Météo : l'Hiver

La période allant du 21 décembre aux premiers jours de janvier est marquée par la persistance de conditions anticycloniques et l'absence quasi générale de précipitations. Les pluies fines et les bruines observées dans l'Ouest, le Nord et le Nord-Est du 22 au 24 et le 27 décembre sont le fait de perturbations peu actives.

Une sécheresse hivernale exceptionnelle et préoccupante

En ce début d'hiver, les réserves en eau des sols sont très faibles ; au 31 décembre, le rapport R/RU de la réserve en eau disponible à la réserve utile est inférieur à 35 % en Berry, Touraine et Aquitaine, dans le Poitou-Charentes et le Midi-Pyrénées. En janvier, les déficits pluviométriques sont très importants sur l'ensemble du territoire comme l'attestent les chiffres records suivants : 19,7 mm à Toulouse-Blagnac (normale 1951-1980 : 56,5 mm) ; 8 mm à Chamonix au heu de 11 mm en 1953 ; 11,6 mm à Lyon-Satolas au lieu de 25,2 en 1983 (normale 62 mm)... Cette sécheresse, imputable aux très hautes pressions qui se sont installées durablement sur la France, l'Allemagne et l'Italie (à Hyères, la pression moyenne mensuelle a été de 1 029 hPa au lieu de 1 027 en 1983 ; à Avord : 1 032,8 hPa au lieu de 1 029,8 en 1964...) et exacerbée par des températures supérieures aux normales, a contribué à l'aggravation du bilan hydrique des sols, notamment au sud de la ligne Dinard-Nice. Ce manque d'eau, qui a retardé la levée des céréales dans certaines régions, pourrait, s'il se prolongeait, avoir des conséquences sur la phénologie des plantes cultivées et sur la production agricole.

En stabilisant une énorme masse d'air doux, l'anticyclone a favorisé la formation de brouillards épais et persistants dans les vallées de la Saône, du Rhône, de la Seine ou du Pô et l'augmentation de la pollution atmosphérique au-dessus de Paris, de Lyon ou de Milan. Le 27 janvier, dans cette dernière ville, la concentration en dioxyde de soufre a atteint 431 microgrammes par m3 et celle de dioxyde d'azote 426 microgrammes par m3 alors que les seuils consentis en Europe sont de 250 et 200 microgrammes respectivement ! La situation météorologique qui a prévalu en janvier explique la faiblesse de l'enneigement dans tous les massifs ; Avoriaz : 40-65 cm ; Megève : 20-70 ; l'Alpe-d'Huez : 60-80 ; Chamrousse : 20-30 ; Serre-Chevalier : 5-15 ; Font-Romeu : 45-55 ; les Rousses : 5-20 ; Superlioran : 10-10...

Trois ans après Clotilda, Firinga ravage la Réunion

Le 29 janvier, l'île de la Réunion est dévastée par le cyclone Firinga ; le bilan est très lourd : 3 morts, des dizaines de blessés, des milliers de personnes sans abri ; les dégâts sont évalués à 1,5 milliard de F. Aux États-Unis, des températures de l'ordre de – 25 °C sont mesurées dans le Montana ; elles sont les premières manifestations de la vague de froid qui, du 1er au 12 février, affecte tout l'Ouest.

En février, les températures ont été, selon les régions, de 1 à 2 degrés supérieures aux normales. Seuls les premiers jours du mois ont connu des températures basses, des brouillards localement givrants et une importante nébulosité. Les pluies ont été légèrement excédentaires dans l'Ouest et le Sud-Ouest, normales ou faiblement déficitaires sur le reste du pays. L'essentiel des pluies et des chutes de neige a été enregistré entre le 22 et le 28, période au cours de laquelle se sont succédé des perturbations très actives, accompagnées de vents forts. Du 24 au 27, une tempête d'une violence inhabituelle a sévi sur le Portugal, l'Espagne, la France méridionale et l'Italie. Outre son bilan très lourd (52 morts, des dizaines de blessés et des dégâts matériels), cette tempête a été marquée par des valeurs de pression atmosphérique exceptionnellement basses sur tout l'ouest et le sud-ouest de l'Europe : 957,8 hPa à Paris-Montsouris ; 958,2 hPa à Rennes ou 964,6 hPa à Nevers le 25 et des vents très forts tant dans les régions littorales qu'à l'intérieur des terres (144 km/h à Carteret, 102 km/h à Orléans le 25). Au 28 février, l'enneigement est aussi médiocre qu'à la fin de janvier. Hors de France, l'actualité météorologique a été dominée par la froidure calamiteuse qui s'est abattue sur l'ouest des États-Unis pendant la première décade (– 35 °C à San Francisco), par les effets dévastateurs du cyclone Harry en Nouvelle-Calédonie les 11 et 12 février, par les pluies diluviennes observées aux Canaries les 16 et 17 ou par la pire sécheresse de l'histoire néo-zélandaise.

Mars quasi estival en France, quasi polaire en Californie

Le mois de mars, avec des températures supérieures de 3 °C aux normales, est un mois d'hiver étonnamment chaud, un des plus chauds depuis 1957 ; citons par exemple ces quelques températures maximales records : 20,4 °C à Paris-Montsouris le 6, 21,8 °C à Ambérieu, 23,5 °C à Mende, 22,1 °C à Auxerre et 25,6 °C à Gourdon le 12 mars. Les trois épisodes pluvieux de la période allant du 1er à l'équinoxe ont profité au nord et à l'ouest du pays ; dans les autres régions, la pluviométrie a été déficitaire à très déficitaire : 20 % dans le Nord-Est, 34 % dans le Sud-Ouest, 77 % dans le Sud-Est. Le 21 mars, la sécheresse est préoccupante dans une grande partie du territoire ; le rapport R/RU est inférieur à 60 % en Poitou-Charentes, en Aquitaine, en Provence, en Corse, en Languedoc-Roussillon et dans le sud du Massif central. En cette fin d'hiver, il existe un risque précoce d'incendies de forêts. L'enneigement n'est satisfaisant que dans les stations de haute montagne ; La Clusaz : 20-180 cm ; La Plagne : 120-200 ; les Deux-Alpes : 10-270... Ainsi, l'hiver 1989 restera dans les mémoires comme un hiver anormalement doux et sec.

Philippe C. Chamard