The Velvet Underground

Groupe américain de rock formé en 1965 à New York par Lou Reed (chant, guitare), John Cale (violon, basse, piano), remplacé par Doug Yule (basse), Sterling Morrison (guitare, basse) et Maureen Tucker, dite « Mo » Tucker, remplacée par Ian Paice (batterie), rejoints après 1969 par Walter Powers et William Alexander, dit Willie « Loco » Alexander.

New York, 1964. John Cale, violoniste et pianiste, ancien élève de la Royal Academy de Londres, rencontre Lou Reed, jeune compositeur fraîchement diplômé de l'université de Syracuse (New York). À cette époque, Cale est membre du Dream Syndicate de La Monte Young (figure de proue de l'intelligentsia new-yorkaise et chantre de la musique répétitive), alors que Lou Reed, un des compositeurs « maison » de l'écurie Pickwick, écrit de la pop sucrée pour des groupes éphémères. Avec le percussionniste Angus McLise (parfois remplacé par Walter De Maria), John Cale et Lou Reed forment un groupe aux incessants changements de patronymes. Sous le nom des Primitives, ils enregistrent plusieurs 45 tours sans succès, et tentent même de lancer une nouvelle danse, « The Ostrich », écrite par Lou Reed. Toutefois, des chansons plus ambitieuses artistiquement, Venus In Furs (titre du livre de Leopold Sacher Masoch publié en 1870) et Heroin, figurent déjà dans la liste des concerts. Le Velvet Underground va être enfin constitué quand un vieux complice, Sterling Morrison, guitariste fanatique de Bo Diddley et de Chuck Berry, rejoint la formation, bientôt suivi à la batterie, où elle remplace McLise, par une jeune femme austère, qui cultive un style primitif en jouant debout : Maureen « Mo » Tucker.

L'underground new-yorkais. Le 11 novembre 1965, dans le New Jersey, le groupe joue pour la première fois sous l'appellation Velvet Underground (d'après le roman policier sado-masochiste de Michael Leigh). Le maître du pop art, Andy Warhol, rencontré par l'entremise de Gerard Malanga au Café Bizarre, devient alors leur manager et leur offre une voix féminine, en la personne de Nico, égérie de l'underground new-yorkais. Il leur donne aussi une place dans son show multimédia Exploding Plastic Inevitable, présenté à New York en 1966. Le groupe s'installe à la Factory, le lieu de rencontres et de créations artistiques monté par Warhol, et enregistre son premier album, The Velvet Underground & Nico (1967), dont la célèbre pochette, dite « pochette à la banane », est réalisée par Warhol lui-même. Si le Velvet se présente comme un groupe d'avant-garde, pratiquant une musique brute pour un public de marginaux, artistes, drogués et travestis, et proposant des textes aux thèmes très crus (I'm Waiting For My Man, récit d'un drogué attendant son dealer), plusieurs chansons n'en laissent rien paraître : Sunday Morning, charmante ballade, All Tomorrow's Parties ou Femme Fatale restent de tendres et sages compositions aux accents pop. Après ce premier essai, le groupe se sépare de Warhol (ou peut-être l'inverse), délaisse Nico et publie White Light-White Heat (1968), un album tendu qui annonce déjà le punk tout en intégrant des phrases musicales venues du free jazz d'Ornette Coleman, avec la très belle composition Sister Ray.

Tensions et crises d'ego. Évincé par un Lou Reed égocentrique, John Cale est remplacé par Doug Yule, jeune bassiste plus classiquement rock. Outre V.U. (refusé par la MGM et sorti seulement en 1985), la formation enregistre en 1969 The Velvet Underground, qui contient entre autres les fameux Candy Says et Beginning To See The Light. L'année suivante, le groupe entre en studio à New York pour un quatrième album, Loaded, qui échappera en partie au contrôle de Lou Reed, démissionnaire du groupe à l'automne. Le disque contient quelques perles rock comme Rock'n'Roll ou Sweet Jane. Lors de l'enregistrement, Bill Yule (le frère de Doug) assure la batterie — Maureen Tucker étant enceinte. Bientôt, Sterling Morrison quitte à son tour le vaisseau, et le Velvet Underground s'effrite doucement. Mais Doug Yule tente cependant de palier toutes les absences, recrutant Walter Powers et William Alexander (futur Willie « Loco » Alexander), puis remplaçant Mo Tucker à la batterie par Ian Paice, un ex-Deep Purple. L'album Squeeze et une tournée anglaise achèvent l'agonie du Velvet Underground.

Quand le groupe éclate en 1972, il ne reste pas un seul des quatre membres originels dans la formation. Ceux-ci réapparaissent ensemble presque vingt ans plus tard.

Le 15 juin 1990, lors de l'inauguration de l'exposition Andy Warhol System, Pub, Pop, Rock à la Fondation Cartier de Jouy-en-Josas, Lou, John, Sterling et Mo entament un show-surprise, qui rend hommage à leurs amis disparus (Warhol en 1987, Nico en 1988). On retrouve le quatuor le 17 juin 1993 à l'Olympia de Paris et le 26 du même mois à l'hippodrome de Vincennes, en première partie de U2. Sterling Morisson décède à son tour en 1995.

Propulsé au rang de groupe-culte à titre posthume, le Velvet Underground a inspiré une foule d'artistes d'horizons bien différents des années 1970 et 1980. De David Bowie à Sonic Youth en passant par Patti Smith, Roxy Music, Jesus & Mary Chain ou, en France, Étienne Daho, tous applaudissent leur rock avant-gardiste, dont Reed dira, vingt ans plus tard, qu'il était simplement une « liberté : liberté d'écrire, de faire la musique et de vivre la vie qu'on voulait ».