Journal de l'année Édition 1994 1994Éd. 1994

Angola

L'espoir suscité par la tenue d'élections démocratiques, en septembre 1992, qui devaient sceller la fin de 16 ans de guerre civile entre le mouvement rebelle UNITA (Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola) et le gouvernement du président José Eduardo Dos Santos aura été de courte durée. Après le refus de sa défaite au premier tour d'un scrutin considéré globalement comme libre et honnête par les observateurs internationaux, le leader de l'UNITA, Jonas Savimbi, reprend le maquis. Faute d'avoir obtenu le pouvoir par les urnes, le chef rebelle espère l'obtenir par la force. Un diktat inacceptable pour le parti dirigeant, le MPLA (Mouvement populaire pour la libération de l'Angola), qui estime avoir légalement remporté le scrutin. Après à peine 18 mois d'un cessez-le-feu, instauré après les accords de paix de Bicesse en 1991, l'Angola est de nouveau plongé dans une sanglante guerre civile.

Efforts de paix

La communauté internationale aura déployé des trésors de diplomatie pour ramener Jonas Savimbi à la table des négociations. Les belligérants se rencontrent sous l'égide de l'ONU à Addis-Abeba, en Éthiopie, au mois de février, puis à Abidjan en avril et mai. Mais les efforts de la représentante spéciale des Nations unies à Luanda, Margaret Antsee, et de son successeur, le Malien Alouine Blondin-Beye, tournent court. Inefficaces sont également les pressions des anciens alliés américains et sud-africains du mouvement rebelle, qui condamnent ouvertement la reprise des hostilités. La reconnaissance tardive, en mai, par Washington de son ennemi d'hier, le MPLA, autrefois soutenu par les Soviétiques et les Cubains, puis les menaces de sanctions brandies par l'ONU contre l'UNITA, en septembre, sont par ailleurs bien insuffisantes pour mettre un terme au conflit « le plus meurtrier du monde », selon les termes du secrétaire général des Nations unies, Boutros Boutros-Ghali. À noter cependant que le président angolais a réussi à asseoir son autorité internationale. Ainsi, le gouvernement français, et notamment François Léotard, qui jusqu'alors soutenait plutôt le clan Savimbi, a dû changer rapidement son fusil d'épaule lorsque le président Dos Santos a menacé de retirer à Elf, au profit de compagnies américaines, ses concessions pétrolières dans le pays.

MPLA : Au pouvoir depuis le départ des Portugais en novembre 1975, le Mouvement populaire pour l'indépendance de l'Angola a opéré, depuis 1991, un virage à 180 degrés. Jusqu'alors soutenu militairement par l'ancienne Union soviétique et par Cuba, affichant un marxisme bon teint, son leader, le président José Eduardo Dos Santos était, il y a encore deux ans, l'ennemi no 1 des États-Unis, qui voulaient éviter l'extension de l'influence communiste dans la région. Avec la fin de la guerre froide et lors de l'écroulement du bloc communiste, le chef de l'État angolais s'est plié à une incroyable reconversion pour accepter l'abandon de l'idéologie collectiviste et l'ouverture à l'économie de marché.

UNITA : L'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola est difficilement dissociable de son chef, Jonas Savimbi. Lors de l'indépendance du pays, celui-ci rejette la suprématie du MPLA et s'engage dans une guérilla sans merci contre le pouvoir de Luanda avec le soutien armé de l'Afrique du Sud, des États-Unis, du Zaïre, de la Côte d'Ivoire et du Maroc. Sa position d'allié de l'Occident, dont il espère profiter pour prendre le pouvoir, ne survit pas à la fin de la guerre froide.

Un massacre

En quelques mois, des dizaines de milliers de personnes ont trouvé la mort des suites directes ou indirectes des combats. En tout, 3 millions d'Angolais sur une population de 9 millions subissent les conséquences de la guerre civile. Un chiffre qui pourrait être bien supérieur sans l'aide d'urgence des organisations internationales et non gouvernementales.

La reconnaissance, début octobre, du résultat des élections de septembre par le leader rebelle et les efforts du représentant des Nations unies, favorable à une médiation africaine, laissent croire que l'espoir est encore permis. À moins que cette nouvelle éclaircie ne soit à nouveau ternie par l'entêtement du chef de l'UNITA.

Christophe Champin