Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Rome (suite)

Site et situation

La Rome primitive était située à 25 km de la mer (à 20 km de ce qui devait être la ligne côtière de l’époque), sur les bords du Tibre, en une situation de ville-pont et de carrefour. Ici, le Tibre (de 15 à 19 m d’altitude), qui divaguait sur 2 à 3 km de largeur, se rétrécissait à moins de 1 km en passant au travers d’un ensemble de collines.

Sur la rive droite du fleuve se trouvent les collines du monte Mario (139 m d’altitude), du Vatican, du Janicule (82 m) et du Monteverde. Sur la rive gauche, les « sept collines de Rome », modestes hauteurs aux flancs abrupts mais à sommets plats, correspondent à des lambeaux étroits de coulées volcaniques provenant des Colli Laziali ou Albani. Un ensemble de conditions géographiques favorables sont ainsi réunies pour fixer une agglomération. Les collines sont des sites de défense aisée. Le Tibre permet une relation maritime ; sans exagérer ce fait, il faut encore noter qu’il est facilement franchissable à la hauteur de Rome, grâce à la présence de l’Isola Tiberina. Les plaines alentour offrent de nombreux pâturages. Enfin, les relations avec d’autres régions sont commodes, en particulier vers l’Ombrie par la vallée du Tibre, vers la Campanie par celle du Sacco, vers la côte adriatique par celle de l’Aniene. Progressivement, Rome va occuper son site.


Le développement urbain

La tradition place les débuts de Rome sur le mont Palatin (51 m). En réalité, il n’y eut pas une « Roma quadrata » ici ; les autres collines étaient également occupées, notamment le Capitole (59 m) et l’Aventin (42 m). Rome a commencé d’exister réellement le jour où, dans le bas-fond marécageux du Vélabre, entre le Palatin et le Capitole, on a installé, après assainissement, le Forum. La ville a gagné ensuite les hauteurs du Caelius, de l’Oppius, du Viminal, du Quirinal.

Cette première Rome est entourée par un mur d’enceinte, dit « mur de Servius », au ive s. av. J.-C. Avec l’avènement de l’Empire romain (23 av. J.-C.), Rome connaît une immense prospérité. L’austérité des demeures de l’époque républicaine fait place au luxe des villas patriciennes, voisinant avec des immeubles pauvres, à fortes densités et à plusieurs étages, les insulae. Toutefois, la structure de la ville ne change pas beaucoup. Auguste lance de grands travaux publics. Néron fait élaborer un véritable plan régulateur. Au iiie s. apr. J.-C., l’empereur Aurélien fait construire une nouvelle enceinte (plus de 18 km de murs, troués de portes, enserrant 1 372 ha) ; cette enceinte englobe les collines de l’Esquilin et du Pincio, la plaine du champ de Mars, et elle s’avance, de l’autre côté du Tibre, jusque sur le Janicule. La ville compte alors plus d’un million d’habitants.

Avec le déclin de l’Empire et le transfert de la capitale à Milan, sa décadence commence. Pendant des siècles, Rome va connaître pillages et destructions. Son autorité spirituelle demeure grâce à la présence de la papauté, installée à Saint-Jean-de-Latran et au Vatican. Les papes administrent la ville, bâtissent des églises, des basiliques. La richesse du clergé et l’abondance des pèlerins font de Rome une ville active. Léon IV, entre 848 et 852, fortifie le Vatican par la construction d’un mur allant du Tibre au château Saint-Ange. Les grandes familles, de leur côté, bâtissent des forteresses, et, dans la campagne, des monastères fortifiés surgissent. Le départ de la papauté à Avignon donne à Rome un coup terrible, et, à la fin du xive s., la ville ne compte plus que 35 000 habitants, pauvres et affaiblis par la malaria. Le retour des papes fait d’elle, de nouveau, la capitale du royaume pontifical. Les papes, grands mécènes, attirent architectes et artistes, et Rome se substitue à Florence comme capitale de la Renaissance. Une ville fastueuse grandit surtout sur l’emplacement de l’ancien champ de Mars.

Au début du xviiie s., Rome a atteint les dimensions qu’elle conservera jusqu’en 1870 ; la superficie construite est égale au tiers de celle qui est délimitée par l’enceinte d’Aurélien. La fonction essentielle de la ville est d’abriter les services centraux de la hiérarchie catholique. La promotion au rang de capitale nationale déchaîne une spéculation immobilière effrénée. Les familles patriciennes et les communautés religieuses sont un peu inquiètes de l’avenir et vendent facilement ; les grandes banques, italiennes ou étrangères, achètent rapidement. L’installation des ministères et l’afflux des fonctionnaires posent le problème du logement. Rome se transforme en un immense chantier, souvent chaotique malgré le plan d’aménagement de 1871 et surtout celui de 1883. L’importance du bâtiment entraîne de forts mouvements migratoires de paysans vers la ville, qui a besoin de leur main-d’œuvre. Au milieu des difficultés financières, la municipalité met en place les grands services urbains, assure la viabilité, maintient des espaces verts (Villa Borghèse), construit des immeubles populaires, assainit les quartiers insalubres. Un nouveau plan est voté en 1909.

La période fasciste est marquée par de grands travaux. Mussolini ordonne de faire de Rome une ville merveilleuse, « vaste, ordonnée, puissante comme aux temps des premiers empereurs ». De 1924 à 1940, on détruit les vieux quartiers dans la zone archéologique pour mettre en valeur, avec des résultats inégaux, les monuments romains. On trace de grandes voies, on construit de nombreux bâtiments administratifs et des immeubles d’habitations, on édifie des œuvres de prestige (zone de l’Exposition universelle, ou EUR). Les habitants chassés du centre viennent rejoindre dans la périphérie urbaine la masse des immigrés de fraîche date. Souvent chômeurs ou sous-employés, ces travailleurs se logent dans des agglomérations de baraques. Le gouvernement crée alors les borgate, entassement d’habitations misérables, privées des services les plus élémentaires, placées le plus loin possible de la capitale (de 8 à 20 km de Rome).