Autriche et Europe centrale

Le ralentissement de l'intégration européenne

Malgré le développement de la coopération dans le cadre du « partenariat pour la paix » et les nombreuses déclarations des hommes politiques occidentaux, la question de l'adhésion des anciens pays communistes à l'OTAN reste toujours ouverte. Aucune date précise n'est avancée cette année. Les dirigeants russes s'opposent désormais ouvertement à l'idée de l'élargissement de l'OTAN, y compris pour l'Autriche. Tout au long de l'année, Moscou ne cesse de durcir sa position, brandissant même la menace d'une éventuelle « Troisième Guerre mondiale » en cas de décision prématurée. Dans l'attente d'un nouveau pas, de nouvelles alliances se constituent. Une coopération militaire plus étroite s'établit entre la Pologne et la République tchèque, qui sont les deux pays les mieux placés pour rejoindre l'OTAN dans un avenir proche.

La perspective de l'adhésion à l'Union européenne ne se rapproche pas. Aucune décision importante ne devrait être prise avant la conférence intergouvernementale « Maastricht II », prévue pour 1996. Les présidences de la France et de l'Espagne, plus préoccupées par des rapprochements avec les pays de l'espace méditerranéen, ne sont pas favorables aux pays d'Europe centrale. On leur rappelle d'ailleurs, au sommet de Cannes, en juin, qu'ils ne sont pas les seuls candidats à une future adhésion et que les conditions d'accès ne sont pas faciles à remplir. Sous la pression de l'Allemagne, l'Union européenne décide toutefois de reconduire jusqu'à la fin du siècle son programme d'assistance aux pays de l'Europe de l'Est en transition (PHARE, Pologne-Hongrie : assistance à la restructuration des économies).

Autriche

L'adhésion de l'Autriche à l'Union européenne crée plus de problèmes que prévu. D'après les sondages, seulement un tiers des Autrichiens voterait pour l'adhésion aujourd'hui. La grande majorité de la société est profondément déçue. La baisse des prix qui devait intervenir après l'intégration n'a pas été significative et trois habitants sur quatre sont désormais hostiles à la monnaie unique européenne. Sur le plan social, la situation ne se stabilise pas non plus. Les crimes racistes et les attentats au colis piégé continuent.

Mais c'est dans le domaine politique que l'adhésion du pays à l'UE a les plus lourdes conséquences. Tout au long de l'année, les deux partis de la coalition, le Parti social-démocrate (SPÖ) et le Parti populiste (ÖVP), entretiennent une rivalité de plus en plus affirmée sur la question de l'Europe. L'absence de consensus empêche de fixer une date pour l'organisation des élections au Parlement européen. Cette concurrence tourne au conflit ouvert entre le président Thomas Klestil et le chancelier Franz Vranitzky pour savoir qui est habilité à représenter le pays à Bruxelles. Les deux partis de la coalition gouvernementale se disputent le droit d'être le principal organisateur de la conférence des chefs d'État européens prévue à Vienne pour 1996.

Les remaniements au sein du gouvernement intervenus au mois de mai n'apaisent pas les conflits. Le vice-chancelier Wolfgang Schüssel, chef de l'ÖVP, utilise toutes les occasions pour affaiblir la position du chancelier Franz Vranitzky, leader des sociaux-démocrates et chef du gouvernement depuis neuf ans. Le conflit entre les deux hommes se cristallise à l'automne autour du débat budgétaire, ce qui conduit à la chute du gouvernement et à l'organisation d'élections anticipées. N'ayant pas duré un an, c'est le plus bref gouvernement autrichien qui ait existé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

La crise de la coalition ne s'explique pas seulement par les ambitions politiques, mais aussi par une question de fond quant à l'avenir du pays. Pour respecter les exigences du traité de Maastricht, l'Autriche est obligée de réduire son déficit budgétaire (plus de 5,5 % du PIB actuellement) et son endettement. Pour satisfaire leur électorat, les sociaux-démocrates veulent éviter à tout prix le démantèlement du système de protection sociale. Les populistes, pour les mêmes raisons, bloquent tout projet d'augmentation des impôts. Les controverses sur le budget ne sont pas quelque chose de nouveau en Autriche. En 1994, un compromis ne satisfaisant personne n'avait pu être trouvé qu'au dernier moment, ce qui avait déjà montré la fragilité de la coalition.