lequel est situé Kunming ; lac Fuxian [Fou-sien], d’où est issue la rivière Nanpan [Nan-p’an], une des têtes du Xijiang [Si-kiang]), et, d’autre part, tout à fait au sud-est, un karst de 55 000 km2 ; ce karst (dans des calcaires surtout dévoniens) présente parfois le célèbre paysage de « shi lin » (che-lin), de « forêt de pierres », de karst à pitons ; mais, plus souvent, le karst, plus élevé, est plus massif, moins évolué : dômes arrondis, dolines et bassins de « dissolution » sur le pourtour desquels réapparaissent les pitons. La plupart des bassins sont des fossés d’effondrement, et le vigoureux abrupt qui limite le Yunnan au-dessus du Guizhou (Kouei-tcheou) est, sans doute, un escarpement de failles.

Le Yunnan central et oriental a un climat tropical d’altitude. Kunming, à 1 900 m d’altitude, a une température moyenne de 15,9 °C : le mois de juillet a une température moyenne de 20,3 °C ; le mois de janvier n’est pas froid, compte tenu de l’altitude (9,6 °C), et le gel ne provoque que rarement la formation de minces pellicules de glace sur les lacs ; il tombe 1 162 mm de pluies en 121 jours, à peu près exclusivement en été ; l’hiver est sec et très ensoleillé. Les vallées du Heijiang (Hei-kiang) et du Yuanjiang sont fortement impaludées. Les contrastes d’altitude entraînent une grande variété des espèces végétales, et le Yunnan dans son ensemble est un vrai « jardin botanique » (10 000 variétés de plantes). Ils entraînent aussi une grande variété de cultures : cultures tropicales (canne à sucre, coton) jusqu’à 800 m ; orangers jusqu’à 1 800 m ; théiers, riz jusqu’à 2 600 m ; blé, orge, colza, maïs et le meilleur tabac de Chine plus haut encore.

Deux agricultures sont en présence : l’agriculture han et l’agriculture des minorités. Les Hans sont installés dans les bassins, où ils ont aménagé des rizières soigneusement irriguées (sur un million d’hectares) : les rizières portent souvent du blé et de l’orge en hiver.