Religion

Doctrine

La place de Dieu

– Dans une salle de conférences aussi grande qu'un stade de football, des milliers de jeunes et de moins jeunes entonnent des cantiques. À la tribune, le président de leur pays, grave, peut-être ému, lance : « Politique et religion sont forcément liées. » Cela se passe le 23 août à Dallas où, avant de se rendre à la Convention républicaine, Ronald Reagan était invité par une organisation religieuse appelée Majorité morale.

– Le Soudan, pays africain, applique la loi pénale islamique (charia), qui prévoit notamment la flagellation pour consommation d'alcool ou relations sexuelles entre célibataires, l'amputation de la main droite pour vol, la lapidation pour adultère, la décapitation pour meurtre.

– En Pologne, un vif conflit oppose depuis la fin de 1983 le pouvoir, qui veut enlever les crucifix des écoles, à la population, qui souhaiterait les y conserver.

Ces trois informations démontrent la force du fait religieux dans le monde de 1984. On pourrait en recenser bien d'autres qui vont dans le même sens et annonceraient, selon certains, « le retour de Dieu ». Des observations s'imposent.

L'expansion de l'islām est incontestable, surtout en Afrique noire. Les tendances dites intégristes se renforcent. Avec l'appui de pays comme l'Iran et la Libye, ces tendances entraînent, dans le Maghreb, parmi les immigrés musulmans en Europe, une observation plus stricte et plus littérale de la loi religieuse, la multiplication des lieux de culte, une intervention plus directe des religieux musulmans dans la politique des États.

Le christianisme, lui, retrouve vigueur dans des pays où il est aussi une forme de protestation contre le pouvoir établi : c'est vrai de la Pologne, mais aussi de certaines régions d'Amérique latine. Aux États-Unis même, pays de forte tradition religieuse, les références au christianisme se multiplient dans la vie politique : Ronald Reagan a, entre autres, proposé le retour à la prière à l'école, et le pasteur Jesse Jackson a mené campagne en s'appuyant sur les organisations religieuses.

Mais la multiplication de ces références ne paraît pas correspondre, sauf exceptions, à une nouvelle vitalité des Églises. Dans la quasi-totalité des pays européens, c'est plutôt l'indifférence qui s'étend. La pratique est à peu près partout en baisse, et les sacrements en récession. Le nombre des vocations sacerdotales et religieuses reste très faible. Et, si un homme comme le pape Jean-Paul II attire les foules, celles-ci admettent de moins en moins — les sondages le prouvent, mais les faits aussi — que l'Église leur donne des commandements pour ce qui concerne leur vie personnelle : l'attitude à l'égard de la contraception est l'exemple le plus probant.

L'athéisme enfin : des pays entiers, presque des continents, vivent pratiquement en dehors de toute référence religieuse. Un tiers de l'humanité ignore ou rejette tout Dieu. L'athéisme est l'idéologie de deux grandes puissances, l'URSS — où les arrestations pour motif religieux se sont multipliées en 1984 — et la Chine.

Cette situation est tellement nouvelle dans l'histoire des hommes qu'elle inquiète bien des intellectuels et même des gouvernants. La religion, observent-ils, jouait jadis le rôle de ciment social, fondait un certain nombre de valeurs aussi nécessaires à la vie d'une société que les vitamines au corps humain.

L'homme se trouve désormais privé des règles et des principes sur lesquels il s'appuyait jadis. S'en réjouir ou le déplorer relève du choix de chacun. Mais ce phénomène de société est capital.

Vatican-Italie le concordat

L'excellence des relations entre l'Italie et le Vatican est marquée par la visite officielle du président de la République, Sandre Pertini, dans la cité du pape, et la journée de vacances que le président et Jean-Paul II passent ensemble, le 16 juillet, dans un massif alpin du nord de l'Italie, où le pape a chaussé des skis.

Pour l'avenir, c'est la conclusion d'un nouveau concordat avec la République italienne qui retient plus l'attention. Les négociations, prévues depuis 1967, ne s'étaient ouvertes qu'en 1976 en raison des vicissitudes de la vie politique italienne. Le nouveau texte ne reprend pas le principe de « la religion catholique comme seule religion de l'État ». Mais les mariages célébrés par l'Église sont automatiquement reconnus par les autorités civiles tout comme, à l'inverse, les sentences de nullité de mariage prononcées par les tribunaux ecclésiastiques.

Catholicisme

La fermeté du Vatican

Développement de l'action diplomatique à l'extérieur, renforcement de la discipline à l'intérieur de l'Église : le pape Jean-Paul II, tout au long de l'année 1984, accentue ces deux traits qui resteront la marque dominante de son pontificat.