Le Bicentenaire

Grandioses cérémonies parisiennes et petites fêtes locales, films, pièces de théâtre, livres, expositions et colloques ont jalonné la célébration du bicentenaire de la Révolution. Mais l'événement ne fait toujours pas l'unanimité et son analyse divise les historiens.

L'année 1989 a été marquée par les manifestations du bicentenaire de la Révolution française. C'est en août 1986 que fut créé l'organisme officiel chargé de préparer et de mettre en œuvre la commémoration des événements de 1789 : la Mission du Bicentenaire, successivement présidée par Michel Baroin, haut dignitaire de la franc-maçonnerie et important homme d'affaires, qui se tua dans un accident d'avion en février 1987, Edgar Faure, académicien et homme politique, ancien ministre de la Ve République et président du conseil sous la IVe, mort le 30 mars 1988, et Jean-Noël Jeanneney, un historien universitaire, ex-P-DG de Radio-France, fils d'un ministre de la Ve République et petit-fils du président du Sénat de la IIIe, nommé en juin 1988.

Le budget initial de 50 millions de francs fut porté à 325 millions. La Mission a inscrit 8 000 projets, en a sélectionné 5 000, labellisé 2 000 et aidé à financer 400. À l'effort financier de l'État, il faut ajouter celui des collectivités locales, particulièrement des conseils régionaux, généraux et municipaux. Par exemple, 12 millions de francs pour le seul conseil régional d'Île-de-France.

Le Bicentenaire en actions

Patronnées par les plus hautes autorités de l'État, les fêtes du Bicentenaire ont été organisées, sur l'ensemble du territoire, par des élites politiques et sociales, nationales ou locales, soucieuses de ne retenir de l'héritage révolutionnaire que les aspects les plus consensuels : les grands principes, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la naissance d'une nouvelle société plus libre et moins inégale que l'ancienne. Mais la population, à la fois actrice et spectatrice de la commémoration, a été étroitement associée aux multiples aspects de la célébration : bals, défilés costumés, feux d'artifice, spectacles, animations dans la rue. Des expositions, des colloques, la publication de nombreux ouvrages relatifs à la Révolution ont ajouté une dimension scientifique et culturelle à la fête collective.

Le 1er janvier 1989, dans chaque chef-lieu de département, fut mis en vente le timbre du Bicentenaire tandis que le courrier affranchi avec ce timbre « premier jour » était acheminé en Montgolfière. Le 21 mars fut consacré à la plantation des arbres de la liberté. À Versailles, le 4 mai, 1 200 personnages costumés reconstituèrent la procession d'ouverture des États généraux. En juin, place de l'Hôtel-de-Ville, à Paris, il y eut la projection gratuite des plus célèbres films relatifs à la Révolution, tels le Napoléon d'Abel Gance et le Danton d'Andrzej Wajda. Les cérémonies les plus solennelles se déroulèrent autour du 14 juillet devant un parterre de chefs d'État et de gouvernement spécialement invités pour la circonstance par le président de la République, François Mitterrand, dans le même temps que se tenait, à Paris, un sommet des sept pays les plus riches du monde.

C'est à cette occasion que furent inaugurées les deux grandes réalisations architecturales destinées à conserver le souvenir du Bicentenaire comme la tour Eiffel avait symbolisé le Centenaire en 1889 : l'Opéra de la Bastille et l'Arche de la Fraternité. L'Opéra de la Bastille (réalisateur : Carlos Ott) a coûté 2,85 milliards de francs et sera prioritairement consacré à la création contemporaine ; l'Arche de la Fraternité (conçue par l'architecte danois Otto von Spreckelsen), à l'extrémité occidentale du grand axe historique de l'Arc de triomphe, est une immense porte cubique de 100 mètres de haut, revêtue de marbre blanc de Carrare. Son toit-belvédère abritera la Fondation des Droits de l'homme. Toujours sur le plan architectural, l'année du Bicentenaire a été marquée par la restauration de quelques autres monuments parisiens, notamment la dorure à l'or fin du dôme des Invalides, des grilles du Louvre et des statues du pont Alexandre-III. L'évacuation de la partie du Louvre occupée par le ministère des Finances permettra de faire du palais le plus grand musée du monde.