L'implantation des dix-huit silos enfermant des missiles nucléaires sur le plateau d'Albion avait provoqué une levée de boucliers dans la population locale. L'éventualité d'un abandon du site par l'armée dans les dix ans à venir ne laisse pas d'inquiéter. Le départ de 2 500 aviateurs et civils mobilisés par le 1er groupement de missiles stratégiques (GMS) représente une véritable menace économique tellement la cohabitation s'est imposée. C'est plus de 210 millions de francs par an que les militaires et leurs familles dépensent sur place et injectent dans l'économie locale.

Les travaux du TGV-Méditerranée commencent. En l'an 2000, Marseille sera à 3 heures de Paris.

Rhône-Alpes

Les élections municipales donnent à Raymond Barre (UDF) l'occasion de s'enraciner un peu plus dans la vie régionale. Élu maire de Lyon, tout en n'arrivant en tête que dans six des neuf arrondissements, il se fait élire trois mois plus tard à la tête de la Communauté urbaine de Lyon (COURLY), dirigeant ainsi une collectivité regroupant 55 communes, dolée d'un budget de 5,2 milliards de francs. À Grenoble, l'autre métropole de Rhône-Alpes, la gauche retrouve la gestion d'une ville qu'elle avait dû abandonner pendant douze ans. Michel Destot (PS) succède à Alain Carignon (RPR), mis en examen et écroué pendant deux cent trois jours pour corruption, qui ne se représente pas. R. Barre à Lyon, comme M. Destot à Grenoble décident de jouer l'ouverture et le rassemblement.

Tandis que les écologistes et les associations de résidents continuent à se mobiliser pour retarder, voire empêcher la réalisation d'un axe routier à grand trafic dans la vallée de Nevache, Édouard Balladur signe, quelques jours avant de quitter l'hôtel Matignon, un décret instituant le parc naturel régional de la Chartreuse. Au sein du parc national des Écrins, la première réserve intégrale de France a été créée : une partie du vallon de Lauvitel, dans la commune du Bourg-d'Oisans (Isère) qui n'est plus exploitée forestièrement, ni pâturée, bénéficie d'une protection stricte. C'est le premier espace vierge débarrassé de toute activité humaine : ni activité pastorale, ni randonnée. Un test pour les scientifiques et un témoignage pour les générations futures.

Les épreuves des 33es Olympiades des métiers se sont déroulées à Lyon en octobre 1995. Elles permettent à plus de 500 candidats de moins de 22 ans, venant de 33 pays, de se mesurer dans 42 métiers différents. En accueillant cette manifestation à Lyon, Charles Millon, président de la Région Rhône-Alpes, souligne l'intérêt qu'il accorde à la formation professionnelle, intérêt renforcé encore par la présence du président de la République, Jacques Chirac.

Avec ses pâturages bien entretenus et ses chalets fleuris, le Beaufortin entre Albertville et le massif du Mont-Blanc a des allures de cartes postales. En dessous de 1 200 mètres les roules ne sont jamais obstruées : non pas tant pour le ramassage scolaire ou la circulation des touristes que pour la collecte du lait (deux fois par jour) qui sert à la fabrication du fromage. Le fromage de Beaufort a bénéficié d'une appellation d'origine contrôlée depuis 1968, et la zone appellation couvre le Beaufortin et la Tarentaise. Un décret impose l'utilisation exclusive de races locales, tarine et abondance, et la production ne doit pas dépasser 5 000 kilogrammes de lait par an et par tête.

Cent ans après sa création, Rhône-Poulenc ne renie pas ses origines lyonnaises. Le septième groupe chimique mondial réalise encore dans la Région Rhône-Alpes 20 % de son activité mondiale et 40 % de son activité française. Il y emploie 14 600 personnes sur 16 sites industriels et dans 23 établissements techniques et commerciaux. Les responsables politiques et économiques régionaux aimeraient bien que cette part augmente encore, mais la hausse régulière de la pression fiscale dans l'agglomération lyonnaise est dissuasive.

Le surgénérateur Phénix de Creys-Malville – qui avait été remis en marche en février 1994, puis arrêté – va à nouveau redémarrer après l'autorisation du directeur de la sûreté des installations nucléaires (DSIN). Cette décision ravive une vieille polémique en France, comme à l'étranger, au moment où le président Chirac annonce la reprise des essais nucléaires dans le Pacifique.

DOM-TOM

En Nouvelle-Calédonie, le consensus s'effrite au lendemain des élections de juillet 1995

Sept ans après la signature des accords de Matignon et à trois ans du référendum sur l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie, le paysage politique du territoire se trouve complètement bouleversé au lendemain des élections provinciales du 9 juillet 1995. La province Sud, où les Européens sont majoritaires, a redonné une majorité confortable au Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR) de Jacques Lafleur. La province Nord et les îles Loyauté, peuplées majoritairement de Mélanésiens, sont restées fidèles aux partis indépendantistes. Depuis 1988, le RPCR et le Front de libération nationale kanak socialiste (FLNKS) avaient harmonieusement cohabité. Désormais, les deux principales formations politiques sont affaiblies par leurs divisions internes. Dans le Congrès du territoire, le RPCR – disposant de 27 sièges sur 54 – avait la majorité absolue grâce à la voix prépondérante du président. Les élections de juillet 1995 ne lui ont donné que 22 sièges. Ce recul est dû à l'entrée en lice d'une nouvelle formation, dissidente du RPCR : « Une Nouvelle-Calédonie pour tous », de Didier Leroux, représente la droite libérale excédée par la domination écrasante de J. Lafleur. Du côté des indépendantistes, le FLNKS est tiraillé entre deux composantes : l'Union calédonienne (UC), majoritaire et modérée, et le parti de Libération kanak (Palika), minoritaire, plus radical et dirigé par le propre président du FLNKS, Paul Néaoutyne. Le Congrès du territoire, qui se compose des trois assemblées de province, va devoir préparer le scrutin d'autodétermination prévu pour 1998. En attendant, il a élu à sa présidence Pierre Frogier (RPCR).