Mais cela est insuffisant pour ralentir la consommation de drogue : 13 000 toxicomanes ont été recensés par l'OCRTIS, soit 30 % de plus qu'en 1981. Les drogués sont en majorité des hommes, de plus en plus jeunes : 90 % ont entre 15 et 30 ans. Pour le monde entier, l'Organe international de contrôle des stupéfiants, lié à l'ONU, note que les victimes de ce fléau « sont non seulement souvent des adolescents, mais aussi maintenant des enfants ».

Dans les pays occidentaux, la drogue touche encore en majorité les milieux aisés ou la petite bourgeoisie. Sous des formes mineures, en particulier l'inhalation de colle, elle a cependant atteint le monde ouvrier et les enfants des immigrés. Le maire d'Aix-en-Provence ira même jusqu'à interdire dans sa ville la vente de dissolution pour rustines, très appréciée de certains écoliers et lycéens, mais très toxique pour l'appareil respiratoire.

Cannabis

Cette progression de la drogue vers des consommateurs plus pauvres se retrouve à l'échelle internationale. Des pays africains jusqu'alors épargnés sont touchés à leur tour. En Thaïlande, on recense officiellement 500 000 toxicomanes.

Il faut dire que ce pays est un des principaux producteurs du fameux Triangle d'or. Les forces armées thaïlandaises ont tenté, début 82, de démanteler les maquis de trafiquants. Plusieurs jours d'opérations militaires contre l'Armée Unie Shan, dirigée par le trafiquant Khun Sa, se soldent par la mort de 16 policiers et celle de 82 trafiquants. 25 t d'opium, 10 t d'armes et de munitions sont saisies. Cette opération spectaculaire ne sera pas suffisante cependant pour arrêter le flot d'opium qui s'écoule du Triangle d'or vers l'Occident. La récolte est estimée pour 1982 à 600 t d'opium, trois fois plus que l'année précédente.

Les policiers notent d'ailleurs à travers le monde une forte augmentation de la consommation de cocaïne ; « les saisies de cocaïne ont augmenté plus vite que celles de toute autre drogue » affirment les experts des Nations unies, qui cependant font toujours du cannabis la drogue la plus consommée.

L'image de drogue douce dont bénéficient le cannabis et ses dérivés — marijuana, haschisch et huile de haschisch — contribue sans doute à favoriser sa consommation. En France, 47 % des toxicomanes notoires ne consomment que du cannabis. Les experts polémiquent régulièrement sur la nocivité du hasch et l'accoutumance qui lui serait liée. Mais l'ampleur du phénomène drogue écarte pour longtemps la dépénalisation prônée par certains.

Cinq ans après, le procès de Broglie n'a pas apporté la lumière

Il aura fallu cinq ans d'instruction et trente-cinq audiences de la cour d'assises de Paris pour arriver au verdict de cette affaire, qui restera dans les annales judiciaires comme une sorte de Watergate français (Journal de l'année 1976-1977).

Quatre accusés : Gérard Frèche, qui a tiré sur Jean de Broglie et l'a tué, Serge Tessèdre, l'intermédiaire entre l'assassin et son recruteur, Guy Simoné, l'ancien policier devenu truand, et Pierre de Varga, l'instigateur présumé du crime.

Vedettes politiques

Pourquoi a-t-on exécuté de Broglie ? Parce qu'il était au bord du gouffre et que sa chute risquait d'éclabousser trop de monde ? Mais comment Jean de Broglie, héritier d'une riche et illustre famille, est-il devenu cet homme aux abois, criblé de dettes et sans doute compromis dans d'inavouables trafics ? Ce n'est pas le jugement de ses assassins qui nous l'aura dit.

On avait préparé l'opinion publique à l'idée d'un procès retentissant, qu'animeraient les témoignages de vedettes politiques. Et, comme les hommes du gouvernement de l'époque sont maintenant dans l'opposition, on espérait beaucoup de la liberté des débats. Hélas, de ce dossier de quelque 10 000 pièces et qui pèse, dit-on, près de 150 kilos, la lumière ne jaillira pas.

Le procès s'ouvre le 4 novembre. Le 26, première déposition attendue : celle de Michel Poniatowski. Celui que l'on a accusé, lorsqu'il était ministre de l'Intérieur, d'avoir été averti des menaces de mort qui pesaient sur Jean de Broglie, et de n'en avoir pas parlé, ne se départira pas un instant de sa bonhomie, de sa majesté débonnaire.