documentaire

Film, à caractère didactique ou culturel, visant à faire connaître un pays, un peuple, un artiste, une technique, etc.

CINÉMA

Le genre apparaît dès les débuts du cinéma (la Sortie des usines Lumière, 1894) et, jusque dans les années 1920, le film d'expédition ou de voyage domine. Cependant, la Première Guerre mondiale ouvre de nouvelles perspectives : l'information et la propagande. Il faut toutefois attendre que le cinéma de fiction élabore son propre langage pour que le film documentaire se définisse par rapport à lui. Grâce à Robert Flaherty (Nanouk l'Esquimau, 1922), à Dziga Vertov (Ciné-œil, 1924 ; l'Homme à la caméra, 1929), à Alberto Cavalcanti (Rien que des heures, 1926) notamment, ce genre accède à un style propre, marqué par l'utilisation des différents procédés de montage.

Les écoles de documentaristes

Les courants d'avant-guerre

Le courant documentariste britannique, amorcé en 1929 par John Grierson, constitue la première grande école du genre. Dotée d'une vision politique réformiste, elle se propose de donner une image organisée de la réalité en créant un langage sociologique et esthétique adéquat.

Dans les années 1930-1940, quelques cinéastes indépendants tournent des documentaires qui comptent parmi les meilleurs films de leur époque : Luis Buñuel avec Terre sans pain (1932) ; Joris Ivens avec Terre d'Espagne (1937) ; Georges Rouquier avec Farrebique (1946). En Allemagne, il existe aussi une forte tradition documentaire, mais elle est bientôt utilisée aux seules fins de la propagande nazie, comme en témoignent les productions de Leni Riefenstahl notamment.

Les courants d'après-guerre

Après la Seconde Guerre mondiale, le film d'art se développe et vise à vulgariser la culture (le Mystère Picasso, Henri Georges Clouzot, 1956). Au cours des années 1950, le Canada, les États-Unis et la France renouvellent la conception et la finalité du documentaire en créant le « cinéma-vérité ». Celui-ci a pour chefs de file Georges Franju (le Sang des bêtes, 1949 ; Hôtel des Invalides, 1952), Georges Rouquier (Lourdes et ses miracles, 1954), l'ethnologue Jean Rouch (Moi, un Noir, 1958 ; Jaguar, 1967), le Canadien Pierre Perrault (Pour la suite du monde, 1963).

À la même époque, en Grande-Bretagne, le free cinema (« cinéma libre ») traite sans emphase la réalité des gens simples à travers les films de Karel Reisz, de Lindsay Anderson ou de Tony Richardson. Après les événements de mai 1968, le documentaire devient un instrument de lutte militante, comme aux États-Unis avec les premiers films de Frederick Wiseman (High School, 1968 ; Hospital, 1970).

Le cinéma de montage, depuis le Nuit et Brouillard d'Alain Resnais (1955), retrouve une nouvelle jeunesse avec Marcel Ophuls (le Chagrin et la Pitié, 1969), Frédéric Rossif (la Fête sauvage, 1976), Raymond Depardon (Reporters, 1981) ou Claude Lanzmann (Shoah, 1985). Chris Marker, auteur de documentaires subjectifs, leur confère une exigence formelle (Sans soleil, 1983).

Le documentaire contemporain

Dans les années 1990, le documentaire aiguise son regard social à l'exemple de ceux de Nicolas Philibert (le Pays des sourds, 1993 ; la Moindre des choses, 1996). Le Suisse Richard Dindo signe deux remarquables portraits à base de documents et de témoignages : Arthur Rimbaud – Une biographie (1991) et Ernesto Che Guevara – Journal de Bolivie (1994). Sa compatriote, Jacqueline Veuve, poursuit dans une perspective ethnologique une exploration des traditions de son pays. Aux États-Unis, Frederick Wiseman amasse les témoignages imposants sur l'American Way of Life (Zoo, 1992 ; High School II, 1994 ; Ballet, 1995).

Avec la multiplication des chaînes de télévision, le documentaire ne se diffuse plus que rarement dans les salles de cinéma. Les documentaires animaliers et les films de voyage sont prépondérants dans les programmes. À la télévision, également, se répand le genre spécifique du docu-fiction, dans lequel des événements réels sont scénarisés et interprétés par des acteurs ou reconstitués en images de synthèse (l'Odyssée de l'espèce, Jacques Maleterre, 2002).

Cependant, le genre documentaire reçoit en 1995 une consécration inattendue : la création d'une catégorie spéciale pour les nominations aux Oscars. En France en 2002, le documentaire de Nicolas Philibert Être et Avoir remporte un succès record. Autre consécration retentissante : celle que le Festival de Cannes apporte, en 2004, à Fahrenheit 9/11, diatribe de Michael Moore contre l'administration du président G. W. Bush.