symétrie

(latin symmetria, du grec summetria, de sun, avec, et metron, mesure)

PHYSIQUE

La notion de symétrie, dans son acception courante, est associée aux objets qui présentent des apparences identiques lorsqu'on les considère de divers points de vue. Ainsi, un cube parfait semble identique à lui-même quelle que soit celle de ses 6 faces que l'on envisage. La théorie physique étend ces considérations des objets aux lois physiques. Si un changement de référentiel (de point de vue) ne modifie pas l'expression d'une loi physique, la loi est dite invariante par rapport à la transformation considérée et cette transformation est une symétrie de la loi.

L'ensemble des transformations qui laissent invariante une loi physique possède une structure mathématique de groupe, et l'existence de la propriété d'invariance entraîne la conservation d'une grandeur physique donnée au cours de l'évolution du système. Ainsi, au groupe des symétries spatio-temporelles sont associées les grandes lois de conservation :

          

symétrie

grandeur
conservée

translation de temps

énergie

translations d'espace

quantité de mouvement

rotations d'espace

moment angulaire

Dans le cadre de la théorie quantique, on considère aussi des transformations qui, au lieu de dépendre continûment de certains paramètres, comme les symétries spatio-temporelles, sont discrètes. On distingue la réflexion d'espace, ou « parité », qui transforme un système en son image spéculaire (une main gauche en main droite, par exemple), le renversement du temps (comme dans un film passé à l'envers) et la conjugaison de charge, qui change le signe des charges (électrique, baryonique, etc.) d'un système. La combinaison de ces 3 symétries est elle aussi une symétrie, fondant l'existence des antiparticules. D'autres symétries, dites « internes », interviennent dans le cadre des théories de grande unification.

Pendant longtemps, les physiciens ont pensé que les lois de la symétrie ne pouvaient être transgressées dans la nature. Or, il existe une asymétrie flagrante entre la matière et l'antimatière dans l'Univers. Comment la symétrie s'est-elle brisée, comment la matière a-t-elle pu prendre l'avantage sur l'antimatière ? L'explication relève de la physique des particules. Selon les théories actuelles, la formation de la matière et de l'antimatière ne se fait pas selon un processus tout à fait équitable : il y a « violation » des lois de la symétrie. Ainsi, lors du big bang, il ne s'est pas formé exactement autant de matière que d'antimatière, mais un très léger excédent de matière. Cela a suffi pour assurer ensuite la « victoire » de la matière sur l'antimatière.

En 1956, deux physiciens américains d'origine chinoise, Chen Ning Yang et Tsung Dao Lee, ont émis l'hypothèse que l'interaction nucléaire faible pouvait briser la parité. Des travaux sur la désintégration d'atomes de cobalt en ont apporté peu après la confirmation expérimentale et les deux chercheurs ont reçu le prix Nobel dès 1957. La preuve était désormais apportée qu'il est possible de briser, au moins individuellement, les symétries fondamentales de la nature. Pourtant, une majorité de spécialistes considéraient encore comme intangible la symétrie combinée de charge et de parité, ou symétrie CP. Mais, en 1964, des expériences sur la désintégration de particules appelées kaons (ou mésons K), effectuées par les physiciens américains James Cronin et Val Fitch, établirent que cette symétrie pouvait aussi être brisée. Cette découverte a valu à ses auteurs le prix Nobel en 1980. Finalement, ce sont les physiciens japonais Makoto Kobayashi et Toshihide Maskawa qui ont bâti la théorie permettant d'expliquer la brisure de symétrie, à partir d'une idée proposée dès 1963 par l'Italien Nicola Cabibbo (né en 1935) sur le changement de certaines propriétés des quarks. Quant à la brisure spontanée de symétrie, par laquelle des systèmes instables et symétriques deviennent brusquement asymétriques, la théorie en a été fournie par l'Américain d'origine japonaise Yoichiro Nambu. Kobayashi, Maskawa et Nambu ont reçu conjointement le prix Nobel en 2008 pour leurs travaux, qui ont permis de conforter le modèle standard de la physique des particules subatomiques.