Journal de l'année Édition 1993 1993Éd. 1993

Bourse

1992 a été une année pour rien à la Bourse de Paris. Elle commençait pourtant sous les meilleurs auspices avec l'annonce de la reprise aux États-Unis. Confiant, l'indice Cac 40 (1 749,91 points en début d'année) gagna 17 % jusqu'au 11 mai. De plus, le volume d'affaires fut intéressant (4 milliards de francs par jour). Las, l'espoir de reprise s'évanouit avec l'aggravation persistante du chômage et les mauvais résultats semestriels des entreprises. Pis, les marchés, qui abhorrent l'incertitude, doivent attendre le 20 septembre et le référendum français sur le traité de Maastricht pour être rassurés sur la construction de l'Union économique et monétaire. Mais, à petit « oui », petite confiance. D'autant qu'une semaine avant le scrutin, la Bundesbank assouplit sa politique monétaire sans être suivie par la France. Cela provoque la défiance des marchés.

La tempête monétaire part de la Finlande et, de proche en proche, oblige la lire et la livre à quitter le système monétaire européen tandis que la peseta est dévaluée et la Banque de France contrainte de jeter 160 milliards dans la bataille du franc. En effet, surtout à Londres et à Paris, les spéculateurs parient sur la baisse du franc par rapport au deutschmark. Au plus fort de la crise, le franc monte jusqu'à 3,43 F pour 1 DM (son seuil critique au sein du SME étant de 3,44 F). Solidement épaulée par l'Allemagne, la France défend bec et ongles la parité de la devise. Pour enrayer la spéculation, Paris relève ses taux d'intérêt de manière drastique : presque 13 % (contre 9 % pour les taux allemands). Cette mesure rend beaucoup plus cher le franc, que les spéculateurs empruntent pour acheter du mark dans l'espoir de racheter du franc devenu moins cher à la suite de la dépréciation, voire d'une dévaluation. La France finira par gagner la bataille.

Quant aux investisseurs, ils s'inquiètent de voir la rentabilité des entreprises affectée par la cherté du loyer de l'argent. Les ventes d'actions battent leur plein. Le lundi 5 octobre, le Cac 40 plonge de 7 %. Ce minikrach montre l'impatience des marchés qui désespèrent de voir le gouvernement respecter sa parole quant à une baisse des taux en cas de « oui » au référendum. La Bourse de Paris perd en quelques jours tout le bénéfice de l'année.

La crise connaît son épilogue avec une double hausse des taux d'intérêts français qui tombent à 9,10 %. Cambistes et investisseurs s'imaginent alors pouvoir retourner à la routine toute relative – des transactions boursières. Espoir déçu. Car, deux mois plus tard, le blizzard souffle une nouvelle fois de la Scandinavie. La couronne suédoise est détachée de l'écu et flotte au gré des marchés. Les monnaies faibles plongent à nouveau. La peseta est dévaluée une fois de plus (6 %), de même que l'escudo. Parce qu'il a été décidé rapidement, ce réaménagement monétaire étouffera plus rapidement la crise du SME.

En fin d'année, alors que l'indice des 40 principales valeurs de la Bourse de Paris est sensiblement revenu à son niveau du début d'année, les opérateurs sont dans l'attente. Qu'il s'agisse des premières mesures économiques du président Bill Clinton, qui a fait de l'économie son cheval de bataille, comme des élections législatives françaises de mars. Mais le plus attendu, c'est une baisse des taux d'intérêts allemands alors que le Comité des Sages prévoit une croissance zéro pour le pays en 1993.

Les valeurs françaises n'ont guère varié. Seules les valeurs de consommation restent stables, à l'inverse des compagnies d'assurances, des publicitaires et des banquières. Les sicav monétaires enregistrent de bons résultats, après avoir bénéficié du relèvement temporaire de taux d'intérêt en octobre. Mais les grandes gagnantes sont les obligations. En effet, par un mouvement mécanique, quand les taux baissent, leur prix monte en générant des plus-values. La meilleure affaire est l'achat d'obligations convertibles, puisque leurs titulaires les échangeront contre des actions lorsque le marché repartira à la hausse.