Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Roland-Manuel (Roland Alexis Manuel Lévy, dit)

Compositeur, musicologue et pédagogue français (Paris 1891 – id.1966).

Il prit ses premières leçons de violon à Liège où il passa plusieurs années de sa jeunesse ; puis il entra à Paris à la Schola cantorum, où il fut l'élève d'Albert Roussel et de Serieyx. Il fut, d'autre part, l'un des rares élèves de Maurice Ravel, dont il devint le biographe et l'exégète (Maurice Ravel et son œuvre, 1914 ; Maurice Ravel, 1938, 2e éd. 1948, Ravel par quelques-uns de ses familiers, Paris, 1939). Il était également un proche ami du groupe des Six. Son œuvre musicale (Trio à cordes, 1917 ; Suite dans le goût espagnol pour orchestre de chambre, 1938 ; œuvres chorégraphiques, mélodies) porte l'influence de Ravel. D'origine israélite, il se convertit au catholicisme et s'attacha comme oblat à l'ordre des bénédictins. Humaniste d'une rare culture, il anima à la radio l'émission Plaisir de la musique qui prit en 1945 la succession d'une émission similaire d'Émile Vuillermoz. En 1947, il fut nommé professeur d'esthétique musicale au Conservatoire de Paris, classe qu'il partageait avec Marcel Beaufils. Aux éditions Gallimard, il dirigea une collection musicale et la réalisation d'une Histoire de la musique (2 vol., 1960-1963).

Rolland (Romain)

Écrivain français (Clamecy 1866 – Vézelay 1944).

La place de la musique dans la vie et l'œuvre de Romain Rolland est tout à fait prépondérante : non content d'avoir développé en France, par le biais notamment de ses cours à l'École normale supérieure, la science musicologique, il écrivit une douzaine d'ouvrages consacrés à des genres ou des compositeurs (Histoire de l'opéra avant Lulli et Scarlatti, 1895 ; Musiciens d'autrefois, musiciens d'aujourd'hui, 1908 ; Vie de Beethoven, 1903 ; Voyage musical au pays du passé, 1919 ; les quatre tomes de Beethoven, les grandes époques créatrices, 1928-1944), et confia à son héros Jean-Christophe, lui-même compositeur, le soin de ranimer la conscience de ses concitoyens par un nouvel idéal musical.

   C'est en effet prioritairement à la musique allemande que s'intéresse Rolland et, au-delà, à l'âme allemande. La « musique aimante », « musique mère », « musique maîtresse », est présentée comme « la seule source profonde où (il a) puisé une connaissance presque charnelle de l'âme germanique ». De fait, Rolland n'alla que peu outre-Rhin, et ses rares voyages, dont un à Bayreuth, lui furent pénibles tant la lourdeur et la vulgarité servile des Allemands blessaient l'idéal qu'il avait de leur culture.

   Car cet esprit fasciné par l'humanisme de « l'Allemagne éternelle du cœur », désireux d'infuser dans la pensée logique française la masse de sentiments obscurs éveillés par la musique allemande, était en même temps fort lucide, tout à la fois quant aux méfaits d'un esprit revanchard et exterminateur (l'époque, de 1870 à 1914, puis dans les années 30, s'y prête), et quant à l'évolution qu'il constate en Germanie. Si donc il stigmatise Mahler, « bric-à-brac » opulent et criard », et Richard Strauss, « barbare et décadent », auteur de « chefs-d'œuvre odieux » trempés à l'encre de Hofmannsthal, ce « neurasthénique » " impuissant », « hystérique », « névrosé », « dégénérescent », s'il vomit Wagner et les Associations Wagner, c'est qu'il y voit les symptômes d'un besoin grégaire masqué sous les oripeaux d'un faux idéalisme, d'un respect hypnotique de la force s'épanchant en contentements de soi d'une mélancolie fade. Le problème allemand, qu'il soit culturel ou politique, lui paraît toutefois devoir s'insérer dans un ensemble plus vaste touchant à la décadence morale de l'Europe tout entière. Il en rend responsables « la crise des volontés, la neurasthénie, l'abdication de l'intelligence, elles-mêmes conséquences de l'introduction de la pensée nordique » dont l'Allemagne porte le poids, avec le constat schopenhauerien et wagnérien de la vanité de la lutte pour la vie, la nostalgie qu'ils véhiculent d'un nirvana où la volonté n'est plus ; le pressentiment tragique de cette nourriture et de la guerre imminente fait reconnaître à Rolland, derrière l'ivresse de la puissance qui habite l'Allemand, « Mars-commis voyageur », l'incertude du vouloir.

   Mais ses appels antiprussiens à une régénération de la véritable âme allemande, celle de la fin du XVIIIe siècle, dénoncés en France comme les traîtrises d'un germanophile enragé, n'eurent outre-Rhin qu'un faible écho, tant on était là-bas habitué à de telles exhortations, lesquelles y revêtaient un sens tout différent. Au soir de sa vie, Rolland eut la douleur d'assister à un second soubresaut de la volonté wilhelminienne remise au goût d'une Allemagne éternelle bien éloignée de celle qu'il appelait de ses vœux.

Röllig (Karl)

Compositeur et instrumentiste allemand (Hambourg ? – Vienne 1804).

Il se fit une spécialité de l'harmonica de verre inventé par B. Franklin, qu'il perfectionna et dont il devint le plus grand virtuose. À partir de 1791, il vécut à Vienne.

Roman (Johan Helmich)

Compositeur suédois (Stockholm 1694 – Haraldsmala 1758).

Surnommé Den svenska musikens fader (« le père de la musique suédoise »), d'origine finlandaise, enfant prodige, violoniste dans l'Orchestre royal, il étudie ensuite en Angleterre (1715-1721) où on le surnomme « The Swedish Virtuoso ». De 1721 à 1735, il est appelé à diriger l'Orchestre royal de Suède, après quoi il voyage en Angleterre, en France, en Italie et rejoint son pays en 1737, après s'être arrêté en Autriche et en Allemagne. À partir de 1740, le triomphe de l'opéra, la mort de sa deuxième femme et celle de sa protectrice la reine Ulrika Eleonore le contraignent à se retirer dans le sud du pays où il continue de composer jusqu'à sa mort.

   Son œuvre (près de 400 numéros) comprend surtout de la musique instrumentale ; il s'y affirme très proche de Haendel qu'il avait rencontré à Londres, et il laisse des sinfonie, 3 concertos pour violon, des concertos pour hautbois, des sonates (13 en trio, 12 pour flûte, violon et clavecin, 12 pour clavecin), des pièces pour violon seul (Assaggi a violino solo, 1740) et une monumentale suite pour orchestre, Drottningholmsmusiken (1744) en 24 mouvements, écrite pour le mariage de Lovisa Ulrika et Adolf Fredrik de Hesse, roi de Suède. Dans le domaine vocal, peu attiré par l'opéra, Roman s'est surtout consacré à la musique religieuse.