Pères de l'Église

Saint Jérôme
Saint Jérôme

Anciens écrivains chrétiens qui, par leurs œuvres, la valeur de leur doctrine, font autorité en matière de foi.

Le titre de « Pères de l'Église » a été attribué à certains auteurs chrétiens qui ont : 1. vécu durant les premiers siècles du christianisme ; 2. vécu en état de sainteté ; 3. professé la doctrine chrétienne dans leurs écrits ; 4. reçu l’approbation de l’Église.

La patrologie désigne l'ensemble de la production littéraire de ces Pères de l'Église, dont aucune liste n’a officiellement été établie. Ils peuvent être distingués en fonction de leur ancienneté (cas des Pères apostoliques), de leurs écrits (cas des Pères apologistes), de leur langue de rédaction, de leur région d’apostolat, etc.

Les Pères apostoliques

Les plus anciens Pères de l’Église (tels Clément de Rome, Ignace d'Antioche et Polycarpe de Smyrne) ont été contemporains des apôtres, et sont en cela appelés « Pères apostoliques » ; leurs écrits – notamment la Didakhê, ou Doctrine des douze Apôtres – sont un précieux témoignage de la vie et de la foi des premières générations chrétiennes.

Les Pères sous la persécution

Devant l'opposition croissante à la religion nouvelle, les chrétiens – persécutés par les empereurs, objets des basses calomnies du peuple et de la réaction intellectuelle des milieux cultivés – s'efforcent de réfuter ces attaques et de justifier rationnellement leur foi. L'abondante littérature apologétique des premiers siècles est, pour une bonne part, l'œuvre d'écrivains laïques, souvent philosophes convertis, tel Justin, « philosophe et martyr ». Ce Grec, originaire de Flavia Neapolis, en Samarie, a été martyrisé à Rome en 165. Ses deux Apologies (vers 155-161) comportent les thèmes déjà classiques de l'apologétique, mais aussi un exposé de l'ensemble de la foi chrétienne et une démonstration de la divinité de Jésus d'après les prophéties. Son Dialogue avec Tryphon s'efforce de démontrer la caducité du judaïsme, auquel doit désormais se substituer l'Église du Christ, qui appelle à elle toutes les nations.

Les Pères ayant lutté contre la gnose

Au IIe s., l'Église chrétienne s’attache à combattre la gnose. Effort de connaissance religieuse indépendante de la foi, la gnose évacue tout le contenu de la Révélation pour y substituer, sous un vocabulaire chrétien, un ensemble de mythes empruntés à la spéculation juive et au mysticisme gréco-oriental. Saint Irénée est le représentant le plus actif de la réaction orthodoxe contre les gnostiques, et l'un des principaux Pères des trois premiers siècles. Originaire d'Asie Mineure et disciple de saint Polycarpe, par lequel il se rattache à la tradition de Jean l'Évangéliste, il se rend à Rome où il rencontre Justin, puis en Gaule où, après la persécution de 177, il devient évêque de Lyon.

Avec la Démonstration de la prédication apostolique, courte catéchèse, il ne reste de lui que la Démonstration et réfutation de la fausse gnose (Adversus Haereses), en cinq livres, publiés en plusieurs fois aux environs de 180. La théologie chrétienne lui doit quelques-unes de ses thèses les plus fondamentales, répandues en Occident par Tertullien et en Orient par Athanase.

Les « écoles » théologiques

Le iiie s. voit se dessiner des courants de pensée, de véritables écoles de théologie. Les Pères ont à faire face, non seulement à une contre-Église comme le gnosticisme, mais à des tentatives (schismatiques) pour expliquer rationnellement le dogme. Parmi les grands auteurs qui se mobilisent contre les hérésies naissantes figurent Hippolyte à Rome, Cyprien et surtout Tertullien en Afrique. Ce dernier, mort en 222, est le fondateur de la théologie latine. Elle lui doit, en effet, la première esquisse de ses thèses fondamentales (Trinité, Incarnation, sacrements).

À cette époque, la théologie d'Alexandrie fait figure d'école originale et constitue même, avec Origène, une école théologique à proprement parler. Origène (mort vers 252-254) transforme l'école catéchétique d'Alexandrie en un établissement de haut enseignement scripturaire et théologique. De ce qui reste de ses œuvres, quelques ouvrages seulement ont été conservés dans le grec original (Commentaire sur saint Jean, Contre Celse), le reste (Peri Archon, la plupart des Homélies) nous étant parvenu dans les traductions latines de Rufin.

Les Pères de la paix de l'Église

Après la grande persécution de Dioclétien (303-311), les édits de Constantin et de Licinius (313) rendent la paix à l'Église. On voit alors s'élaborer une culture chrétienne, et le ive s. connaît un important épanouissement littéraire. Au plan doctrinal, le ive s. est dominé par l'arianisme, tentative de la pensée hellénique de rationaliser le christianisme. Saint Athanase, patriarche d'Alexandrie de 328 à 373, est la grande figure du concile de Nicée, qui condamne l'arianisme. Son œuvre majeure est un traité en trois livres : Contre les ariens.

D'un autre côté, les grands docteurs cappadociens, héritiers de la tradition d'Origène, élaborent une théologie de la Trinité. Ce sont saint Basile le Grand (mort en 379), son frère cadet saint Grégoire de Nysse (mort vers 394), surnommé « le Mystique », et saint Grégoire de Nazianze (mort vers 390), considéré par l'Église grecque comme « le Théologien ». Parallèlement, à Antioche, Jean Chrysostome (mort en 407) et Théodoret de Cyr (mort vers 466) représentent une tendance différente, caractérisée par une exégèse plus littérale et « scientifique », une théologie plus rationalisante et moralisante.

Les Pères latins

À la même époque, les Pères latins sont moins spéculatifs que les Grecs, également moins originaux, à l'exception de saint Augustin. On retiendra les noms de saint Hilaire de Poitiers (mort en 367), surnommé l'Athanase de l'Occident, de saint Ambroise (mort en 397), évêque de Milan ayant esquissé une théologie de l'État chrétien, et de saint Jérôme (mort en 419-420), auquel on doit plusieurs traductions d'Eusèbe, d'Origène et surtout la refonte de la traduction latine de la Bible : la Vulgate.

Saint Augustin est sans conteste le plus grand des Pères latins. On connaît les grandes étapes de sa vie, dont les Confessions (397-401) nous racontent la première partie : la jeunesse à Tagaste, à Rome, à Milan, la crise qui aboutit à la conversion et au baptême (387), le sacerdoce (391) et l'épiscopat (396) à Hippone, la mort (430) dans la ville assiégée par les Vandales. Héritier de la culture philosophique antique, rhéteur autant que prédicateur populaire, il joue un rôle décisif dans l'élaboration, en Occident, d'une culture et d'une civilisation chrétiennes (la Cité de Dieu, 413-426).

La fin de l'âge patristique

Au ve s., le déclin de la culture s'accentue rapidement ; miné par les invasions barbares, l'Empire se désagrège ; le fossé entre l'Orient et l'Occident se creuse. L'Orient est divisé par des controverses dogmatiques, compliquées de rivalités politiques et nationales qui annoncent le déchirement de la chrétienté. Ces débats sont dominés par deux grandes figures : saint Cyrille d'Alexandrie (mort en 444), « le sceau des Pères », qui termine l'âge d'or de la patristique en Orient, et le pape saint Léon le Grand (mort en 461).