Antonie Van Leeuwenhoek

Naturaliste hollandais (Delft 1632-Delft 1723).

Antonie Van Leeuwenhoek, né dans une famille d'artisans aisés de Delft, devient orphelin de père à l'âge de 6 ans. Il n'a que 16 ans quand il entre comme apprenti chez un drapier d'Amsterdam. Quelques années plus tard, il retourne dans sa ville natale pour s'y établir. Il sera successivement marchand de drap, huissier des échevins, géomètre et jaugeur de vin, toutes occupations qui lui laissent suffisamment de loisir pour s'adonner à des investigations scientifiques, rendues possibles d'une part par un exceptionnel talent d'observateur et d'autre part par la qualité de ses instruments d'optique. Il taille lui-même ses lentilles (il en possédera quelque 420 !), biconvexes et à grande courbure, qui dépassent en clarté et en transparence les meilleures de l'époque. À partir de 1671, il se met à fabriquer des microscopes. Ceux-ci se composent d'une lentille unique encastrée entre deux plaques de métal. L'objet à regarder est placé sur une aiguille qui, grâce à une vis, peut tourner sur elle-même, monter ou descendre, de façon à être rapprochée ou éloignée de la lentille au gré de l'observateur.

En 1674, Van Leeuwenhoek donne la première description précise des globules rouges du sang, que Malpighi et Swammerdam avaient seulement entrevus. En 1675, il fait une autre découverte très importante, celle des infusoires, ces protozoaires aujourd'hui appelés « ciliés », et il écrit à la Société royale de Londres que ces animalcules lui ont paru « dix mille fois plus petits que les puces d'eau dont a parlé M. Swammerdam et qu'on peut voir à l'œil nu ».

En 1677, il s'intéresse aux étranges « petits animaux » que vient d'apercevoir dans le sperme humain Johan Ham, un étudiant en médecine de l'université de Leyde. Ham pense qu'ils ont été engendrés par la putréfaction, mais Van Leeuwenhoek voit en eux, à juste titre, un composant normal du sperme dans l'ensemble du règne animal. Il est donc le véritable découvreur des spermatozoïdes, qu'il étudie chez toutes sortes d'animaux appartenant à des ordres divers, et qu'il décrit minutieusement.

Il découvre également les rotifères, minuscules invertébrés aquatiques dont il donne une description extraordinairement précise. Il effectue des recherches sur le bourgeonnement de l'hydre, sur la rotation de l'embryon dans l'œuf des moules d'eau douce, sur les bactéries du tartre dentaire, sur la structure comparée de la tige chez les plantes mono- et dicotylédones, sur le bois, dont il publie le premier dessin en coupe. Il étudie la structure du muscle strié comme celle du cristallin ; il suit la progression du sang dans les capillaires de la queue du tétard et démontre la continuité de la circulation entre les artères et les veines. Comme le dit Jean Rostand, il fait défiler sous ses lentilles tout ce qui lui passe par la main : gouttes de sang, de vinaigre ou d'eau croupie, débris de peau, d'os ou d'organe, nerf, muscle, morceau de feuille ou fragment d'écorce, poudre de diamant, tartre dentaire, poil de hérisson, pépin d'orange. « Avec une attention fervente, avec une patience inégalée, il explore sans relâche le monde, jusque-là fermé, de l'invisible. »

Van Leeuwenhoek communiquait tous ses mémoires scientifiques à la Société royale de Londres dont il avait été élu membre en 1680. Contrairement aux usages de l'époque, il les écrivait dans sa langue et non en latin, qu'il ignorait. Il n'a sans doute manqué à cet autodidacte de génie que d'avoir davantage de préoccupations d'ordre théorique pour révolutionner la science de son temps.

Étranges pucerons

Étranges pucerons



Parmi les investigations les plus intéressantes d'Antonie Van Leeuwenhoek figurent celles sur le cycle reproductif de divers insectes. Il étudie notamment les pucerons dont il découvre en 1695 la viviparité : il constate en effet que les femelles de certaines espèces ne renferment jamais d'œufs mais contiennent des petits tout formés. Puis il fait une autre constatation très troublante. Ayant isolé deux femelles de pucerons sur un rameau de cassis débarrassé de tout parasite et planté dans une bouteille remplie d'eau, il s'aperçoit au bout de 24 heures que l'une a mis au monde neuf petits et l'autre six. De nouvelles expériences dans des conditions semblables confirment que des pucerons peuvent naître de femelles non fécondées. Van Leeuwenhoek rend compte de ce bizarre phénomène en 1700, mais n'en tire aucune conclusion générale. Quarante ans plus tard seulement, Charles Bonnet découvrira officiellement la reproduction parthénogénétique – c'est-à-dire sans l'intervention d'un mâle – chez les pucerons.