Rock n'Roll

L'année Nirvana

En France, comme ailleurs, les disquaires tiennent le même discours : « On n'avait pas vu ça depuis 1977 et les Sex Pistols. » Mélange de punk et de hard rock, Nirvana, un groupe venu de Seattle, électrise désormais les adolescents. Il a même détrôné Michael Jackson outre-Atlantique. Seattle est la ville des usines Boeing, la ville où naquit Jimi Hendrix. Et les trois de Nirvana se veulent les rois du « noisy rock », une musique bruyante, hachée, pachydermique, où seul le rythme installe un soupçon d'organisation.

Comme à la grande époque des Stones ou des Beatles, un faisceau de légendes entoure Nirvana. La mort du guitariste Kurt Cobain fut un moment annoncé et un treizième morceau fantôme apparaîtrait sur la première version de leur disque compact. Leur unique album s'intitule Nevermind, que l'on peut traduire par « C'est pas grave » (un titre qui rappelle d'ailleurs l'un de ceux des Sex Pistols). Le leader du groupe précise : « Cette expression revient tout le temps et semble caractériser notre génération, une bande d'apathiques qui se contentent de vivre dans un rêve télévisé. Nous sommes incapables de nous révolter réellement contre quoi que ce soit. Désabusés, fatigués avant d'avoir lutté. Voilà pourquoi nous essayons d'être extrêmement violents sur scène. »

Pour exorciser l'ennui, le chômage et le désespoir, Kurt Cobain, Chris Novoselic (basse) et Dave Grohl (batterie) proposent une musique fondée sur une pure décharge d'adrénaline. Nirvana reprend le flambeau de Clash ou MC5 en se référant au « combat rock ».

Les adolescents semblent avoir entendu. De là à dire qu'ils ont écouté...

Michael Jackson : la tournée mystérieuse

Commencée fin juillet à Munich, la tournée européenne de Michael Jackson fit deux escales en France, à Vincennes le 13 septembre et à Toulouse le 16. Lors de chaque concert, l'artiste américain utilisait mille tonnes de matériel, dont deux groupes électrogènes capables d'alimenter une ville transportés à bord de 65 semi-remorques... Un déluge de lumières et d'effets spéciaux pour des shows au cours desquels « Bambi » changeait quarante fois de costume. Toutefois, près d'une dizaine de spectacles durent être annulés en Allemagne, Angleterre ou Suisse en raison d'un « rhume » tenace. La presse anglaise, pour sa part, a révélé que Michael Jackson souffrirait d'infections à répétitions à la suite des très nombreuses opérations de chirurgie esthétique qu'il a subies afin de se « blanchir » le visage.

Le « scandale » de l'année est à l'actif de Madonna, dont le clip sulfureux Sex, extrait du disque « Erotica » sorti en octobre, a été interdit sur plusieurs réseaux américains. La chanteuse avait signé en avril un contrat record avec le groupe Time Warner, qui lui garantit un revenu d'au moins 60 millions de dollars (336 millions de F) sur sept ans. L'album sort en même temps qu'un livre de photos érotiques de la star.

Malgré des sorties de poids, Prince, Bruce Springsteen et Guns and Roses, l'Amérique semble désireuse de renouer avec ses racines. La musique country, en plein renouvellement, a placé deux des siens en tête des ventes avec le premier album de Billy Ray Cirus (numéro 1 pendant plus de douze semaines) et Garth Brooks, qui occupa cette place pendant les premiers mois de l'année avec Ropin the Wind, son troisième album.

« Le rock est dans le coma », observe Les Garland, responsable de la programmation de The Box, une chaîne de télévision musicale américaine. « Après une semaine d'appels, on passe 40 % de rap pour seulement 10 à 20 % de rock. » (The Wall Street Journal/Courrier international.)

Michel Embareck