Journal de l'année 1er juillet - 31 décembre 1982 1982Éd. 1982

Marché commun

La crise renforce les tensions

La Communauté européenne continue de vivre, en 1982, sur un acquis de plus en plus fragile, au fur et à mesure que l'aggravation de la crise renforce les tendances centrifuges Les événements qui se succèdent mettent les Dix à rude épreuve. Ils s'en sortent jusqu'ici par des subterfuges, ou des tours de passe-passe, comme on le voit à propos du vote du budget (Journal de l'année 1981-82).

Mais les différends commerciaux et les désordres monétaires ne trouvent toujours pas de solution satisfaisante, même si le SME tient contre vents et marées. La révision de la politique agricole commune est remise une fois encore à plus tard, mais les divergences de vues manifestées lors de la discussion sur le financement de la CEE menacent de bloquer le processus décisionnel et compromettent les négociations sur l'élargissement, destinées à faire entrer l'Espagne et le Portugal dans la Communauté.

Sidérurgie

Le Parlement européen adopte en juillet 1982 une résolution définissant son attitude à l'égard de la réforme des traités actuels et de la réalisation de l'union européenne. Cette prise de position concerne en particulier la description des tâches de l'union, le financement de celle-ci et la définition d'un nouvel équilibre des responsabilités entre les institutions communautaires. Le Parlement européen envisage d'examiner un projet complet de nouveau traité en 1983.

Le principal obstacle au progrès de l'union reste la situation économique et sociale. La reprise économique attendue pour le deuxième semestre de 1982 n'a pas eu lieu. Les perspectives pour 83 ne sont pas encourageantes, puisqu'elles font état d'une croissance zéro. La Commission propose au Conseil de coordonner les politiques économiques et de prendre des mesures axées sur le développement des investissements et de la technologie, une plus grande souplesse dans les salaires, une amélioration de la rentabilité des entreprises et une sévérité accrue en matière de dépenses publiques.

Dans le domaine de l'emploi, une réorganisation du temps de travail doit être accomplie, avec une amélioration de la situation pour l'embauche des jeunes.

Sur le plan industriel, la décision la plus importante concerne la restructuration de la sidérurgie. La Commission décide le 24 novembre 1982 de bloquer l'ensemble des aides envisagées par les Dix, après avoir constaté que les réductions de capacité proposées par le gouvernement représentent seulement 14 millions de t au lieu des 30 à 35 millions qui seraient nécessaires.

La France est autorisée à libérer une tranche de 19,7 milliards de F en faveur d'Usinor et de Sacilor. Mais, devant la dégradation du marché de l'acier, la Commission demande le 14 décembre une nouvelle réduction de la production au cours du premier trimestre de 1983, de 5 % pour les produits longs et jusqu'à 15 % pour les produits plats. Par ailleurs, la Commission suggère plusieurs mesures en faveur de la conversion des régions en déclin.

Le principal échec du deuxième semestre réside dans l'impossibilité d'accomplir des progrès vers un véritable marché intérieur et dans la prolifération des mesures nationales visant à réduire plus qu'à libérer la circulation des marchandises et des services dans le cadre du marché intérieur. La décision spectaculaire prise par la France, le 20 novembre, d'opérer à Poitiers le dédouanement des magnétoscopes suscite dès le lendemain une intervention de la Commission qui exprime à Paris « ses vives inquiétudes ».

La Commission demande à la France, début décembre, de revenir sur sa décision. Il s'ensuit une querelle entre Paris et ses partenaires, le gouvernement français demandant au Conseil européen de mettre sur la table l'ensemble du dossier relatif au protectionnisme. Mais la France n'est pas suivie sur cette voie et se retrouve isolée.

Fusions

Autre exemple montrant la difficulté de parvenir à une intégration des politiques : le projet de fusion entre la firme allemande Grundig et la société nationalisée Thomson. Malgré l'accord des protagonistes, le gouvernement de Bonn tente d'éviter la fusion, qui se ferait en avril 1983, et de trouver une solution purement nationale aux difficultés qui avaient jeté l'entreprise d'outre-Rhin dans les bras d'une société d'État française.