glaciaire

Glacier d'Aletsch, Suisse
Glacier d'Aletsch, Suisse

Époque (surtout du quaternaire) au cours de laquelle les glaciers se sont étendus.

Le retour plus ou moins régulier des périodes glaciaires est l'une des caractéristiques principales de l'histoire de la Terre. La plus récente, la glaciation quaternaire, a vu l'apparition de l'homme, dont l'évolution ne peut être dissociée de son environnement géologique et climatique.

D'après l'aspect de certains dépôts et la nature de certaines roches, les géologues ont pu identifier huit grandes périodes glaciaires. La plus ancienne connue remonte au précambrien, il y a environ 2 300 millions d'années, à une époque où n'existait qu'un seul continent, le Gondwana.

Même si les témoignages en sont peu nombreux, d'autres périodes glaciaires sont intervenues à des intervalles de temps assez réguliers. Les glaciations, qui ont modifié l'environnement, ont influencé l'évolution de la vie. Ainsi, la glaciation du carbonifère (vers − 280 millions d'années) semble avoir entraîné d'importantes modifications dans la vie végétale, comme l'atteste l'observation des fossiles : les calamites (sortes de prêles fossiles), si abondantes dans les dépôts houillers, ont alors presque complètement disparu. Cependant, les témoins des grandes périodes glaciaires sont difficiles à retrouver sur les terrains géologiques, et la plupart de nos connaissances résultent des travaux réalisés sur la dernière, celle qui vient de se produire, et dont on peut retrouver facilement les traces.

Approche générale

Les causes des glaciations

Les causes des glaciations résident à la fois dans l'astronomie et la géophysique : l'inclinaison de l'axe de la Terre varie, entraînant une modification des contrastes saisonniers ; les changements de l'excentricité de l'orbite et la précession des équinoxes y contribuent aussi (théorie de Milankovitch). Ces causes astronomiques restent insuffisantes tant qu'elles ne coïncident pas avec une configuration favorable des continents : la présence d'un continent au pôle, par exemple, favorise le développement des glaciers. Une fois entamé, ce développement se maintiendra par rétroaction positive. En effet, la glace augmente l'albédo de la Terre, et la température moyenne en sera abaissée. De plus, l'eau qui se trouve sous forme de glace a été soustraite aux océans, d'où une baisse de niveau sensible de ceux-ci et une augmentation parallèle de la surface des continents. Les échanges thermiques assurés par les courants marins en seront entravés d'autant, au profit de la glaciation. Enfin, pour les glaciations très anciennes, il faut tenir compte de la dérive des continents, qui joue un rôle essentiel.

Les problèmes de datation

La chronologie des glaciations est fort délicate à établir, chacune remodelant le terrain et effaçant ainsi le souvenir de la précédente. Il est heureusement possible de reconstituer l'évolution passée de la température moyenne des mers : les sédiments marins, par exemple, contiennent les restes de protozoaires dont certaines espèces sont adaptées aux mers chaudes. L'absence de ces espèces dans une couche traduit l'empreinte d'un âge glaciaire. Un autre indicateur, très important, est le rapport des isotopes de l'oxygène O18/O16 dans les coquillages de carbonate. Ce rapport varie avec la température et la salinité de l'eau. Chaque glaciation comporte elle-même des avances et des retraits successifs des glaciers. La plus récente époque glaciaire eut lieu au quaternaire (dans les deux derniers millions d'années), avec un sursaut il y a 10 000 ans environ.

La glaciation quaternaire

Cette glaciation s'est mise en place progressivement, à la suite de modifications climatiques majeures à l'échelle de la Terre. Ainsi, l'inlandsis antarctique commence à se constituer il y a 20 millions d'années, en relation avec l'amorce de refroidissement du miocène supérieur, mais ce n'est qu'au début du pliocène (− 5,3 millions d'années) qu'il recouvre tout ce continent. Dans l'hémisphère Nord, les recherches ont montré que la mer du Labrador présente de premières conditions glaciaires vers − 3,4 millions d'années ; entre − 3 et − 2 millions d'années, de grandes surfaces continentales se couvrent de glace, et une toundra s'installe à leur bordure. Sur le pourtour de la Méditerranée, la forêt régresse, ce qui témoigne de la diminution des précipitations. Les glaciations se sont donc mises en place très lentement ; de plus, selon la latitude et les continents, elles ne se sont pas déroulées au même moment.

Les différentes phases glaciaires du quaternaire

Cette extension des inlandsis vers les latitudes moyennes ainsi que le développement des glaciers montagnards ont connu ensuite de multiples fluctuations : durant les deux derniers millions d'années, on ne distingue pas moins de 17 cycles complets (glaciations et périodes interglaciaires) différents. L'alternance des phases glaciaires et des phases interglaciaires, au cours desquelles le froid s'atténue, se traduit par des variations importantes dans l'extension des glaciers et par des oscillations du niveau des océans. De plus, chaque phase glaciaire a elle-même connu des fluctuations climatiques d'importance mineure (stades et interstades), ce qui complique la lecture des géologues et des climatologues.

La dernière phase glaciaire

La dernière phase glaciaire, de − 110 000 à − 10 000 ans, appelée würm dans les Alpes, est la mieux connue. Elle fait suite à une période interglaciaire, appelée riss-würm ou éémien, qui a duré de − 130 000 à − 100 000 ans.

Avant le würm, trois autres phases de glaciation quaternaires sont bien repérées dans les Alpes : le riss (de − 200 000 à − 130 000 ans), le mindel (de − 700 000 à − 300 000 ans) et le günz (de − 1 200 000 à − 800 000 ans). Ces glaciations sont séparées par trois périodes interglaciaires que caractérise un très fort retrait des glaciers, accompagné d'un réchauffement du climat, qui s'accompagna d'une transgression marine – les mers remontant les vallées – telle que la Scandinavie devint une île

Le würm

Cette phase glaciaire peut se subdiviser en deux stades glaciaires, le würm ancien et le würm récent, séparés par une période de réchauffement (de − 50 000 ans à − 25 000 ans), où les inlandsis se sont retirés de plusieurs centaines de kilomètres. La Norvège centrale, alors occupée par des mammouths, était libre de glace.

Au würm récent, de − 25 000 à − 18 000 ans, le refroidissement fut maximal : le niveau marin descendit jusqu'à 120 m au-dessous de celui que nous connaissons actuellement, et la température moyenne globale était de 4 à 5 °C inférieure.

De − 18 000 à − 5 000 ans, le climat s'est progressivement réchauffé, avec une interruption de − 11 500 à − 10 500, période au cours de laquelle le froid s'est brutalement réinstallé.

La déglaciation se manifeste par la fonte totale ou partielle des inlandsis et des glaciers montagnards, ainsi que par la remontée du niveau marin jusqu'au zéro actuel. Allégées par la fonte des inlandsis, des étendues continentales ont subi un mouvement isostatique : la Scandinavie s'est ainsi relevée de plus de 200 m, en moyenne, en 10 000 ans. Dans le nord de l'Europe, on désigne sous le nom de transgression flandrienne la remontée du niveau des océans qui marque la fin des périodes glaciaires et le début de l'holocène. La période interglaciaire dans laquelle nous vivons est anormalement chaude à l'échelle du quaternaire : les inlandsis sont limités au Groenland et à l'Antarctique, et les glaciers alpins se sont retirés dans les plus hautes vallées ; les Vosges, le Massif central, la Corse, les Carpates ont été totalement déglacés.

Les changements d'environnement

L'un des traits majeurs du quaternaire est l'extension des glaciers, portés depuis 1,65 million d'années par les continents de l'hémisphère Nord et les hautes montagnes, et leur résorption partielle lors des périodes interglaciaires.

Les inlandsis

Dans les deux hémisphères, d'énormes calottes glaciaires, appelées inlandsis, centrées sur les régions polaires, s'étendaient sur des dizaines de millions de kilomètres carrés submergeant tous les reliefs : elles atteignaient des régions bénéficiant actuellement de climats tempérés.

L'inlandsis nord-américain, le plus vaste de l'hémisphère Nord, recouvrait l'Alaska, le Canada ainsi que le nord des actuels États-Unis ; il s'avançait jusqu'au site de New York, plus proche de l'équateur que du pôle Nord. À cet inlandsis continental s'accolait celui du Groenland, de plus de 3 000 m d'épaisseur. En Europe, l'inlandsis scandinave coiffait la moitié septentrionale du continent, jusqu'aux îles Britanniques et à la plaine germano-polonaise. Dans l'hémisphère austral, l'inlandsis antarctique était le plus étendu de la planète ; un peu plus vaste qu'aujourd'hui, il dépassait en certains points 4 000 m d'épaisseur.

Les glaciers de montagne

À des latitudes moins élevées, le refroidissement du climat était insuffisant pour entraîner la formation de glaciers à basse altitude. Seules les régions montagneuses étaient envahies par des langues glaciaires, qui débordaient par endroits sur les plaines environnantes : le glacier du Rhône, durant la glaciation du riss, s'est avancé jusqu'à Lyon, à près de 100 km du front montagneux. Ces glaciers montagnards représentaient cependant moins d'un dixième du stock de glace de la planète. Beaucoup moins épais, vastes et continus que les inlandsis, les glaciers se sont développés dans toutes les montagnes du monde (Rocheuses, Pyrénées, Alpes, Himalaya, montagnes du Caucase, de Tasmanie, de Nouvelle-Zélande…), jusqu'aux latitudes équatoriales où ils descendaient au-dessous de 4 000 m (Andes, Kilimandjaro, Nouvelle-Guinée…).

Les régions périglaciaires

Lors de l'extension considérable des régions soumises à des climats froids, l'ensemble de la circulation atmosphérique et les zones climatiques du globe se trouvaient modifiés. Au-delà des inlandsis s'étendaient des régions dites périglaciaires, dépourvues d'arbres et soumises au gel une bonne partie de l'année ; elles étaient parcourues de vents froids, responsables du transport de fines poussières et du dépôt de lss.

À des latitudes plus basses, les changements climatiques se traduisaient par des variations de la pluviométrie, avec une alternance de périodes humides et de périodes arides ; les zones arides couvraient des superficies encore plus importantes qu'aujourd'hui.

Le niveau des océans

En raison du stockage d'énormes quantités d'eau gelée dans les inlandsis (50 millions de kilomètres cubes contre 30 millions aujourd'hui), le niveau général des océans était, en phase glaciaire, plus bas qu'actuellement. Au maximum de la glaciation quaternaire la plus récente, il y a 18 000 ans, une régression marine amena le niveau des océans à 120 m au-dessous du niveau actuel. Par exemple, l'entrée de la grotte Cosquer (près de Cassis), grotte qui est ornée de peintures et de gravures, est actuellement immergée par 37 m de profondeur.

Les plates-formes continentales étaient en partie émergées. Plus étendus, les continents avaient des contours différents : les actuelles îles Britanniques n'étaient pas isolées du continent européen et il était possible d'aller à pied sec de Sibérie à l'Alaska (par l'actuel détroit de Béring). En outre, de grandes portions des océans étaient transformées en banquise, comme l'Atlantique Nord jusqu'à la latitude de l'Écosse.