Environnement

Les déchets nucléaires

Les centrales nucléaires françaises produisent 2 000 m3 de déchets hautement radioactifs par an. Ces déchets à vie longue et à haute activité sont actuellement entreposés dans les bassins de désactivation des centrales ou dans les centres de retraitement de la Hague-Beaumont et de Marcoule. Ils sont de plus en plus encombrants et il devient urgent d'aménager des sites de stockage sûrs. L'enfouissement de ces résidus de l'industrie nucléaire civile dans des sites favorables, tant au plan géologique qu'au plan sismique, est la seule solution envisageable dans la mesure où la France, qui s'était abstenue lors du vote du 12 novembre 1993, a finalement ratifié le texte de la convention de Londres portant interdiction absolue et définitive de l'immersion de ces produits, nuisibles à l'environnement marin. Où en est-on ? Dès 1980, l'Agence nationale de gestion des déchets radioactifs, l'ANDRA, a chargé le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) de trouver, dans des formations géologiques différentes, des sites de stockage profond. Les sites de Bourg d'Iré (Maine-et-Loire), de Montcornet (Aisne), de Neuvy-Bouin (Deux-Sèvres) et de Montrevel (Ain) ont été, dans un premier temps, retenus. Mais, selon les termes de la loi du 20 décembre 1991 relative à la gestion des déchets radioactifs, le choix de l'emplacement du centre de stockage ne sera fait qu'en 2010, une fois que les deux laboratoires chargés d'étudier pendant quinze ans les conséquences de l'enfouissement des matières radioactives auront fourni les résultats et les conclusions de leurs recherches. Ces laboratoires pourraient, selon le rapport de Christian Bataille de décembre 1993, être implantés soit dans le Gard (canton de Bagnols-sur-Cèze), soit en Haute-Marne (cantons de Chevillon, Poisson et Joinville), soit dans la Vienne (cantons de Charroux et Civray), ou enfin dans la Meuse, dans un site encore non précisé. Ces réalisations, auxquelles s'opposent les élus écologistes et les représentants des associations de défense de l'environnement – la peur du nucléaire perdure –, ne laissent pas indifférents les conseils généraux concernés. Il est vrai qu'un laboratoire représente 1,5 milliard de francs d'investissement, la création d'au moins 150 emplois et une subvention annuelle de 60 millions de francs pendant dix ans. Le choix de l'emplacement d'un des deux laboratoires et du centre de stockage pourrait finalement se porter sur le département du Gard ; c'est à Marcoule, en effet, que fut édifiée, en 1973, la centrale Phénix, dotée d'un réacteur surrégénérateur à neutrons rapides.

La convention de Londres

La convention de Londres sur la protection de l'environnement marin regroupe 71 pays. Signée en 1972, la convention avait d'abord interdit l'immersion dans les mers et océans des déchets fortement radioactifs puis, en 1983, prononcé un moratoire de 10 ans sur les résidus faiblement ou moyennement radioactifs. Le 12 novembre 1993, la convention a voté, sur proposition du Danemark, l'interdiction absolue et illimitée de la pratique de l'immersion. Cinq pays, dont la France, la Russie, la Grande-Bretagne, la Chine et la Belgique, qui s'étaient abstenus lors de ce vote, ont finalement ratifié le texte sous la pression de leurs partenaires et des organisations écologistes internationales, particulièrement déterminées. La Russie, qui s'était débarrassée de plusieurs centaines de tonnes de déchets radioactifs dans la mer du Japon en octobre 1993, a fini par céder, après avoir obtenu de certains membres de la convention une assistance financière et technique indispensable à la création de centres de stockage en milieu continental.

La réhabilitation des mines d'extraction de l'uranium

La Compagnie générale des matières nucléaires (COGEMA), qui a exploité pendant près de 40 ans la mine de la Crouzille (Haute-Vienne) et celle de l'Écarpière (Maine-et-Loire), a entrepris d'en restaurer les sites. La réhabilitation de ces mines à ciel ouvert, dont la superficie est de plusieurs dizaines d'hectares, implique le démantèlement des installations (usines de traitement), le remblaiement des galeries et des fosses, des terrassements très importants visant à rendre à l'espace minéral une topographie semblable à la topographie originelle. L'inconvénient de telles entreprises réside dans le fait que les résidus d'extraction ou de traitement sont légèrement radioactifs. D'après les analyses et les mesures, les teneurs en thorium 234, radium 226, uranium 235 et radon, gaz radioactif naturellement présent dans les sites uranifères, sont faibles. Les écologistes et les militants associatifs souhaitent néanmoins que des études radioécologiques soient menées afin d'évaluer les risques réels de ces formes de radioactivité sur l'environnement en général et sur les eaux en particulier. Une des meilleures façons de réduire à moyen terme la radioactivité naturelle des anciennes mines est sans doute de végétaliser les résidus d'extraction inertes en les amendant grâce à l'apport de terre végétale.

La pollution de l'air en milieu urbain

Cette pollution caractéristique de toutes les grandes villes, qu'il s'agisse de Shanghai, du Caire, de Lagos, de Mexico, d'Athènes ou de Paris..., est d'autant plus préoccupante qu'elle menace la santé des citadins. Concernant l'agglomération parisienne, l'étude réalisée entre 1987 et 1992 par l'observatoire régional de la santé, et intitulée « Évaluation des risques de pollution sur la santé », montre qu'il suffit que la teneur en dioxyde d'azote (NO2) augmente de 100 microgrammes par mètre cube pour que les crises d'asthme augmentent de 25 %, les maux de tête de 15 %, la mortalité pour cause cardio-respiratoire de 5 %, les hospitalisations et les arrêts de travail de 15 à 20 %... Un rapport, rédigé conjointement par les universités d'Athènes, de Londres et par l'université Harvard, a révélé que 100 Athéniens meurent chaque année en raison de la pollution de l'air et que le nombre de décès augmente de 5 % par jour lorsque le taux de pollution double. Que faire ? Améliorer la surveillance de la qualité de l'air, mettre en œuvre des actions susceptibles de réduire la pollution, poursuivre les études médicales et les recherches en aérotoxicologie. Si à Paris, où la désindustrialisation se poursuit depuis 30 ans, les teneurs en dioxyde de soufre (SO2) et les fumées noires ont nettement diminué, les teneurs d'azote (NO2) et en ozone (O3) ont, du fait de la croissance soutenue du parc automobile, considérablement augmenté. Les mesures relatives à la pollution de l'air sont réalisées par AIR PARIF, organisme de surveillance de l'air en Île-de-France, qui gère un réseau de 29 capteurs, dont 9 implantés dans Paris intra-muros. La procédure d'alerte, fixée par arrêté des 7 préfets d'Île-de-France, définit 3 seuils de pollution en fonction des teneurs des différents polluants (cf. ci-contre). À Athènes, où, selon les chiffres de l'OMS (Organisation mondiale de la santé), les taux d'alerte avaient été dépassés 197 jours en 1991, le ministère de l'Environnement a annoncé, en juin 1994, une série de mesures, d'un coût total de 35 milliards de francs, destinées à ramener, d'ici à l'an 2 000, la pollution de l'air à Athènes à des niveaux supportables. Ces mesures prévoient la réduction de la circulation automobile, le développement des transports en commun, l'amélioration des carburants, le contrôle des industries... En conclusion, si la pollution croissante à Paris et en Île-de-France a des effets incontestables sur la santé de la population, elle est fortement atténuée, selon la saison, par les vents de sud-ouest, d'ouest ou de nord-est. Ainsi l'air de Paris est-il beaucoup moins pollué que celui de Chicago, de Mexico, de Calcutta, de Rome ou d'Athènes...

Le dispositif d'alerte à la pollution, à Paris

Depuis le 15 juin 1994, le traitement informatique des données fournies par les 29 capteurs du réseau AIR PARIF permet de suivre révolution journalière de la pollution et de déclencher éventuellement l'alerte dès que deux au moins des stations enregistrent des teneurs élevées identiques. L'alerte est déterminée par la teneur des différents polluants et elle comprend trois niveaux. La pré alerte est effective dès que la teneur en dioxyde de soufre (SO2) et en dyoxide d'azote (NO2) dépasse 200 μg/m3. Préfectures, mairies et services publics en sont informés. Dès que les teneurs de ces deux polluants dépassent 250 et 300 μ/m3, les administrations et les médias sont prévenus. L'alerte rouge est déclenchée quand les teneurs de SO2 et de NO2 dépassent 600 et 400 μg/m3. Dans ce cas, le préfet peut imposer aux entreprises de ne plus brûler de combustibles soufrés, de réduire, voire même de stopper, toute activité. Il est à noter qu'aucune restriction de la circulation automobile n'est envisagée dans le cadre de cette procédure d'alerte.

Moins de monoxyde de carbone ?

D'après deux chercheurs de l'Oregon Graduate Institute, la teneur en monoxyde de carbone (CO) dans l'atmosphère a, depuis 1987, diminué au rythme de 2 à 3 % par an. Le monoxyde de carbone est un gaz hautement toxique, produit par les véhicules à moteur, par la combustion incomplète du carbone et de ses composés dans les chauffages à bois, à charbon ou à mazout, et par les incendies de forêt et de savane. Le CO a aussi pour inconvénient d'être à l'origine d'une partie de l'ozone troposphérique, gaz à effet de serre, qui perturbe la croissance des végétaux et affecte les voies respiratoires. Selon certains spécialistes, cette bénéfique raréfaction du monoxyde de carbone s'expliquerait par l'augmentation du nombre de véhicules propres munis de pots d'échappement catalytiques et par la diminution des feux de végétation. Ces hypothèses devront être confirmées par des mesures systématiques.

Les sols en danger

Sol, terre, terrain sont synonymes pour le commun des mortels. Le sol est la surface de terrain sur laquelle on bâtit, sur laquelle on marche. Le sol, produit de l'altération des roches sous l'influence du climat et de la biosphère, assure la transition entre le minéral et le vivant. Il est encore mal connu, mais, par l'intermédiaire des plantes et des animaux, il nourrit les hommes. Compte tenu de la croissance de la population mondiale, les sols doivent être gérés comme toutes les autres ressources. On estime que plus des trois quarts de la surface totale sont impropres à la culture et que la moitié seulement du quart restant est exploitée : 3 milliards d'hectares dont 2,1 milliards pour les pays en voie de développement et 870 millions d'hectares pour les pays industrialisés. Or les méthodes culturales, parfois inadaptées, l'utilisation inadéquate d'engrais, les défrichements, la réduction de la durée des jachères, l'arrachage des haies... font que les sols, essentiellement formés de sable et d'argile, sont particulièrement sensibles aux effets du ruissellement et ce, quelles que soient les conditions climatiques. Les pertes de sol varient ainsi entre quelques dizaines de kilogrammes et 130 tonnes par hectare et par an. Dans les seules régions tropicales, l'érosion hydrique et/ou éolienne, favorisée par la déforestation, rendrait chaque année plus de 11 millions d'hectares impropres à l'agriculture ! Le sol n'est pas seulement minéral. Dans les conditions normales il est « nourri » par des apports d'origine végétale et animale transformés peu à peu en matière organique par toutes sortes d'actions biologiques et biochimiques dues au foisonnement de bactéries, de champignons, d'insectes et de vers de terre. Ces derniers, comme les insectes et les fouisseurs, déterminent la porosité, la plus ou moins grande perméabilité et la fertilité des sols. Cette vie, indispensable à la régénération des sols, est elle aussi menacée, notamment dans les pays industrialisés, par l'utilisation massive d'insecticides, de fongicides, d'herbicides, et par la pollution multiforme à laquelle on doit l'augmentation des métaux lourds : cadmium, zinc, plomb, cuivre. Les pluies acides, inhérentes à la pollution atmosphérique, expliquent, quant à elles, l'élimination progressive du calcium, vital pour les plantes. À moyen terme donc, les sols sont réellement menacés et avec eux, l'agriculture, l'élevage et la pêche en milieu continental.

Les substituts des CFC se font attendre

Le protocole de Montréal, adopté par 31 pays en 1987, stipulait que « toute fabrication de chlorofluorocarbones (CFC) doit être proscrite dès la fin de 1995, sauf usage essentiel : aérosols doseurs pour le traitement de l'asthme et de certaines affections pulmonaires ». Fin 1992, l'Union européenne a imprudemment décidé d'anticiper d'un an l'arrêt de la production de ces gaz indispensables au fonctionnement de tous les systèmes de froid, du réfrigérateur au linéaire de supermarché en passant par la chambre froide, à l'industrie aéronautique, en passant par la fabrication d'extincteurs, etc. Or, les pays européens, qui ne sont pas en mesure de couvrir leurs besoins, doivent importer des CFC recyclés et des produits vierges en provenance de Russie, d'Inde et de Chine en attendant que l'industrie puisse produire en suffisance des HCFC, ou hydrochlorofluorocarbones, substituts actuels des CFC, qui menacent eux aussi la couche d'ozone et qui devraient être remplacés d'ici à 2015 par des hydrofluorocarbones. À suivre...

La couche d'ozone toujours « trouée »

Depuis des années, l'ozone se raréfie au-dessus de l'Antarctique pendant le printemps austral ; le célèbre « trou » de la couche d'ozone se reforme ainsi en octobre. La déperdition de l'ozone s'observe également en février au pôle Nord et aux latitudes moyennes. La diminution saisonnière de l'ozone dans la stratosphère est attribuée aux CFC, aux composés du brome et aux aérosols d'origine volcanique.

A. Ruellan et M. Dosso, 1993, Regards vers le sol, Foucher, 1994.
J. Seager, 1993, Atlas de l'environnement, Éditions Autrement, 1994.
Environnement en France, édition 1994/1995, Dunod, 1994.
P. Accoce, la France rurale à l'agonie, Presses de la Cité, 1994.

Philippe C. Chamard
Maître de conférences à l'université de Paris-X consultant international