La troisième génération : robotique et productique

Les robots font la fête... Cette année, les robots ont d'abord bénéficié de la faveur du grand public. Et cela, grâce à de spectaculaires manifestations dont l'impact a été largement relayé par les médias. Au printemps, s'est ouverte l'exposition de Tsukuba qui va durer six mois et recevoir 20 millions de visiteurs. D'étonnants robots humanoïdes en sont les vraies vedettes.

On n'oubliera pas de sitôt Wasubot, le robot joueur de piano, conçu à l'université de Waseda avec la collaboration du groupe Sumitomo. Muni d'une caméra électronique et d'un processeur de vision, il déchiffre tout seul sa partition en une vingtaine de secondes et commence à jouer tout en continuant à lire les notes de musique. Il joue très correctement du piano de ses doigts mécaniques en actionnant également les pédales avec ses jambes articulées : il a même accompagné l'orchestre national de Tokyo, lors de la cérémonie d'inauguration. Wasubot sait aussi entendre et parler, bien que son vocabulaire reste limité à une centaine de mots.

Ce robot rassemble en fait tout l'éventail des technologies actuellement expérimentées au service de la robotique dite de troisième génération : des machines rapides et précises munies de capteurs d'environnement (vue, parole, ouïe) et dotées de moyens de pilotage informatique très perfectionnés, faisant appel aux techniques de l'intelligence artificielle.

Il en va de même pour Fanuc-Man, un autre robot androïde présenté par la société Fanuc, géant mécanique de 5 mètres de haut qui soulève avec ses deux bras des haltères de 200 kg. Mais grâce à ses seize degrés de liberté – six pour chaque bras et quatre pour le tronc – et aux capteurs optiques placés dans ses pinces, il peut procéder à de fines opérations d'assemblage. Il monte et démonte ainsi, devant les visiteurs médusés, un modèle réduit de robot à sa propre image. Étonnante démonstration du mythe du robot procréateur ! Pour piloter ce monstre d'acier, il ne faut pas moins de trois armoires de commande numérique.

De « vrais » robots industriels sont également exposés pour en illustrer toutes les possibilités actuelles : Matsushita utilise un robot de peinture à six axes pour dessiner les portraits des visiteurs en trois minutes : dix secondes pour numériser votre image à l'aide d'une caméra, deux minutes pour programmer les mouvements du crayon, cinquante secondes pour vous dessiner... De son côté, Toshiba utilise des robots d'assemblage pour un spectacle de ballet.

Plusieurs robots mobiles sont également présentés : le plus spectaculaire est le robot baladeur de Mitsubishi : étudié par le Tokyo Institute of Technology, il peut marcher, faire demi-tour monter les escaliers...

Enfin, dans le pavillon français, la société Bertin montre une autre voie pour la robotique de service : l'assistance médicale et l'aide aux handicapés. Une chambre d'hôpital est reconstituée avec un mannequin pour simuler le malade alité et un bras robot télécommandé. Il s'agit d'un télémanipulateur Spartacus, étudié à l'origine par le CEA pour les besoins du nucléaire et transposé pour l'aide aux handicapés. Il exécute des ordres directement donnés par commande vocale. Un téléphone à composeur vocal de la société Jeumont-Schneider est également présenté dans cette chambre d'hôpital robotisée : il suffit de prononcer le nom du correspondant pour déclencher un appel.

Cette grande exposition a voulu ainsi sensibiliser très largement le public à la robotique et surtout présenter aux jeunes les robots comme de futurs amis, un peu à l'exemple des films américains de science-fiction qui foisonnent depuis quelques années à la suite du succès de la Guerre des étoiles.

En France, le grand public découvre aussi cette année des spectacles de robots : tout d'abord en octobre au festival de l'Industrie et de la Technologie organisé par l'Anvar à la Villette. Le « théâtre des robots » est un show qui mêle musique, laser, jeux et travaux, exécutés par des robots industriels associés à des jouets télécommandés : un robot de peinture AKR redore consciencieusement un buste d'Hercule, une chouette mécanique dialogue avec un robot d'assemblage Scemi, un androïde parlant présente des produits issus d'entreprises innovatrices... De même, quelques semaines plus tard, les vitrines des Galeries Lafayette feront aussi appel à la magie de la robotique : des robots industriels d'assemblage modèles Puma de la société Staubli-Unimation mêlent leurs mouvements précis aux sautillements mécaniques des automates animés construits en Lego au milieu des jouets de Noël.

Des robots pour la maison

Malgré cette fascination du grand public pour les robots, on notera que a robotique domestique ne s'est pas développée cette année aussi vite que les experts le prévoyaient. En 1983, Future Computing estimait qu'une personne sur dix possédant un ordinateur personnel était acheteur potentiel d'un robot domestique, ce dernier étant une sorte de périphérique mobile de l'ordinateur. D'où des marchés surestimés : 50 000 robots dans les foyers en 1985 et 4 millions en 1990, soit un chiffre d'affaires de 6 milliards de dollars en 1990 !