Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

‘Abbāssides (suite)

Le décor

Comme l’architecture, le décor subit sous les ‘Abbāssides une évolution radicale. Tandis que, chez les Omeyyades, il était sculpté à même la pierre, il est désormais en stuc et plaqué sur des murs de brique dont il recouvre toutes les parties basses, alors qu’au-dessus s’alignent des niches où se développent des compositions peintes. Bien que stucs et plâtres aient été retrouvés aussi à al-Ḥīra (en Iraq), à Bukhārā (Boukhara), plus tard à Bālis (en Syrie), etc., Sāmarrā permet d’étudier l’évolution du style et de distinguer, assez sommairement, trois écoles. Dans la plus ancienne, le décor est moulé, et son thème principal demeure le rinceau de feuilles de vigne à cinq lobes. Dans la deuxième, le rinceau disparaît, et la feuille fait place à un bourgeon. Dans la troisième, les stucs sont sculptés ou moulés, le relief s’amenuise, et les bords des tracés sont adoucis par la taille oblique : on a suggéré que cette technique, qu’on retrouve d’ailleurs employée dans la pierre et surtout le bois, avait été importée d’Asie centrale. Elle fleurira en Égypte ṭūlūnide, province avertie de l’art ‘abbāsside. Les œuvres sculptées ‘abbāssides peuvent sembler monotones, mais leur beauté réside dans le mouvement, la largeur et la vigueur du dessin. Elles annoncent par ailleurs, d’une certaine façon, l’arabesque, qui ne sera pleinement réalisée qu’au xie s. On la pressent sur la chaire à prêcher (minbar) de la grande mosquée Sīdī ‘Uqba de Kairouan* (862-863), fabriquée, en bois de teck, dans les ateliers de Bagdad. La peinture de Sāmarrā a beaucoup souffert de l’usure des siècles et au cours de la Seconde Guerre mondiale ; nous la connaissons surtout par d’anciens relevés. Les peintres ‘abbāssides choisissent en général des sujets semblables à ceux des peintres omeyyades : femmes drapées, danseuses au torse nu, scènes de chasse, califes en majesté, soldats et animaux. En revanche, ils les traitent d’une manière toute différente. La structure symétrique de la composition, l’immobilisme des personnages cernés par de vigoureux traits noirs, l’absence de modelé, les visages et les parures portent la marque sassanide. Les couleurs gréco-romaines cèdent la place aux tons plus crus de l’Iran. Cet art de cour trouvera un écho dans les églises arméniennes (v. Arménie), en Sicile* arabo-normande et, plus tard, dans les palais d’Afghānistān*.


Les arts mineurs

Les traditions iraniennes ont été si tenaces que, pendant longtemps, les spécialistes éprouvèrent des difficultés à attribuer les objets d’art mobilier des premiers siècles ‘abbāssides à l’islām ou aux Sassanides. Nous y voyons maintenant plus clair. Dans une production importante et variée, nous devons mentionner les verres, les cuivres, les bronzes et les argents, traités de la même façon, le métal étant fondu en relief et son décor estampé ou repoussé, ainsi que les tissus et les céramiques. Sur tous ces objets n’a pas tardé à se manifester, à côté de l’influence iranienne, celle de l’Extrême-Orient, surtout au Khurāsān et au Turkestan. On trouve un reflet des modèles chinois contemporains dans les aquamaniles, les fontaines, les brûle-parfum de métal. Même influence sur les tissus malgré les manufactures officielles (ṭirāz) : il faudra plusieurs siècles pour que le génie islamique s’en libère totalement. Le fragment de soie iranienne, connu sous le nom de « suaire de Saint-Josse » (Louvre, xe s.), pris parmi des centaines d’autres, fournit un splendide exemple, avec ses grands éléphants qui se détachent en clair sur un fond rouge, de la permanence de l’Iran. Tributaires aussi de la Perse et de la Chine, les céramistes se révèlent vite doués de dons exceptionnels et variés : des objets divers, réalisés avec toutes les techniques de l’art de la terre, voisinent avec les plaques de revêtement mural. Les ateliers de Bagdad fabriquent et exportent les plus belles pour parer le miḥrāb de la mosquée de Kairouan*. La découverte géniale des potiers ‘abbāssides est la céramique à lustre métallique obtenue au moyen d’oxyde de cuivre ou d’argent qui donne aux pièces un reflet doré ; on la rencontre dans tous les grands chantiers de fouilles : à Sāmarrā, à Suse, à Rages, à Raqqa, à Fusṭāṭ et jusqu’en Espagne.

J.-P. R.

➙ Bagdad / Hārūn al-Rachīd / Iran / Iraq / Islām / Omeyyades.

 F. Sarre et E. Herzfeld, Die Ausgrabungen von Samarra (Berlin, 1913-1948 ; 4 vol.). / K. A. C. Creswell, Early Muslim Architecture, t. II : Early ‘Abbāsids, Umayyads of Cordova, Aghlabids, Ṭūlūnids and Samānids (Oxford, 1940). / D. Sourdel, le Vizirat ‘abbāsside de 749 à 936 (132 à 324 de l’hégire) [A. Maisonneuve, 1961 ; 2 vol.].

abcès

Collection de pus dans une cavité créée par le développement de l’infection et dont les parois sont faites du tissu voisin refoulé et modifié.


Cette définition limite le terme d’abcès à la collection de pus dans les parties molles. En fait, il peut exister des collections suppurées dans les cavités préformées ou les séreuses. On dit alors qu’il s’agit d’un abcès enkysté : c’est le cas de l’abcès appendiculaire et de l’abcès du cul-de-sac de Douglas.

On assimile souvent les termes d’abcès et de phlegmon. Mieux vaut réserver ce dernier à l’infection localisée, mais non encore suppurée, et garder le terme d’abcès pour caractériser l’infection au stade de collection purulente.

Édouard Chassaignac

Chirurgien français (Nantes 1804 - Paris 1879). Chirurgien de l’hôpital Lariboisière, il découvrit l’infection purulente, isolant les formes diffuses et localisées, distinguant les formes putrides des autres formes. Il eut l’idée d’évacuer les collections de pus à l’aide d’un drain de caoutchouc. Il fut l’un des fondateurs de la Société de chirurgie, l’actuelle Académie de chirurgie.