récit

LITTÉRATURE

Le récit a été opposé, en critique littéraire, au roman, pour définir deux régimes de la narration, correspondant à deux traitements du référentiel. Le récit est fondamentalement rétrospectif : l'événement rapporté a eu lieu et la narration le fait connaître, hors de l'exposé d'une dynamique interne des événements. Le récit resterait essentiellement conceptuel dans la mesure où, traitant d'un acquis, il serait inévitablement réflexif. Il s'identifie au conte et à la nouvelle, narrations paradigmatiques et apologétiques, dont la brièveté exclut précisément tout examen de l'événement en lui-même et dans son indétermination, apparente ou réelle. Aussi une typologie pure du récit, réalisée en particulier dans le conte merveilleux, exclut-elle une véritable représentation de l'agissement et atteste-t-elle toujours le primat, de droit, de l'événement sur les personnages. Le récit ignore l'histoire qui se fait. Il se tient à une législation de l'incident, qui n'interdit ni l'incertain ni le dramatique, placés sous le signe de l'épreuve, qui est proprement action juridique. Inversement, le roman considère l'événement en tant qu'il a lieu, ce qui n'empêche pas la fiction historique qui voit dans l'histoire non pas le révolu, mais la genèse.

Le récit correspond à une différenciation minimale des données spatio-temporelles, qui retrouvent cependant une importance dans le moment de l'énonciation. Dans le partage des pratiques littéraires, il introduit historiquement au roman, dans la mesure même où l'événement fonde l'épreuve et l'aventure. L'idée s'est imposée, en théorie littéraire contemporaine, que le récit présente la forme organique de toute narration, romanesque et non romanesque ; il se définit comme un texte référentiel avec temporalité représentée, passible d'une réduction formelle, qui n'est que la reprise, en données structurales, de son sémantisme juridique premier. À partir des acquis de l'analyse mythologique de Lévi-Strauss et de la systématique du conte folklorique merveilleux russe de Vladimir Propp, les analyses du récit décrivent un récit minimal par la conjonction de deux attributs, apparentés, mais différents : la conjonction est l'objet de la narration suivant un procès de médiation et de transformation. Quels que soient les détails de la détermination de la nature et du procès de la médiation, prévaut, dans la théorie, une logique de l'action, qui permet de tenir ensemble et le juridisme du récit premier et l'initiative casuistique du roman. Celui-ci se caractérise par l'adjonction de propositions facultatives mais dépendantes de la logique organique constitutive, et véritable brouillage de cette logique.