Au Royaume-Uni, les prix ont grimpé de 10,6 % et Mme Margaret Thatcher a fini, le 5 octobre, par accepter de faire entrer la livre sterling dans le système monétaire européen. Sa démission, le 22 novembre, a été partiellement due aux divergences qui existaient entre elle et certains de ses ministres sur la construction de l'Europe.

Les dirigeants français, quant à eux, ont recherché l'accélération de l'union monétaire que facilitait la modération de notre inflation (de l'ordre de 3,8 %), celle-ci n'étant plus supérieure que d'un demi-point à celle de l'Allemagne.

L'industrie électronique européenne s'est enfoncée dans la crise. Le 30 juillet, la firme japonaise Fujitsu a racheté la société ICL qui était le dernier constructeur britannique de gros ordinateurs ; le 25 octobre, le groupe néerlandais Philips a annoncé la suppression de 35 000 à 45 000 emplois d'ici à la fin de 1991 ; et, en décembre, Thomson-CSF a fait savoir qu'il se proposait de supprimer 2 000 à 3 000 postes dans son secteur militaire.

Les agriculteurs ont eu aussi des sujets d'inquiétude. En effet, si le revenu des exploitants français a progressé en moyenne de 5,1 % en 1990, le niveau de vie de l'ensemble des agriculteurs de la Communauté n'a pas, pour autant, augmenté, et risque même de baisser dans les prochaines années ; car, malgré l'offre de la CEE de réduire de 30 % en dix ans ses subventions à l'agriculture, les négociations commerciales menées dans le cadre du GATT ont été suspendues le 7 décembre.

Les responsabilités internationales de la Communauté n'ont cessé de grandir. À la suite de leur réunion à Paris le 21 août, les neuf pays membres de l'UEO (les Douze moins le Danemark, la Grèce et l'Irlande) ont coordonné leurs opérations navales dans le Golfe ; puis la CEE a accordé un large soutien financier à la Jordanie, à l'Égypte et à la Turquie, qui souffraient particulièrement de l'embargo contre l'Irak. Les Douze ont aussi joué un rôle primordial dans l'aide attribuée par les Occidentaux aux pays de l'Est.

Laurent Leblond

Tiers-Monde

Les années 1980 auront été « une décennie perdue » pour les pays en développement. Hormis quelques brillantes exceptions situées essentiellement en Asie, le bilan économique et social est désastreux.

Cumulant une croissance faible (voire négative), une chute de ses ressources tirées des matières premières, une baisse de l'investissement, une dégradation de l'infrastructure économique et sociale et de l'environnement et un service de la dette de plus en plus lourd en dépit de politiques d'ajustement structurel (PAS), le tiers-monde s'enfonce dans le sous-développement (plus d'un milliard d'hommes vivent avec un revenu inférieur au seuil de pauvreté absolue de 370 dollars par an).

Dans beaucoup de pays, essentiellement d'Afrique subsaharienne et d'Amérique latine, le revenu par tête a stagné ou même baissé, la croissance de la population l'emportant sur celle du PIB. La situation des Pays les Moins Avancés (PMA), dénomination qui regroupe aujourd'hui 41 États (contre 31 en 1981) − dont 28 en Afrique − représentant 440 millions d'habitants (contre 348 en 1981) et moins de 1 % du PNB mondial, est encore plus mauvaise. La deuxième conférence des Nations unies sur les PMA, qui s'est tenue à Paris en septembre sous l'égide de la CNUCED (Conférence des Nations unies pour le Commerce et le Développement), a constaté que les indicateurs sociaux concernant ces pays (mortalité infantile, espérance de vie, alphabétisation, scolarisation primaire) ont traduit une détérioration de leur situation.

Le tiers-monde est confronté aux nouvelles menaces que l'ouverture des pays de l'Est et la crise du Golfe ont fait surgir. Réunis à Kuala Lumpur, en Malaisie, au mois de juin, les quinze grands débiteurs ont manifesté leur crainte de voir les bouleversements intervenus en Europe de l'Est privilégier les rapports Est-Ouest au détriment du dialogue Nord-Sud, déjà en panne, en ce qui concerne notamment l'aide financière. Ainsi, la marginalisation s'accentuerait, et la crise de la dette (1 322 milliards de dollars, dont 50 % pour le compte des 15) serait ravivée par des taux d'intérêt de plus en plus élevés du fait de l'évidente pénurie de capitaux.