Sous la pression des pays pauvres, on découvrit ainsi que la protection de l'environnement ne dépend pas tant des mesures de lutte contre la pollution que de l'adoption d'une politique générale et globale qui tienne compte notamment des relations entre les pays et des interactions entre phénomènes paraissant jusqu'alors totalement indépendants les uns des autres.

Le 14 juin 1983, une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies créa la Commission mondiale sur l'environnement et le développement (CMED). Son rapport : « Our Common Future » (Notre avenir à tous), communément appelé « Rapport Brundtland », du nom du président de la Commission, Mme Gro Harlem Brundtland, fut rendu au début de 1987. D'entrée de jeu, il définissait la nouvelle problématique des relations entre environnement et développement économique : « Il est impossible de dissocier les problèmes de l'environnement de ceux de la croissance économique. Le développement économique, sous n'importe quelle forme, détruit le capital naturel, de telle sorte qu'une réglementation au plan mondial s'impose ; inversement, la dégradation de l'environnement peut arrêter à terme le développement. Par ailleurs, la pauvreté doit être regardée comme étant à la fois la cause première et la principale conséquence de la dégradation de l'environnement et cela aussi sur le plan international. Par conséquent, le traitement des problèmes du milieu naturel ne peut pas ignorer la pauvreté et surtout les inégalités de développement dans le monde. »

Si l'on part du fait que la dégradation de l'environnement est provoquée par la croissance économique et qu'inversement la première peut arrêter la seconde, la préoccupation essentielle devient celle de la continuité de la croissance économique sans dommage pour le capital naturel et pour les générations futures. C'est pour répondre à cette préoccupation qu'a été introduit le concept de développement soutenable ou durable : ce qui est recherché, c'est le maintien des systèmes de développement économique sur le long, voire le très long terme. Autrement dit, un développement soutenable est un développement durable, c'est-à-dire un développement où coévoluent systèmes économiques et biosphère, de façon que la production issue des premiers assure la reproduction de la totalité des facteurs de la seconde.

Contraints à s'entendre

Par conséquent, pour que le développement économique soit véritablement « soutenable », il faut tenir compte de trois sortes de contraintes : en premier lieu, comme le souligne l'OCDE, si l'objectif général consiste à augmenter la production tout en préservant le capital naturel, il ne faut pas non plus oublier qu'il faut « répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins ». Se trouvent ainsi introduits une notion de responsabilité « éthique » des générations actuelles vis-à-vis des générations futures et le souci d'adopter des stratégies de préservation ou de conservation du patrimoine. En second lieu, les inégalités de répartition des ressources naturelles à travers le monde ne doivent pas être aggravées, notamment en évitant que les pays industrialisés ne transfèrent leurs dommages aux pays beaucoup plus pauvres qu'eux. Enfin, le rapport Brundtland a fait admettre que la réconciliation entre la croissance économique et l'environnement devait intervenir au plan mondial.

Depuis sa publication, ce rapport a surtout fait prendre conscience – beaucoup moins vivement toutefois dans les pays industrialisés que dans les autres – de la nécessité d'un traitement négocié des relations environnement-croissance. Ainsi, la défense des intérêts de certaines catégories de producteurs, par exemple agricoles, conduit les gouvernements des pays industrialisés à verser des subventions ou à attribuer des aides fiscales. Les unes et les autres favorisent alors la surproduction qui non seulement dégrade la base des ressources (épuisement et érosion des sols), mais, surtout, ruine les agricultures vivrières des pays en développement.