Jules Mazarin

en italien Giulio Mazarini

Mazarin
Mazarin

Prélat et homme d'État français (Pescina, Abruzzes, 1602-Vincennes 1661).

Introduction

Originaire d'une famille romaine alliée aux princes Colonna par sa mère et d'une famille sicilienne assez modeste par son père, Mazarin suivit l’enseignement du collège des Jésuites de Rome. En 1618, il devint étudiant en droit canon à l'université de la Sapience. Mais le jeu et la vie mondaine l'attirant plus que les études, son père l'envoya en Espagne à dix-sept ans accompagner le jeune Girolamo Colonna et poursuivre ses études à l'université d'Alcalá. Mazarin resta trois ans en Espagne, élargissant son horizon aux dimensions de l'Europe. Pour l'empêcher d'épouser la fille d'un notaire de Madrid, son père le rappela à Rome.

Au service du pape

Mazarin, devenu docteur in utroque jure, mais tenté par la carrière des armes, fut nommé en 1623 capitaine de l'armée pontificale, chargée d'occuper la Valteline que se disputaient Espagnols et Français. Grâce à sa connaissance de la langue castillane, il fut chargé des négociations avec les Espagnols qui aboutirent en mars 1626 au traité de Monzón garantissant la neutralité de la Valteline. Cette affaire fit connaître Mazarin dans les hautes sphères de Rome.

Lors de la succession de Mantoue, Mazarin négocia la paix entre la France et l'Espagne comme représentant du pape Urbain VIII, qui voulait empêcher à tout prix la guerre entre les puissances catholiques. Ce fut au cours de ces négociations, à Lyon, le 28 janvier 1630, que Mazarin rencontra pour la première fois Richelieu. La levée du siège de Casale le rendit célèbre dans toute l'Europe : Mazarin, le 26 octobre 1630, au moment où tout semblait perdu et où les troupes françaises et espagnoles allaient s'affronter, s'élança à cheval entre les armées ennemies, agitant en l'air son chapeau et criant « Pace, Pace » ; il tenait en main le projet du traité qu'il venait de faire accepter aux deux puissances. Il contribua au règlement du conflit qui, par le traité de Cherasco du 6 avril 1631, assurait Mantoue au duc de Nevers et Pignerol à la France.

Dès ce traité, l'entente sembla formée entre Richelieu et le jeune diplomate. Mazarin, doué d'une intelligence remarquable, d'une acuité et d'une souplesse d'esprit surprenantes, éloquent, profondément optimiste, était un diplomate-né. Richelieu pensait grâce à lui influer sur le jeu politique du Saint-Siège.

Après un bref séjour à Paris, où il fut fort bien reçu par le roi et Richelieu, Mazarin devint en décembre 1632 chanoine au chapitre de Saint-Jean de Latran. Il entra au service du cardinal Antonio Barberini (1608-1671), neveu de Maffeo Barberini devenu le pape Urbain VIII et favorable à la France.

En 1634, Mazarin fut nommé vice-légat à Avignon et fut chargé en novembre en tant que « nonce extraordinaire » à Paris d'obtenir la restitution au duc de Lorraine de ses États, de défendre la validité du mariage de Gaston d'Orléans avec la sœur du duc de Lorraine, et surtout de plaider en faveur de la paix (l'aide fournie par Richelieu aux princes protestants faisant craindre au pape l'intervention prochaine des Français dans la guerre de Trente Ans). Mais sous la pression des Espagnols, irrités des services de Mazarin, le pape le rappela en Avignon en mars 1635. De retour à Rome fin 1636, il tomba dans une demi-disgrâce. La mort du Père Joseph, conseiller de Richelieu et candidat officiel de la France au cardinalat, en décembre 1638, ouvrit de nouvelles perspectives à Mazarin.

Au service du roi de France

Invité par Louis XIII, Mazarin quitta définitivement Rome le 14 décembre 1639, pour entrer au service de la France, dont il adopta la nationalité l'année même, ce qui lui permit d'acquérir et de léguer des biens, y compris des bénéfices ecclésiastiques ; le roi lui octroya bientôt ceux de l'abbaye Saint-Médard de Soissons.

Plusieurs missions diplomatiques lui furent confiées : envoyé en 1641 à Turin, il rétablit l'alliance française avec Marie-Christine de Savoie ; il réussit à convaincre le duc de Bouillon de céder la place de Sedan à la France en 1642.

La nomination au cardinalat ayant été arrachée au pape par les instances de Richelieu, Mazarin reçut le bonnet des mains de Louis XIII le 6 mai 1642 à Valence. Richelieu considérait Mazarin non comme son successeur éventuel, mais comme le premier collaborateur de sa diplomatie. Richelieu mourut le 4 septembre 1642 après avoir recommandé Mazarin à Louis XIII. Mazarin ne cessa jamais de proclamer son admiration et sa reconnaissance pour son bienfaiteur, dont il poursuivit la politique.

Le 5 décembre 1642, Louis XIII fit entrer Mazarin au Conseil du roi. Pour attacher davantage le cardinal au service de la France et du Dauphin, le roi le nomma parrain du futur Louis XIV. Louis XIII mourut le 14 mai 1643 ; dès le 18, le parlement de Paris annulait son testament, qui instituait un Conseil de régence, dont Mazarin était l'un des membres.

Les premières années de la régence (1643-1648)

Le 18 mai 1643, quatre jours après la mort de Louis XIII, Anne d'Autriche, régente pour le compte de Louis XIV – qui n'avait que quatre ans et demi –, choisit Mazarin comme Premier ministre. Gaston d'Orléans devint lieutenant général du royaume et le prince de Condé chef du Conseil, nominations qui avaient surtout pour but d'éviter une rébellion des grands du royaume.

Mazarin fut un Premier ministre plus puissant encore que Richelieu ; ce dernier devait en effet compter avec Louis XIII, tandis qu'Anne d'Autriche laissa Mazarin seul maître des orientations de la politique. Il put compter sur le soutien sans faille de la régente, qui renforça son pouvoir dès 1644 en le faisant surintendant de sa maison, puis en 1646 en lui confiant l'éducation de Louis XIV.

Anne d'Autriche, en nommant Mazarin, ne rompait pas avec la tradition du règne précédent. Furent-ils époux (Mazarin n'était pas prêtre) ? Nul document ne permet de l'affirmer. Mais leur amour ne saurait faire de doute quand on lit leur correspondance. « De belle taille, le teint vif et beau, les yeux pleins de feu, le nez grand, le front large et majestueux », Mazarin était séduisant.

Le début de la régence fut marqué par la victoire de Rocroi, remportée en mai 1643 sur les Espagnols par le duc d'Enghien (le futur Grand Condé). Mais ce succès, qui faisait de la maison de Condé le soutien du trône, excita la jalousie d'anciens exilés et de ceux qui avaient cru l'emporter au début de la régence dans les faveurs de la reine. Le duc de Beaufort était le chef de cette cabale dite « des Importants », ainsi nommée à cause de la morgue affichée par les seigneurs conjurés. Au centre de la cabale, le duc de Beaufort souhaitait récupérer le gouvernement de la Bretagne, que Richelieu avait retiré à son père, César de Vendôme. La duchesse de Chevreuse soutenait les prétentions de la maison de Vendôme et de Châteauneuf. Les comploteurs, parmi lesquels se trouvait également le duc de Guise, voulaient que la reine éloignât Mazarin des affaires et avaient prévu de le remplacer par l'évêque de Beauvais, Augustin Potier. Mazarin réduisit la conspiration dès les mois suivants. Le duc de Beaufort emprisonné, Mme de Chevreuse de nouveau exilée, Mazarin fit vraiment à partir de ce moment figure de Premier ministre.

Le cardinal ne chercha pas à réformer les abus nés du système des fermes pour la perception des impôts ; au contraire, durant son ministériat, toute l'administration financière passa aux mains des traitants ou financiers. Michel Particelli d'Émery (vers 1595-1650), surintendant des Finances depuis 1643, créa en 1644 la taxe des aisés et la taxe du toisé, qui frappait les logements modestes construits dans les faubourgs de Paris au-delà de l'enceinte, pour procurer de l'argent au Trésor, épuisé par la poursuite de la guerre. Devant l'opposition du parlement, le président Barillon fut exilé.

La politique étrangère

La guerre de Trente Ans

La paix générale de la chrétienté, tel était le but ultime de la politique extérieure de Mazarin. Le congrès de Westphalie n'empêchait pas la poursuite de la guerre. En 1645, la conjoncture devint très favorable à la France : victoire de Nördlingen, retour de la paix entre la Suède et le Danemark au traité de Brömsebro, traité avec le Danemark, qui ouvrait le Sund au commerce français, mariage de Marie de Gonzague-Nevers avec Ladislas IV, roi de Pologne. Mazarin alors eut la tentation de se réconcilier avec l'Espagne au détriment des Pays-Bas. Il aurait échangé la Catalogne contre les Pays-Bas, lesquels auraient constitué la dot de la jeune infante qui aurait été fiancée au jeune Louis XIV. Son conseiller Servien le dissuada d'un tel projet.

Les affaires italiennes

En Italie également, Mazarin révélait de grandes ambitions. Il prépara une expédition contre les présides de Toscane, imaginant qu'assurée d'une base sur les côtes de Toscane la flotte française pourrait conduire Thomas de Savoie à Naples et provoquer une insurrection contre l'Espagne. L'expédition échoua en juillet 1646. Mais, en octobre, le succès de l'attaque contre l'île d'Elbe et Piombino entraîna à Rome un renversement de la politique du pape Innocent X, jusqu'alors hostile à la France et à Mazarin.

Une révolte populaire éclata en juillet 1647 à Naples ; Mazarin y vit une nouvelle possibilité d'affaiblir les Espagnols. Henri II, duc de Guise (1614-1664), s'y fit reconnaître « protecteur de la République », mais l'envoi d'une flotte permit le rétablissement du régime espagnol.

Les traités de Westphalie

Le 30 janvier 1648, les Espagnols conclurent une paix séparée avec les Provinces Unies. L'Espagne, qui pouvait maintenant porter son principal effort contre la France, aurait voulu prolonger son alliance avec l'empereur. Mazarin fit en quelque sorte la parade en concluant rapidement la paix de Westphalie. Abel Servien signa pour la France le 24 octobre 1648 le traité de Münster qui mettait fin à la guerre de Trente Ans. La France obtenait définitivement les Trois-Évêchés et les droits et possessions de la maison d'Autriche sur l'Alsace.

La Fronde

De 1648 à 1652, des troubles très confus, la Fronde, opposèrent le gouvernement royal au parlement de Paris, puis aux princes, enfin à une coalition hétéroclite groupant parlementaires, compagnies d'officiers, nobles. Sur la personne de Mazarin se cristallisèrent tous les mécontentements. La convocation des états généraux fut au cœur des revendications des gentilshommes, tandis que les grands ne voulaient que le renvoi du cardinal et que les parlementaires, eux, souhaitaient défendre leurs intérêts tout en essayant d'élargir leur pouvoir politique. L'impossibilité pour ces trois groupes de frondeurs de s'entendre pour mener une politique commune d'opposition à Mazarin fut pour celui-ci le premier gage de son succès.

En 1648, le parlement tenta d'interdire à Mazarin de diriger les affaires du royaume en vertu d'un arrêt de 1617 pris contre Concini – sans que cela eût d'effet. À plusieurs reprises, devant la résolution de ses adversaires, Mazarin dut s'enfuir : en septembre 1648, il partit avec le roi et la régente à Saint-Germain-en-Laye ; durant l'année 1650, il fit plusieurs voyages dans le royaume, dans le but de consolider son pouvoir ; dans la nuit du 6 au 7 février 1651, il quitta Paris afin de faire retomber l'agitation du parlement, des nobles et des princes, pour une fois tous unis contre lui. Il s'exila alors volontairement en Allemagne, à Brühl, dans un château de l'archevêque-Électeur de Cologne, tout en continuant d'échanger une correspondance secrète avec la régente. La majorité de Louis XIV fut proclamée le 7 septembre 1651, mais le jeune roi ayant solennellement délégué son pouvoir à sa mère, et Mazarin ayant conservé toute la confiance de celle-ci, il resta de fait à la direction des affaires.

Ses adversaires se divisant comme il l'avait prévu, il put rejoindre la cour à Poitiers le 28 janvier 1652 avec sept mille hommes recrutés à ses frais en Allemagne. Après un nouvel exil en août 1652 à Bouillon, la fin de la Fronde et le retour du roi à Paris en octobre suivant, il attendit le 3 février 1653 pour regagner à son tour la capitale où il fut acclamé par les Parisiens.

La toute-puissance du Premier ministre

Introduction

Le sacre de Louis XIV le 7 juin 1654 marquait le rétablissement définitif de la paix intérieure et la victoire de Mazarin, désormais tout-puissant.

La politique extérieure

L'empereur Ferdinand III mort sans héritier vivant, Mazarin, qui avait songé un moment à faire élire Louis XIV empereur et rêvé pour lui-même de la tiare papale, devint le protecteur de la ligue du Rhin (1658), qui obligeait le nouvel empereur Léopold Ier à respecter les accords de Westphalie.

Mais la guerre extérieure continuait avec l'Espagne, qui avait refusé de signer le traité de Münster. Mazarin pensa contraindre l'Espagne à la paix grâce aux succès militaires de Turenne ; mais la défaite du maréchal de La Ferté à Valenciennes et la perte de la ville de Condé rompirent les négociations entamées à Madrid par Hugues de Lionne (1611-1671) durant l'été 1656. Le cardinal, pour attaquer les villes côtières de Flandre, s'allia par le traité de Paris en mars 1657 avec Cromwell ; ce traité militaire faisait suite à un traité de commerce conclu en 1655 qui mettait fin aux actes de pirateries entre Anglais et Français. L'alliance renouvelée en mars 1658 permit le 14 juin la victoire des Dunes, remportée par Turenne sur Condé (passé dans le camp espagnol), et la prise de Dunkerque. Turenne poursuivit alors son avance jusque vers Bruxelles, mais dans l'intervalle, la mort de Cromwell et l'activité diplomatique entre Paris et Madrid avaient permis d'envisager la paix.

Désireux de conclure cette paix avec l'Espagne en mariant Louis XIV et l'infante, le cardinal fit craindre à l'Espagne, lors d'un voyage du roi à Lyon, la possibilité d'un mariage entre Louis XIV et Marguerite de Savoie. Inquiète, l'Espagne se décida à envoyer Antonio Pimentel à Lyon pour négocier. Mazarin encouragea le roi à rompre l'idylle qu'il avait avec Marie Mancini (1640-1715), l'une des nièces du cardinal.

Les pourparlers de paix commencés à Lyon en 1658, poursuivis à Paris, la rencontre dans l'île des Faisans entre Mazarin et le Premier ministre espagnol Luis de Haro d'août à novembre 1659 aboutirent à la signature le 7 novembre du traité des Pyrénées, qui mettait fin à la guerre. Le prince de Condé, pour sa part, reçut le pardon du roi – la cérémonie eut lieu à Aix-en-Provence au début de 1660.

La France obtenait définitivement l'Artois, la Cerdagne, le Roussillon. Et surtout, le mariage entre Louis XIV et l'infante était conclu, Marie-Thérèse renonçait à la couronne d'Espagne moyennant une dot de 500 000 écus d'or (cette somme ne sera jamais versée). Le couple royal entra à Paris le 26 août 1660 dans la joie générale. Le parlement envoya une députation extraordinaire au cardinal pour le remercier de la conclusion du traité des Pyrénées et du mariage du roi.

L'Europe entière consacra la toute-puissance de Mazarin en le sollicitant pour arbitrer la paix du Nord : le traité d'Oliva mit fin en mai 1660 au conflit entre la Pologne, le Brandebourg et la Suède ; le traité de Copenhague de juin 1660 rétablissait la paix entre le Danemark et la Suède. Mazarin, grâce à son talent de diplomate et à sa connaissance approfondie des affaires européennes, avait fait de la France la grande puissance de l'Europe.

Les affaires intérieures

Mazarin gouverna aidé de Michel Le Tellier à la Guerre, de Hugues de Lionne aux Affaires étrangères et de Nicolas Fouquet aux Finances. Mazarin laissa à Fouquet toute liberté pour la gestion des fonds publics ; peu lui importait les moyens par lesquels Fouquet se procurait l'argent qu'il exigeait pour financer sa politique extérieure.

Le cardinal se servit du mouvement janséniste français pour neutraliser le pape, hostile à la guerre entre l'Espagne et la France, en détournant son attention de la lutte entre les deux pays et en lui donnant la possibilité d'exercer son autorité de chef spirituel. Peu intéressé par les questions religieuses, Mazarin sacrifia les jansénistes à la poursuite de sa politique extérieure. Le 10 juillet 1653, il présida l'assemblée du clergé qui se prononça pour la réception en France de la bulle d'Innocent X Cum occasione condamnant la doctrine de l'Augustinus et assurant le triomphe des jésuites. L'agitation ne retomba pas : Pascal écrivit alors ses Provinciales (publiées en 1656-1657), tandis que les jansénistes recevaient également le soutien du cardinal de Retz. En 1660, Mazarin résolut de faire signer à tous les ecclésiastiques de France un formulaire, inacceptable pour les jansénistes puisqu'il condamnait cinq propositions de l'Augustinus, de Jansenius, enclenchant ainsi la longue persécution de Port-Royal et de ses adeptes. Mazarin fit fermer en 1661 les « petites écoles » et disperser les « solitaires ». Le cardinal profite de cette affaire pour obtenir que le Saint-Siège admette la démission du cardinal de Retz de sa dignité archiépiscopale.

L'autorité du ministre ne fit que croître durant les dernières années de sa vie, le roi le laissant entièrement libre de ses décisions. Louis XIV semblait « l'aimer par-dessus tout le monde ». Mazarin se chargea de l'éducation politique du roi, qui, dès l'âge de seize ans, fut associé régulièrement aux travaux de ses différents conseils. Le Conseil de régence fut remplacé à la majorité de Louis XIV par un Conseil étroit (ou Conseil d'en-haut).

Le cardinal voulait laisser après sa mort Louis XIV en mesure de gouverner sans l'aide d'un Premier ministre.

La maison du cardinal

Mazarin amassa une prodigieuse fortune durant son ministériat. Colbert remit de l'ordre après la Fronde dans cette fortune déjà considérable, mais mal gérée. Les revenus du cardinal provenaient de ses gouvernements d'Alsace, de Vincennes, de La Rochelle, de l'évêché de Metz et de 27 abbayes, mais aussi d'« affaires » financières scandaleuses.

Mazarin fit venir à Paris ses neveux et nièces Mancini et Martinozzi, qui épousèrent de grands noms de la noblesse française. Hortense Mancini épousa en 1661 Armand Charles de La Porte, marquis de La Meilleraye puis duc de Mazarin. Ainsi également de Laure Mancini, mariée au duc de Mercœur, Laura Martinozzi, mariée au fils du duc de Modène, tandis que sa sœur Anna-Maria épousait le prince de Conti. Enfin, Marie Mancini, de laquelle Louis XIV fut amoureux vers 1658, fut éloignée par son oncle à Rome, où elle épousa un prince Colonna.

Collectionneur, Mazarin assembla dans son palais (devenu la Bibliothèque nationale) des sculptures, peintures, tapisseries, joyaux, meubles, dont une partie provenait de la vente de la collection de Charles Ier d'Angleterre. Gabriel Naudé (1600-1653) s'occupa de la bibliothèque de Mazarin, dispersée durant la Fronde, puis reconstituée et léguée au collège des Quatre-Nations (fondation posthume de Mazarin, aujourd'hui Institut de France). Mazarin aimait donner des représentations théâtrales (il fit jouer plusieurs pièces de Molière), des fêtes, des festins. Il introduisit en France l'opéra italien, les machines de Giacomo Torelli (1604 ou 1608-1678), les mises en scène somptueuses. Il fonda l'Académie royale de peinture et de sculpture.

Mazarin mourut le 9 mars 1661 à Vincennes. Louis XIV ayant refusé la fortune qu'il lui léguait, c'est le neveu du cardinal, le duc de La Meilleraye, qui fut son légataire universel. Mazarin laissait un actif de plus de 35 millions de livres – la plus grosse fortune de son siècle, peut-on estimer, nettement plus importante que celle de Richelieu – dont 8 700 000 livres en argent liquide et 4 400 000 livres en objets précieux et bijoux. Parmi ses débiteurs figuraient le roi d'Angleterre (pour 660 000 livres), la reine de Pologne (300 000 livres) ou encore Christine de Suède. Les revenus du cardinal s'élevaient à plus de 1 600 000 livres par an ; il s'agissait pour un tiers (572 000 livres) de revenus ecclésiastiques – dont 140 000 livres tirées de la seule abbaye de Saint-Denis.

Mazarin, qui avait été si violemment décrié, laissait le royaume pacifié et victorieux. Il avait préparé les conditions politiques et idéologiques qui permirent au règne de Louis XIV d'être tout de suite très brillant.

Les mazarinades

Pamphlets, chansons, poèmes burlesques, satires publiés durant la Fronde et dirigés principalement contre Mazarin. Les pamphlets rendaient le cardinal responsable de la crise et attaquaient son origine étrangère, sa fortune rapide, ses amours, son incapacité dans les affaires intérieures, sa politique extérieure. Mais chaque parti ayant ses propres pamphlétaires, Anne d'Autriche, Gaston d'Orléans, le Grand Condé, le cardinal de Retz et les financiers furent aussi attaqués.

Célestin Moreau dans sa Bibliographie des mazarinades (1850) dénombra environ 4 000 pièces. La Requeste des trois estats présentée à Messieurs du Parlement, l'Histoire du temps, le Catalogue des partisans comptent parmi les mazarinades les plus importantes. Les pamphlétaires les plus illustres furent : Gui Joly, Jean-François Sarasin, Olivier Patru, Gui Patin, Scarron, etc. G. Naudé, bibliothécaire de Mazarin, réfuta dans le Mascurat ou Jugement de tout ce qui a été imprimé contre le cardinal de Mazarin vers (1650) les accusations lancées contre Mazarin.