Information

Les problèmes techniques et politiques agitent toute la presse

Placée, de par sa fonction même, au cœur de l'événement, la presse cède parfois à la passion et ne respecte pas toujours son devoir d'objectivité. Aussi les périodes de grande tension politique sont-elles suivies de remises en cause spectaculaires. Au lendemain du 10 mai 1981, un vent de fronde souffle dans quelques salles de rédaction. Des journalistes sont déplacés ; on parle de chasse aux sorcières. L'information n'est pas fondamentalement différente pour autant : la nouvelle majorité s'en plaint. Dans plusieurs grands médias le malaise s'accroît : le ministre de la Communication, Georges Fillioud, qualifie la radio et la télévision de « corps malades », et Claude Estier, dans l'Unité, reconnaît que le fait de n'avoir pas considéré la réforme de l'audiovisuel comme « la priorité des priorités » était une erreur.

C'est seulement au mois d'avril 1982 que le projet de réforme de l'audiovisuel — préparé par le rapport Moinot — vient devant le Parlement.

Après en avoir débattu du 29 avril au 15 mai, l'Assemblée adopte la nouvelle loi. Elle prévoit, notamment, la création d'une Haute Autorité — composée de 9 membres, 3 étant désignés pour trois ans, 3 pour six ans, 3 pour neuf ans, désignés par le Président de la République, le président de l'Assemblée et le président du Sénat — qui devra veiller au respect du pluralisme du service public ; l'abandon du monopole de programmation conduit à accorder la liberté en matière de radio et de télévision, sous certaines conditions cependant : les radios locales pourront donc exister, mais sans recourir à la publicité. Le gouvernement conserve le contrôle du financement. Le droit de grève est reconnu aux personnels de l'audiovisuel qui pourront toutefois être requis pour un service minimum.

En attendant, que les événements qui surviennent soient liés à la politique ou non, la presse connaît une année agitée.

Dès le 26 août 1981, une commission composée des présidents des quatre sociétés (Radio-France, TF1, A2, FR3) et de représentants des syndicats se réunit pour étudier le dossier des journalistes licenciés pour faits de grève et activités syndicales ; 52 d'entre eux seront réintégrés.

À TF1, un conflit oppose André Harris, directeur général des programmes, à Jean-Marie Cavada, directeur de l'information. Le premier, chargé des dramatiques, des émissions culturelles, des variétés, estime avoir un droit de regard sur l'information, ce qui, après une longue série d'escarmouches, conduira à l'élimination du second. La présentation du nouvel organigramme, en septembre, provoque quelques remous. La diffusion, à une heure de grande écoute, d'un reportage sur un sujet délicat, Les trottoirs de Manille, déclenche une protestation de Georges Fillioud, qui envoie au P-DG de la chaîne une lettre sur ce qu'il considère comme une « erreur professionnelle grave ». Cette intervention, pour le moins maladroite, soulève une réprobation générale. Un journaliste, Jacques Hébert, est sanctionné pour avoir modifié une phrase dans une interview. La réflexion « À la télévision, rien n'a changé depuis le 10 mai » est amputée de ses trois premiers mots lors de la diffusion, ce qui est considéré comme une faute politique par les uns, mais aussi comme une erreur de montage par les autres. Après le départ volontaire de Philippe Vasseur, responsable de l'économie, le licenciement de Richard Vernay, rédacteur en chef du temps de Jean-Marie Cavada, Jean-François Robinet, chef du service social et responsable du service agriculture, est mis à l'écart.

À A2, les journalistes se plaignent d'un manque de concertation et expriment leur défiance vis-à-vis du nouveau directeur de l'actualité, François-Henri de Virieu. Pierre Desgraupes crée treize unités de programmes. Il souhaite davantage de reportages et de magazines axés sur la France et la vie quotidienne. Il désire que soit diffusé une magazine économique et il tient à redonner au grand reportage ses lettres de noblesse.