François Bayrou

Homme politique français (Bordères, aujourd'hui dans les Pyrénées-Atlantiques, 1951).

1. Des démocrates sociaux à la présidentielle

Fils d’un agriculteur et maire MRP d’un village du Béarn, François Bayrou mène des études littéraires qui le conduisent à l’agrégation de lettres classiques en 1974. Enseignant dans l’école publique, mais de sensibilité chrétienne-démocrate, il suit l’exemple familial et se lance dans la vie politique pour le compte de l’UDF. C’est ainsi qu’il devient conseiller général en 1982 puis député des Pyrénées-Atlantiques (1986-1999 et 2002-2012), et siège au Parlement européen de 1999 à 2002. Porte-parole de sa formation puis ministre de l'Éducation nationale d’Édouard Balladur(1993-1995), il se voit confier le même portefeuille, avec des compétences étendues à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, sous le gouvernement d’Alain Juppé, de 1995 à 1997.

En 1994, il succède à Pierre Méhaignerie à la présidence du Centre des démocrates sociaux (CDS) et préside à la refondation de ce parti sous le nom de Force démocrate en 1995. Président de l'Union pour la démocratie française (UDF) depuis 1998, il transforme cette fédération en en unifiant les différentes composantes.

Candidat à l'élection présidentielle de 2002 à l'issue de laquelle il recueille 6,84 % des voix, il triple son score en 2007 en obtenant 18,57 % des suffrages. Fort du crédit des urnes, et désireux de poursuivre une trajectoire personnelle destinée à le conduire à l’Élysée, il lance une formation politique s’appuyant sur les valeurs centristes et européennes qu’il prétend incarner, le Mouvement démocrate, ou MoDem.

2. Le MoDem – aléas d'une stratégie du juste milieu ou du « ni-ni »

Lâché par la plupart des députés sortants de l’UDF ayant rejoint, au sein d’un Nouveau Centre, la majorité présidentielle, mais soutenu par Corinne Lepage de l’organisation écologiste Cap 21, et par l’ancien secrétaire général des Verts, Jean-Luc Benhamias, le MoDem obtient 7,76 % des suffrages au premier tour des législatives de juin 2007, mais seulement 4 sièges (dont le sien) dans la nouvelle assemblée.

Privé de la plupart des cadres de l’UDF, et contesté par les forces de gauche dans le rôle d’opposant à la politique de Nicolas Sarkozy qu’il endosse résolument, François Bayrou échoue à nouveau (de peu) à ravir la mairie de Pau aux élections municipales de mars 2008 ; à l’échelle nationale l’absence de cohérence dans les stratégies d’alliance qu’il adopte se voit sanctionner.

La campagne antisarkozyste qu’il mène dans le cadre des élections européennes de juin 2009 est un échec, ses listes n’obtiennent que 8,45 % des voix et 6 représentants. La marginalisation du MoDem lors des régionales de mars 2010 (4,31 % des suffrages) jette davantage encore le doute sur la pertinence de ses orientations politiques (contestation interne à propos du choix des candidats, défection de C. Lepage attirée par Europe Écologie). Le score du MoDem aux cantonales de mars 2011 est décevant (1 % des voix au premier comme au second tour, et au total 16 conseillers généraux dans le pays).

3. Persévérance, espoirs, déceptions, marginalisation et retour

Mais le remaniement ministériel de la mi-novembre 2010 écarte nombre de centristes du sommet du pouvoir et ouvre des perspectives pour les candidats se réclamant de cette sensibilité, confortant F. Bayrou dans son analyse politique. Réélu triomphalement à la tête de son mouvement en décembre, il continue par conséquent à porter le fer contre l'actuel exécutif et chef de l'État, et à dénoncer la situation financière du pays. En août 2011, il publie un livre au titre évocateur, 2012 : État d'urgence, et peaufine en septembre aux universités d'été du MoDem son positionnement en tant que « Monsieur Propre » de la scène publique hexagonale.

Malgré la concurrence, un temps, de Jean-Louis Borloo, qui finit par renoncer, et de celles de C. Lepage puis de son ancien second, Hervé Morin, F. Bayrou fait connaître à la fin de novembre sa candidature pour l'élection présidentielleet s’avère finalement être le seul centriste à se présenter aux suffrages de ses concitoyens. Adepte d’un discours de vérité face à la crise et à l’état des comptes publics, il ne parvient toutefois pas à faire figure de troisième homme et à réitérer l’exploit de 2007 : avec 9,1 % des voix, son score au premier tour est divisé par deux. Mais à la veille du second, l’accentuation de la stratégie très droitière adoptée par N. Sarkozy le conduit à se prononcer, personnellement, en faveur du finaliste socialiste François Hollande.

S’il s’avère en définitive conforme aux options du gros de son électorat, ce geste historique suscite le trouble dans l'appareil du MoDem. Il lui vaut surtout l’inimitié des cadres comme des électeurs de la droite sans lui procurer la reconnaissance des responsables du PS : aux législatives de juin, F. Bayrou doit affronter dans sa circonscription béarnaise un candidat UMP et une socialiste, qui finalement l’emporte. Avec un peu plus de 2 % des voix au premier tour et en définitive seulement deux élus, le groupe est aussi marginalisé que son président, qui se voit fermer la tribune de l’Hémicycle et contester la parole centriste par Jean-Louis Borloo et sa nouvelle Union des démocrates et Indépendants (UDI).

4. Recentrage (et retour) à droite

La traversée du désert s’avère cependant de courte durée. En novembre 2013, déçu par les orientations prises par F. Hollande et son gouvernement, il scelle au nom du MoDem, et de concert avec l’UDI de J.-L. Borloo, une alliance qui prend le nom d’Alternative et qui vise à faire davantage exister les idées du centre au sein du pays comme sur l’échiquier politique. Si la question des ententes électorales n’est pas tranchée (avec le PS pour nombre de candidats MoDem aux municipales, avec la droite pour les autres), il obtient le retrait de son concurrent UMP à Pau, mène une liste commune d’opposition aux socialistes et finit par remporter haut la main la mairie à la fin mars 2014. Il se rapproche sensiblement d'Alain Juppé et, contre les caciques de l’UDI, entend peser un peu plus au sein d’une Alternative désormais privée, pour raisons de santé, de son mentor J.-L. Borloo. Aux européennes de la fin mai, les quelque 10 % des voix que celle-ci décroche lui permettent d’envoyer à Strasbourg un représentant de plus qu’en 2009, soit 4 députés MoDem et 3 UDI.

Ce retour à droite ne va toutefois pas sans susciter remous et dissidences, de la part notamment des anciens écologistes Jean-Luc Bennahmias et Christophe Madrolle qui fondent au début de l’automne 2014, en marge du mouvement, un Front démocrate ouvert au centre gauche. Et il ne convainc pas davantage N. Sarkozy, qui, revenu à la tête de l’UMP, continue à voir en F. Bayrou un traître – et/ou l’allié de son principal concurrent aux primaires, A. Juppé. Mais à l’inverse, il contribue à l’entrée dans les exécutifs locaux d’une partie de la quarantaine de conseillers départementaux MoDem élus en mars 2015, ainsi qu’à la récupération de la présidence des Pyrénées-Atlantiques.

L’alliance avec les listes de droite dans 11 régions métropolitaines sur 12 permet de même au MoDem de décrocher une soixantaine de sièges dans les nouveaux conseils élus en décembre 2015. En revanche, tout comme pour l’UDI, la participation de F. Bayrou et de sa formation aux primaires organisées par LR achoppe notamment sur l’absence d’accord en vue des législatives de 2017 – ce qui ne l’empêche pas le de prendre publiquement fait et cause pour A. Juppé, de dénoncer non moins continûment les orientations suivies par N. Sarkozy, et d’envisager une possible campagne présidentielle dans l’hypothèse où le candidat qu’il soutient ne parviendrait pas à se qualifier. À condition toutefois que le positionnement et la popularité d’E. Macron n’entravent pas sa recherche des suffrages du centre.

Pour en savoir plus, voir l'article France : vie politique depuis 1958.